Le coût de l’eau en Tunisie : Qu’en est-il au juste?

L’eau, denrée rare, sujet de toutes les convoitises,
considérée de nos jours comme un bien économique et social de première
importance, est au cœur des stratégies de développement durable des pays,
soucieux de bonne gouvernance, de gestion rationnelle de l’acte productif, de
prévention sanitaire et du bien-être de leurs citoyens.

Selon le dernier rapport de la Banque mondiale sur le développement dans la
région MENA, la disponibilité de l’eau par habitant baissera de moitié en 2050
et s’accompagnera de graves conséquences pour les nappes souterraines et les
réseaux hydrographiques naturels, déjà assez limités de la région. Au fur et à
mesure de l’essor des économies et de la pression démographique au sud du Bassin
méditerranéen, la demande de services d’approvisionnement en eau et d’irrigation
dépendra de plus en plus des pratiques coûteuses de désalinisation.

Dans un contexte de crise écologique mondiale, de raréfaction de plus en plus
reconnue sur le plan international, notre pays, doté d’un climat capricieux et
variable, doit, de l’avis des experts, approfondir encore davantage l’analyse
des coûts de production de l’eau, optimiser le rendement des différentes
stations de dessalement et généraliser les systèmes de télégestion qui couvrent
actuellement la totalité de la région du sud-est dont le nombre des abonnés à la
Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (SONEDE) a atteint,
d’après les dernières statistiques, publiées à l’occasion de la célébration du
40ème anniversaire de cette entreprise publique, 190.000 en 2006, assurant ainsi
94% des besoins des gouvernorats de Tataouine, Médenine (district Djerba inclus)
et Gabès.

Peut-on parler d’un prix de revient ? «Avec plus de deux millions de clients,
une nappe phréatique surexploitée et un génie rural ciblant essentiellement les
zones dispersées à l’intérieur du pays, la SONEDE est chargée d’alimenter en eau
potable l’ensemble du territoire national en appréciant non pas le prix de
revient uniquement mais aussi les amortissements et le pourcentage de chaque
composante des dépenses inhérentes aux charges courantes d’exploitation
(solaires, énergies, produits chimiques…)», nous dit Madame Sihem Trimèche Ben
Salah, directrice de la communication et de la coopération internationale à la
SONEDE, qui évoque un coût de revient calculé et vendu en 2006 à 595 millimes/m3,
un chiffre d’affaires annuel provenant essentiellement des ventes d’eau (79%),
des redevances fixes (12%) et de l’exécution des nouveaux branchements et autres
travaux (9%), tout en rappelant le maintien des tarifs spéciaux (140 millimes/m3)
à l’intention des familles modestes dont la consommation ne dépasse pas
généralement 20 m3 par trimestre. Monsieur Kamel Fethi, directeur de la
production à la Société nationale d’exploitation des eaux, a mis l’accent, dans
une étude concernant «les percées technologiques en dessalement et la maîtrise
des coûts», sur l’augmentation perceptible du prix de revient du m3 avec la mise
en service des trois stations de dessalement de Gabès (1996), Zarzis et Djerba
(1999), la nette diminution du taux de couverture qui est passé de 87% en 1994 à
76% en 2006, donnant ainsi toute leur importance aux redevances fixes dont le
rôle, déclare l’auteur du rapport, est de combler le déficit enregistré au fil
des années.

Finalement, d’après les sources du ministère de l’Agriculture et des
Ressources hydrauliques, les tarifs pratiqués au niveau de la SONEDE ont
toujours été différenciés en fonction de l’usage (domestique, touristique, borne
fontaine et industrie) et de la tranche de consommation, ce qui explique la
différence entre le prix de vente moyen d’eau (455 millimes) et le coût de
revient estimé, en 2006, à 595 millimes/m3.