Longtemps figé, le paysage de l’industrie du biscuit en Tunisie bouge sans
cesse depuis deux ans et voit la concurrence s’y intensifier. Dernier acte
en date de la véritable guerre qui se déroule dans ce secteur d’activité,
l’alliance scellée par le groupe Ulysse Trading and Industrial Companies (UTIC)
avec le français Morina Bay Biscuits, un sous-ensemble du groupe Andros,
dans le but –évident- de profiter de l’expérience et de la créativité d’une
valeur sûre de l’industrie du biscuit en France pour venir contester la
suprématie du groupe Mabrouk –dont la filiale biscuitière, SOTUBI (Société
Tunisienne de Biscuit) s’accapare 60% du marché. La manœuvre d’UTIC est
absolument nécessaire, car le groupe de M. Taoufik Chaîbi n’a pas le
savoir-faire industriel et marketing spécifique nécessaire pour développer
l’entité née de la fusion des deux unités rachetées en 2007 à M. Slaheddine
Chaabane.
Le bras de fer que se livrent les deux groupes dans le biscuit rappelle
celui qui les oppose depuis huit ans déjà dans le domaine de la grande et
hyper-distribution. Force dominante de la grande distribution, avec la
chaîne Monoprix, le groupe Mabrouk –a en effet vu «UTIC» le précéder sur
celui de l’hyper-distribution, avec la création de «Carrefour», en 2001,
avant de venir le «taquiner» sur le créneau des supermarchés, avec le rachat
de la chaîne «Bonprix», en mai 2006.
Mais le roi du biscuit qu’est le groupe Mabrouk n’assistera certainement pas
sans brocher à cette attaque. D’autant qu’il est adossé à un partenaire
encore plus puissant, qui n’est autre que le groupe américain «Kraft Foods»,
devenu son partenaire à la fois dans la SOTUBI et leur joint-venture lancée
en Algérie, depuis qu’il a racheté la branche biscuits de Danone, et, par
conséquent, ses participations dans ces deux sociétés.
Alors que la stratégie du groupe français demeure axée quasi-exclusivement
sur le développement en France, Kraft Foods est une véritable multinationale
dans l’agroalimentaire. Et même si le géant américain tire l’essentiel de
ses revenus du fromage, du café et du chocolat –plus de 36 milliards de
dollars en 2006-, il n’empêche que sa branche biscuits a généré 6,3
milliards de dollars.
Le géant américain, qui réalise 15% de ses revenus en dehors des Etats-Unis
et de l’Union européenne, entend développer son activité dans les marchés
des pays en voie de développement et émergents. C’est pour cette raison que,
après avoir repris la branche biscuits de Danone, il a proposé au groupe
Mabrouk de lui racheter la sienne. Mais ayant essuyé un refus, Kraft s’est
résolu à mener, avec ce groupe, sa stratégie d’expansion dans la région.
Toutefois, la «guerre» du biscuit ne se limite pas à un tête-à-tête entre
les groupes Mabrouk et UTIC. Deux autres acteurs s’y mêlent déjà qui
pourraient prétendre à se tailler une place plus importante dans ce secteur.
Le premier est la «Société Alimentaire du
Sud» (Biscuits Kif) est la deuxième plus importante avec une part de marché
estimée à près de 10%. Le second n’est autre que le groupe émirati IFFCO
qui, il y a près de deux ans, a racheté la société «l’Appétissante». Actif
depuis 1975 et présent également en Egypte, en Malaisie et au Pakistan, ce
groupe a les moyens d’être un outsider assez crédible.