Les différents acteurs de la presse en ligne tunisienne se
souviennent encore de cette fameuse réunion du 2 décembre 2008, avec M. Rafâa
Dekhil, notre ministre de la Communication et des Relations avec la Chambre des
Députés et la Chambre des Conseillers. Un événement retentissant, à la mesure de
l’importance grandissante de nos portails d’informations. C’est que la famille
de nos sites dédiés aux news s’élargit de nouveaux titres, et nos supports en
ligne se mettent à attirer des plumes reconnues de la presse traditionnelle.
Mieux, des nouvelles qui passent presque inaperçues dans leur version imprimée
se retrouvent animées d’une vie nouvelle dès qu’elles passent sur le web. De
quoi intriguer, et même agacer certains. Il n’empêche.
On notera également que le réflexe de notre ministre s’inscrit dans un
mouvement plus large de reconnaissance internationale à l’égard de la presse en
ligne. Parce qu’en somme, les acteurs du web revendiquent les mêmes droits que
leurs confrères de l’imprimé. Mieux : en France, le président Sarkozy a prévenu
: «si la presse ne prend pas le virage d’Internet, elle n’aura aucune réponse à
offrir aux générations natives du numérique».
Une chose est sûre. Pour le coup, les responsables tunisiens, dans leur souci
de se pencher sur le dossier de la presse en ligne, ne sont pas en retard d’une
bataille. Puisque la fameuse réunion avec Rafâa Dekhil, par exemple, a eu lieu
bien avant que le président français ne lance ses petites phrases. Certes, le
projet français était en friche, et les Etats généraux de la presse (française,
NDLR) ont été inaugurés en octobre 2008. Mais tout de même…
Toujours est-il que Sarkozy a parlé d’accorder un nouveau statut, celui
«d’éditeur de presse en ligne» aux portails d’infos. Mais à condition que le
support en question emploie des journalistes professionnels, et seulement si
l’on s’assure du «caractère journalistique du traitement de l’information». Cet
élément n’étant pas facile, vous en conviendrez, à cerner. Nos confrères du
«Monde Informatique» se font même sarcastiques en relevant que «c’est un critère
qui mériterait une exégèse». A moins qu’il ne s’agisse de garder volontairement
le flou sur la question, pour se permettre, disons, une plus grande latitude de
décision. Auquel cas, les éditeurs en ligne, français ou pas, ne sont pas
nécessairement sortis de l’auberge.
L’hebdomadaire «Le Point», lui, sera nettement plus positif, rappelant que
«le statut d’éditeur de presse en ligne ouvrira droit au régime fiscal
avantageux des entreprises de presse» et que Sarkozy «promet également de
renforcer “significativement” l’aide publique à la presse en ligne sous forme
“de subventions et d’avances”». Et c’est là que ça devient intéressant.
Concernant les Tunisiens, par exemple, les subventions en question pourraient
revêtir la forme de la manne publicitaire publique. Des fonds qui font saliver
certains, qui jugent que notre ATCE les distille trop parcimonieusement quand il
s’agit de presse en ligne. Même si dans notre pays, la plupart des acteurs
sérieux du secteur sont «responsables».
Du reste, pour en terminer avec ce chassé-croisé tuniso-français, on notera
que Sarkozy évoquera la mise en place d’un «régime de responsabilité exigeant
adapté à la réalité de la presse en ligne qui se nourrit de la participation des
internautes». Rappelant que «ce n’est pas parce qu’on est sur Internet qu’on
doit être irresponsable».
Reste qu’ici comme là-bas, les propositions ne brillent pas toujours par leur
clarté. Mais ce n’est qu’un début. Et en France comme en Tunisie, plus que
jamais, la voie de la presse passe par le web.