à Pointe-à-Pitre, le 20 février 2009 (Photo : Lionel Bonaventure) |
[21/02/2009 08:40:58] POINTE-A-PITRE (AFP) Les chefs d’entreprise guadeloupéens, dont certains se disent exsangues à cause de la grève générale, s’inquiètent aussi de leur devenir s’ils devaient augmenter les salaires, même avec une compensation partielle de l’Etat.
Un commerçant du port de la Marina, qui se plaint comme d’autres d’avoir été contraint de fermer par le collectif LKP qui mène la mobilisation, va “devoir” licencier son seul employé.
Aucun secteur n’est épargné. Ainsi à la radio RCI, qui se revendique première radio de Guadeloupe loin devant sa concurrente RFO, les recettes de la régie publicitaire sont égales à zéro depuis un mois.
“Si le mouvement se poursuit au-delà de février, les huit employés se retrouveront au chômage technique”, explique le rédacteur en chef adjoint Richard Garnier. Quant à un coup de pouce salarial, il risque selon lui, de “menacer l’équilibre financier” de l’entreprise, prospère jusque là.
Colette Koury, présidente de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de l’île pousse un cri d’alarme pour l’ensemble des très petites entreprises (TPE) de moins de 20 salariés, soit 45.000 emplois au total. “12.000 emplois vont disparaître dans les TPE à cause du blocage”, assure-t-elle.
Et pour celles qui vont résister, déjà touchées par la crise économique mondiale, la part de l’augmentation des salaires qui leur incombera pourrait être fatale, pronostique Mme Koury. Concentrant une très grande part des salaires, elles sont en effet en première ligne pour le bonus de presque 200 euros que l’Etat veut mettre en place.
“La problématique de bas salaires reste donc entière”, analyse Willy Angèle qui est à la tête du Medef pour qui 97% des entreprises guadeloupéennes ont aujourd’hui moins de 20 salariés.
évrier 2009 à Pointe-à-Pitre (Photo : Lionel Bonaventure) |
Selon la CCI, il faut faire du sur-mesure, entreprise par entreprise, sinon des pans entiers de l’économie risquent d’en pâtir. Le collectif contre l’exploitation outrancière que conduit Elie Domota réclame une plus juste répartition des richesses. Mais même pour les entreprises aux reins solides, l’effort semble, à les entendre, des plus risqués.
Alix Huygues-Beaufond, guadeloupéenne d’origine, dirige 35 personnes dans deux sociétés, une de formation, l’autre spécialisée dans la sécurité.
Depuis deux semaines, son activité de formation est à l’arrêt faute d’élèves. Elle espère cependant pouvoir rattraper son manque à gagner en reportant certaines sessions. Ce sera plus compliqué dans son autre activité.
Mais dans les deux cas de figure, elle ne voit pas comment elle pourrait consentir une augmentation. “Dans la formation, explique-t-elle, mon principal client c’est l’Etat. J’ai négocié avec lui trois ans de contrat à un certain tarif. Acceptera-t-il de le revoir?”, s’interroge-t-elle.
Quant au long terme, elle craint pour sa compétitivité si elle doit répercuter la hausse sur ses prix. Par anticipation, elle a déjà décidé de ne pas reconduire deux jeunes en CDD.
De toute façon, la question ne se posera plus si jamais la grève continue la semaine prochaine. “Je serai alors obligée de mettre tout le monde au chômage technique”, explique Mme Huygues-Beaufond qui a mis près deux heures pour rejoindre son travail vendredi matin en raison des barrages.