[19/02/2009 20:50:27] NEW YORK (AFP)
à Zurich (Photo : Nicholas Ratzenboeck) |
L’affrontement sur le secret bancaire et l’évasion fiscale opposant la banque suisse UBS à la justice américaine a rebondi jeudi, moins de 24 heures après un accord amiable, avec de nouvelles poursuites de Washington pour en savoir plus sur 52.000 comptes secrets.
Le ministère de la Justice américain a annoncé qu’il avait porté plainte au civil devant un juge fédéral de Miami (Floride, sud-est) pour exiger qu’UBS livre des informations sur 52.000 comptes secrets identifiés par le fisc comme appartenant à des Américains, qui recèleraient près de 15 milliards de dollars d’actifs.
UBS a aussitôt fait savoir qu’elle se battrait en justice pour refuser cette demande qui remet en cause le principe même du secret bancaire à la suisse.
Cette affaire relance en effet le débat sur cette pierre angulaire de la finance helvétique: l’Union européenne a réclamé jeudi que la Suisse traite les demandes européennes de levée du secret bancaire de la même façon que celles de Washington.
La nouvelle plainte des autorités américaines a saisi de court UBS et tous les observateurs, au lendemain de l’annonce d’un accord au pénal entre la banque et Washington.
UBS a en effet accepté mercredi de payer 780 millions de dollars pour solder une affaire d’évasion fiscale, et s’est engagée à livrer les identités des clients qu’elle avait aidés à échapper illégalement au fisc.
La nouvelle exigence du fisc “concerne des informations concernant un nombre substantiel de comptes secrets détenus par des Américains chez UBS en Suisse, dont les informations sont protégées par la législation suisse”, a fait valoir la banque jeudi.
à New York le 19 février 2009 (Photo : Timothy A. Clary) |
Le ministre suisse des Finances Hans-Rudolf Merz avait annoncé un peu plus tôt qu’UBS transmettrait des informations sur 250 à 300 clients américains de la banque, en assurant que “le secret bancaire reste intact”.
L’affaire inquiète en effet beaucoup en Suisse, où le secteur bancaire a fondé sa puissance sur sa discrétion.
Un cabinet d’avocats zurichois a ainsi annoncé qu’il allait porter plainte pour violation du secret bancaire contre le gendarme suisse des marchés financiers, la Finma, au nom de quatre clients américains d’UBS.
Les accusations de fraude fiscale contre UBS aux Etats-Unis auraient pu menacer l'”existence” même de la banque, s’est justifiée la Finma.
L’association suisse des banquiers (ASB) a “regretté” de son côté que le ministère de la Justice américain “n’ait pas respecté la voie judiciaire”, préférant couper court à la procédure d’entraide engagée par les Etats-Unis auprès des autorités suisses.
En fait, le fisc américain estime que la procédure régulière n’avait aucune chance de lui permettre de mettre la main sur les ressortissants américains ayant failli à leur obligation de déclarer leurs revenus: les autorités suisses ne coopèreraient qu’en cas de fraude ou de faux directs, ce qui concernerait quelque 300 cas.
Cette affaire d’évasion fiscale avait conduit à l’inculpation en novembre du responsable du département étranger de la banque suisse, Raoul Weil. En juin 2008, un ancien banquier d’UBS, Bradley Birkenfeld, avait plaidé coupable. Il doit repasser devant la justice le 1er juin prochain.
UBS avait décidé en juillet de mettre un terme à son activité transfrontalière, qui selon les autorités américaines voyait “des banquiers suisses faire régulièrement le voyage aux Etats-Unis pour promouvoir le sceau du secret propre aux banques suisses auprès de clients américains intéressés par la dissimulation de revenus au fisc”.
La nouvelle plainte portée par la justice américaine est un coup dur pour UBS, dont le cours avait bondi de 4,67% jeudi à la Bourse de Zurich jeudi – lorsque l’accord de mercredi était encore perçu comme un moyen lui permettant de tourner la page et de rétablir son image.
Un porte-parole du ministère à Washington a indiqué que la procédure pourrait durer des mois, jusqu’à deux ans.