[20/02/2009 23:43:25] ZURICH (AFP)
à Zurich (Photo : Nicholas Ratzenboeck) |
La colère est montée d’un cran vendredi en Suisse contre les Etats-Unis accusés de s’attaquer au secret bancaire, mais aussi contre UBS, qui a contribué à affaiblir la place financière suisse par ses démêlés judiciaires, ont estimé la classe politique et la presse.
“Quand un accord est conclu, on l’honore, je ne comprends pas” la nouvelle plainte des autorités américaines contre la première banque du pays, a estimé le vice-président du Parti démocrate-chrétien (PDC, centre-droit) Dominique de Buman.
“Ce comportement de puissance est inacceptable”, a-t-il poursuivi dans un entretien avec l’AFP, ajoutant qu’avec cette nouvelle demande Washington “nous tire dans le dos”.
L’affrontement opposant UBS à la justice américaine a rebondi jeudi avec de nouvelles poursuites de Washington, moins de 24 heures après un accord à l’amiable prévoyant le paiement par la banque de 780 millions de dollars (617,9 millions d’euros) pour solder une première affaire de fraude fiscale.
Le ministère américain de la Justice a annoncé qu’il avait porté plainte pour exiger qu’UBS livre des informations sur 52.000 comptes secrets identifiés par le fisc comme appartenant à des Américains, qui recèleraient près de 15 milliards de dollars d’actifs.
Cette nouvelle étape démontre “l’exercice de la politique de puissance” des Etats-Unis, a indiqué le porte-parole du Parti socialiste (PS), critiquant au passage le gouvernement suisse “qui s’est quasiment fait complice en donnant trop rapidement suite” aux demandes de Washington.
La presse helvétique a également vivement réagi, le journal 24 Heures évoquant des “méthodes de gangster”. “Certains de leur bon droit, les Etats-Unis iront jusqu’au bout de leur politique de puissance”, a affirmé le quotidien.
La Suisse fait une distinction entre l’évasion fiscale, qui n’est pas interdite, et la fraude. Dans ce dernier cas, les autorités divulguent les informations bancaires normalement protégées par le secret bancaire en vigueur dans la Confédération.
“Il existe en Suisse des procédures légales qui devraient être respectées”, a souligné le porte-parole de l’Association suisse des banquiers, ajoutant que ces procédures ont été “aplaties”.
“On doit se poser la question de savoir si la distinction opérée en Suisse (entre fraude et évasion) peut vraiment tenir à long terme”, s’est cependant interrogé M. de Buman.
La colère monte aussi contre UBS, d’autant plus que l’établissement a bénéficié d’un plan de sauvetage initialement fixé à 60 milliards de dollars pour la sauver de la crise des “subprime”.
Pour le quotidien Le Matin, “La Suisse est prise en otage. Nos impôts ont servi à payer les bonus de la banque et, maintenant, ils seront utilisés pour payer l’amende de 720 millions de dollars”… “Nous avons déjà payé la rançon”, grince le journal en lâchant: “On n’en peut plus d’UBS”.
La banque “a commis des erreurs et il est impossible que la direction n’ait pas été au courant”, relève le PS.
UBS, qui a subi une perte annuelle de 19,7 milliards de francs suisses, lutte pour redorer son image et contre l’érosion de son capital de confiance.
A la Bourse suisse, le titre a plongé à son plus bas historique, avec une baisse de 14,30% à 10,97 francs suisses en milieu de séance.
Les démêlés judiciaires sont “le moindre des problèmes en comparaison des difficultés sur les marchés”, a noté l’analyste Rainer Skierka, de la banque Sarasin, ajoutant cependant que l’afflux de nouveaux capitaux pourrait souffrir de cette affaire.