RBS s’apprête à payer sa gourmandise par des pertes d’une ampleur inédite

photo_1232377926868-1-1.jpg
à Londres (Photo : Shaun Curry)

[19/01/2009 19:00:01] LONDRES (AFP) Triomphante au moment du rachat d’ABN Amro en 2007, au nez de sa compatriote Barclays, RBS, ex-numéro deux au Royaume-Uni, n’était plus lundi qu’une banque persécutée en Bourse, s’apprêtant à annoncer une perte annuelle de 31 milliards d’euros, sous la colère de son actionnaire à bientôt 70%, le gouvernement britannique.

Royal Bank of Scotland a cédé à la Bourse de Londres 66,57%, exactement les deux tiers de sa valeur, à 11,60 pence, après être tombée jusqu’à 10 pence, soit 40 fois moins qu’un an plus tôt, une chute sans doute accélérée par la reprise depuis vendredi des ventes à découvert sur les valeurs financières au Royaume-Uni.

A un mois de ses résultats annuels, RBS a publié un rapport inquiétant, au moment même où le gouvernement dévoilait son deuxième plan de sauvetage du secteur bancaire en trois mois.

Non seulement ses pertes annuelles atteindront “7 à 8 milliards de livres” (7,7 à 8,8 mds EUR), après 761 millions de pertes nettes au premier semestre, mais RBS a confessé que s’y ajouterait une charge de 15 à 20 autres milliards de livres, liée à la dépréciation de son rachat de la plus grosse partie de la banque néerlandaise ABN Amro en 2007.

Avec cette perte possible de 28 milliards de livres, RBS atteint un record absolu au Royaume-Uni. Le précédent appartenait au groupe de téléphonie Vodafone, qui avait annoncé au printemps 2006 une perte de 14,9 milliards de livres, dont 23,5 milliards de dépréciations liées à l’achat en 2000 de l’Allemand Mannesmann, au plus haut de la bulle des télécommunications. Mais ces pertes comptables étaient partiellement compensées par de solides bénéfices et Vodafone n’en avait pas pâti.

Accusée déjà au début des années 2000 d’une trop grande ambition, se traduisant par des rachats coûteux, RBS avait voulu se montrer raisonnable, en 2005, en se mettant en consortium (avec Merrill Lynch et le milliardaire chinois Li Ka-shing) pour acquérir, comme les autres grandes banques occidentales à l’époque, une part de capital d’une grande banque chinoise, Bank of China.

Mais en 2007, elle n’avait pas résisté à briser le mariage décidé entre ABN Amro et Barclays, sa rivale. Pour 18,5 milliards de livres (27,2 milliards d’euros à l’époque), elle s’était emparée des activités de banque de gros d’ABN Amro et de sa filiale américaine LaSalle, alors que la crise des crédits subprime allait faire des ravages aux Etats-Unis en particulier, et dans la banque de gros en général.

La Belge Fortis et l’Espagnole Santander avaient payé respectivement 24 et 19,9 milliards d’euros pour le reste d’ABN Amro.

Depuis, l’existence de RBS n’est qu’une longue souffrance.

En avril, elle a dû lancer une augmentation de capital de 12 milliards de livres. Ses actionnaires l’ont bien accueillie mais ont boudé une nouvelle augmentation de 25 milliards de livres prévue par le premier plan de sauvetage des banques en octobre. Le gouvernement est du coup devenu le premier actionnaire avec 57,9% du capital de RBS, part qui devrait passer en mars à 70%.

RBS a tenté d’atténuer les dégâts en vendant depuis le printemps quelque onze milliards de livres d’actifs, dont tout récemment sa part de Bank of China. Mais elle n’a pas réussi à céder son activité d’assurance, évaluée à 7 milliards de livres.

Le nouveau directeur général Stephen Hester — les anciens dirigeants ont été débarqués — s’est déclaré “désolé pour les actionnaires” lundi, tout en rappelant en faire partie. Avec le nouveau président Philip Hampton, il a observé que le succès du plan gouvernemental dépendrait des détails encore à publier.

De son côté le Premier ministre Gordon Brown n’a pas mâché ses mots, se disant “très en colère de ce qui s’est passé” chez RBS et des “risques irresponsables” qui y ont été pris, notamment avec le rachat d’ABN Amro, “un investissement international qui était clairement un mauvais investissement”.