à Novo Ogarevo (Photo : Alexander Nemenov) |
[14/01/2009 15:20:28] MOSCOU (AFP) Aucune issue au conflit entre la Russie et l’Ukraine sur le gaz ne semblait en vue mercredi soir, les deux pays continuant de s’accuser mutuellement de blocage, tandis que les Européens les menaçaient désormais d’actions en justice.
Pourtant, la journée avait commencé avec des déclarations se voulant conciliantes du Premier ministre ukrainien Ioulia Timochenko qui promettait que l’Ukraine reprendrait le transit du gaz par son territoire dès que la Russie le lui ferait à nouveau parvenir.
“Si le gaz est fourni aujourd’hui (mercredi), il sera immédiatement envoyé” vers le Vieux continent, avait en effet assuré Mme Timochenko, se disant prête à rencontrer le chef du gouvernement russe Vladimir Poutine.
Elle venait de s’entretenir à Kiev avec son homologue slovaque Robert Fico, qui s’est ensuite rendu, à l’instar des chefs des gouvernements bulgare Sergueï Stanichev et moldave Zinaïda Grecianii, près de la capitale russe, à Novo Ogarevo, où tous trois ont été reçus par M. Poutine.
Et ce au lendemain de l’échec de la tentative de rétablir les livraisons à destination du Vieux Continent, dont des centaines de milliers d’habitants grelottaient pour la deuxième semaine consécutive en raison du conflit gazier.
ï Stanichev (d) et son homologue slovaque Robert Fico, le 14 janvier 2009 à Moscou (Photo : Yuri Kadobnov) |
“Nos partenaires européens sont véritablement devenus otages de la dispute entre la Russie et l’Ukraine. Aucun pays n’a le droit de prendre d’autres pays en otages, en profitant de son rôle dans le transit”, a déclaré le Premier ministre russe dans une allusion à l’Ukraine.
“Les responsables de la Commission européenne devraient user de leur influence sur l’Ukraine pour assurer l’approvisionnement en gaz”, a ajouté M. Poutine à Novo Ogarevo.
Il a par ailleurs réfuté les arguments de l’Ukraine, qui dit ne pas pouvoir laisser passer le gaz sur son territoire dans le gazoduc choisi par la Russie, sinon l’est et le sud ukrainiens en seraient privés.
“Si, sur un plan politique, le président (ukrainien Viktor) Iouchtchenko prétend qu’il n’a pas bloqué le transit vers l’Europe, dans la pratique on voit bien que c’est le cas”, a commenté M. Poutine.
Les chefs des gouvernements bulgare et slovaque n’ont pas non plus été avares en critiques, tout en se refusant à trancher entre les belligérants.
“La pire chose de mon point de vue est que des millions de citoyens d’Europe se sentent pris en otages et que des centaines de milliers de personnes souffrent vraiment”, s’est emporté le Bulgare Sergueï Stanichev. Le Slovaque Robert Fico a lui aussi dénoncé la “prise en otage” de l’Europe.
ésident de la Commission européenne José Manuel Barroso, le 14 janvier 2009 à Strasbourg (Photo : Patrick Hertzog) |
Les autorités à Kiev ont quant à elles affirmé que Gazprom cherchait à ternir l’image de l’Ukraine en tant que pays de transit fiable, en choisissant un itinéraire “impossible” pour transporter le gaz vers l’Europe.
Dans le même temps, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a haussé le ton, menaçant la Russie et l’Ukraine d’actions en justice des compagnies gazières européennes si les livraisons à l’UE n’étaient pas rétablies de manière “urgente”.
Faute de “volonté politique d’honorer l’accord” auquel elles ont souscrit, la Russie et l’Ukraine “ne pourront plus être considérées comme des partenaires fiables pour la fourniture d’énergie”, a-t-il mis en garde.
Pour l’heure, seule la société gazière hongroise Emfesz a annoncé avoir porté plainte contre la compagnie ukrainienne Naftogaz, la serbe Srbijagas étudiant pour sa part une action en justice également contre l’Ukraine.
La Russie, qui s’inquiète de la volonté européenne de davantage diversifier son approvisionnement, et l’Ukraine, où la “guerre” du gaz exacerbe la crise politique, continuaient parallèlement de se rejeter la responsabilité de l’arrêt de l’approvisionnement en gaz des Européens, le 7 janvier.
“Peu importe qui sera reconnu coupable dans le conflit gazier russo-ukrainien, ses conséquences seront négatives pour Moscou. La révision de la stratégie gazière de l’UE, en vue de moins dépendre de la Russie, est devenue inévitable”, écrivait le journal russe Vedomosti mercredi.
épendance des pays européens vis-à-vis du gaz russe |
D’ores et déjà, Gazprom a perdu 1,1 milliard de dollars de chiffre d’affaires depuis le 1er janvier en raison de la crise avec l’Ukraine, a regretté mercredi le président russe, Dmitri Medvedev.
Le passage du gaz russe via l’Ukraine, à peine relancé mardi matin après une semaine d’interruption, s’était de nouveau arrêté en dépit des efforts intenses fournis par les Européens pour régler le conflit.
En l’absence de contrat, Moscou a coupé l’approvisionnement de l’Ukraine le 1er janvier 2009 et a ensuite accusé Kiev de siphonner le gaz destiné aux Européens, d’où la décision de la Russie d’interrompre toutes ses livraisons de gaz vers l’Europe afin de mettre un terme à ce “vol”.