Le Premier ministre russe Vladimir Poutine et son homologue ukrainienne Ioulia Timochenko le 14 novembre 2008 (Photo : Alexey Nikolsky) |
[15/01/2009 21:18:05] MOSCOU (AFP) De nouvelles négociations sur la crise gazière auront lieu samedi à Moscou entre le Premier ministre Vladimir Poutine et son homologue ukrainienne Ioulia Timochenko, l’UE proposant son assistance, mais rechignant à participer à un véritable “sommet” sur la question.
Au huitième jour d’interruption totale des livraisons de gaz russe à l’Europe via l’Ukraine, les deux voisins campent sur leurs positions.
“Le robinet est toujours fermé”, a accusé le géant russe Gazprom jeudi, affirmant que l’Ukraine continuait d’empêcher le passage sur son territoire du gaz destiné à l’Europe, en dépit de l’accord de surveillance du transit arraché lundi par les Européens.
L’Ukraine est prête à faire transiter le gaz russe vers l’Europe dès que “la totalité des volumes” prévus par les contrats, soit 330 millions de m3, sera fournie par la partie russe, a répliqué le président ukrainien Viktor Iouchtchenko.
Pour sa part, la Russie a proposé aux Européens de mettre sur pied un “consortium international” pour fournir aux Ukrainiens le “gaz technique” dont ils ont besoin afin que le transit du gaz russe reprenne à travers leur territoire. Il s’agirait de “partager le risque du transit”, selon le Premier ministre Vladimir Poutine qui s’en est entretenu avec le président de la compagnie italienne d’hydrocarbures Eni, Paolo Scaroni.
ésident de la compagnie italienne d’hydrocarbures Eni, Paolo Scaroni, le 15 février 2008 à Milan (Photo : Damien Meyer) |
Ce dernier a expliqué que le consortium payerait en avance le +gaz technique+ permettant au gazoduc et aux stations de compression de fonctionner “afin de permettre la reprise des livraisons de gaz vers l’Europe dans l’attente d’un accord entre Moscou et Kiev”. Outre l’Eni, premier opérateur de gaz en Europe, Gaz de France et l’allemand EON y participeraient, selon M. Scaroni.
Le format des négociations russo-ukrainiennes prévues samedi à Moscou faisait encore débat jeudi.
Le président russe Dmitri Medvedev a persévéré dans son intention d’organiser un véritable sommet de chefs d’Etats et de gouvernements. Des “invitations” ont déjà été adressées, selon sa porte-parole.
Mais il s’est heurté à un refus poli des Européens, qui considèrent ne s’être déjà que trop impliqués dans le conflit. L’UE s’est dite tout au plus prête à dépêcher le ministre tchèque de l’Industrie et le commissaire européen à l’Energie à une réunion Russie-Ukraine “de haut niveau”, pour les “aider à trouver un accord durable”.
“Aucune réunion ne doit constituer une excuse pour reporter” la reprise des livraisons, a de plus insisté son porte-parole, exigeant à nouveau leur “reprise immédiate”.
Le ministère français des Affaires étrangères s’est montré encore plus direct, déclarant que les conditions pour la tenue d’un sommet ne seraient “pas réunies”, tant que “les livraisons de gaz, conformément aux engagements de la Russie et de l’Ukraine, n'(auraient) pas repris”.
ésident ukrainien Viktor Iouchtchenko, le 13 janvier 2009 à Kiev (Photo : Mikhailo Markiv) |
M. Iouchtchenko, également convié par Moscou, a répété jeudi qu’il n’entendait y prendre part qu”‘à condition qu’il se déroule sur le territoire européen”.
Si la venue du président ukrainien à Moscou paraissait incertaine, celle de son Premier ministre a été confirmée pour samedi. Mais on ignorait encore les modalités de sa rencontre avec Vladimir Poutine et si elle pourrait éventuellement se fondre dans le “sommet” souhaité par les Russes.
M. Poutine reviendra alors tout juste d’une visite de deux jours en Allemagne, où il s’entretiendra avec la chancelière allemande Angela Merkel.
Celle-ci n’a pas mâché ses mots : “il y a un risque certain que la Russie perde de sa crédibilité du fait des interruptions” dans les livraisons de gaz à l’Europe, a-t-elle affirmé à Berlin.
“Il faudra que j’aborde cette question au cours de mes discussions demain” avec M. Poutine, a-t-elle ajouté.
Lors d’un entretien téléphonique avec son homologue allemand Günter Gloser, le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes Bruno Le Maire a pour sa part souhaité que Moscou et Kiev respectent “leurs obligations respectives”. Les deux ministres sont convenus de rester “en contact étroit” notamment dans la perspective de la rencontre Merkel/Poutine.
Mardi, une tentative de reprendre les livraisons de gaz russe à destination du Vieux Continent s’était soldée par un échec, laissant des centaines de milliers d’Européens grelotter pour la deuxième semaine consécutive.
Depuis quelques jours, des voix s’élèvent aussi pour demander des comptes à la Russie et à l’Ukraine. A Belgrade, la compagnie gazière serbe Srbijagas a ainsi fait savoir qu’elle allait réclamer des “explications” aux sociétés ukrainienne Naftogaz et russe Gazprom.
Lundi, le président de l’exécutif européen José Manuel Barroso avait prévenu que la Commission européenne conseillerait “aux compagnies européennes de porter l’affaire en justice” si la crise perdurait.