écembre 2008 à l’Hôtel Matignon à Paris (Photo : Lionel Bonaventure) |
[19/02/2009 17:06:45] PARIS (AFP) La France s’est étonnée jeudi de la mise en garde de Bruxelles sur ses déficits, jugée inopportune au moment où la crise impose de dépenser plus, et a d’ores et déjà prévenu qu’elle allait les réviser à la hausse.
La Commission européenne a enclenché mercredi des procédures pour déficits excessifs contre six pays, dont la France, où le déficit public (Etat, collectivités locales et comptes sociaux) devrait avoir atteint 3,2% en 2008, soit plus que la limite de 3% du produit intérieur brut (PIB) autorisée.
Bruxelles devra bientôt préciser combien de temps elle donne aux pays épinglés pour revenir dans les clous, mais a déjà averti la France et l’Espagne que des efforts étaient attendus dès l’année prochaine, tout en brandissant la menace de sanctions financières.
Une mise en garde que le ministre du Budget Eric Woerth a trouvé jeudi “un peu gonflée”: “à la fois Bruxelles nous dit +il faut que les Etats européens combattent la crise et augmentent leurs dépenses publiques+ (…) puis de l’autre, +attention vous allez dépasser les déficits qui étaient prévus+”.
Début décembre, la Commission européenne avait en effet pressé les dirigeants de l’Union européenne d’accepter un plan de relance de 1,5% du PIB européen.
Bruxelles “est dans son rôle”, mais “la priorité est le redémarrage des circuits de financement et de l’économie”, plaide-t-on à Bercy.
“La Commission européenne, il y a un mois et demi, nous a tous demandé de faire de la dépense publique, parce que la dépense publique et l’investissement public sont le meilleur levier pour relancer nos économies”, a rappelé jeudi la ministre de l’Economie Christine Lagarde.
Début décembre, en présentant son plan de 26 milliards d’euros, le gouvernement français avait prévenu qu’il se réaliserait au prix d’une envolée des déficits.
La France va réviser ses prévisions début mars, mais a d’ores et déjà avisé Bruxelles que son déficit public dépasserait 4,4% du PIB en 2009.
“Quand il y a un incendie, on ne chipote pas sur le montant de la facture d’eau”, estime le président de la commission des Finances du Sénat Jean Arthuis (Union Centriste). “Mais avant ce plan, le déficit français dépassait déjà la limite autorisée par Bruxelles”, rappelle-t-il.
“La mise en garde de la Commission est totalement injustifiée en période de récession économique”, juge également Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE. “Elle se venge du fait que la France a, par le passé, pris des engagements pour réduire ses déficit sans jamais les tenir”, ajoute-t-il.
Les mesures sociales annoncées mercredi par Nicolas Sarkozy, dont le coût est estimé à 2,6 milliards d’euros, pèseront encore un peu plus sur ces déficits, mais à hauteur de 0,06% du PIB seulement, indique-t-on au ministère du Budget.
Dans le détail, elles seront financées pour environ 1,5 milliard d’euros grâce aux intérêts des prêts accordés par l’Etat aux banques et au secteur automobile, et le reste par le budget de l’Etat ou la Sécurité sociale.
Le plan de 7,8 milliards d’euros de soutien au secteur automobile annoncé début février, dont le financement reste à définir, pourrait aussi contribuer à alourdir le déficit.
Mais c’est surtout la baisse du PIB, attendu en recul “d’au moins 1%” en 2009, qui devrait l’aggraver. “1% de PIB de croissance en moins équivaut à 0,5% de PIB de déficit en plus”, du fait de moindres recettes fiscales, souligne-t-on dans l’entourage d’Eric Woerth.