La Commission nationale à l’énergie atomique (CNEA) s’est
réunie mercredi 25 février à Tunis. Une réunion à laquelle se sont joints des
responsables de la STEG, ainsi que des responsables des «structures nationales
concernées», sous la houlette de notre ministre de l’Enseignement supérieur, de
la Recherche scientifique et de la Technologie, M. Lazhar Bououni. Il a ainsi
été question des compétences à former, des mesures de sécurités à prendre, dans
le cadre de la coopération avec l’Agence internationale de l’énergie atomique
(AIEA), en vue de la mise en route de la centrale électronucléaire. Un projet
censé voir le jour, dans notre pays, à l’horizon 2020. Le contexte général, plus
précisément la baisse des cours pétroliers, n’est pas vraiment de nature à
accélérer les événements. On aura du reste remarqué que la dégringolade du brut
a même été répercutée sur le prix à la station d’essence, pour le plus grand
bonheur des automobilistes tunisiens. Il n’empêche. Au niveau international en
général, et dans notre environnement arabe et maghrébin en particulier, quelques
pays tentent tout de même de parer à toute éventualité, en misant sur le
nucléaire. C’est ainsi le cas de l’Algérie, pourtant richement dotée en
hydrocarbures.
«Vers 2020, l’Algérie aura probablement sa première centrale nucléaire et
nous aurons une centrale tous les cinq ans après», a déclaré le ministre
algérien de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, à la radio algérienne, le 24
février dernier. On notera pourtant que l’Algérie dispose déjà de deux réacteurs
expérimentaux : l’un de trois mégawatts à Draria, dans la banlieue sud d’Alger,
construit en coopération avec l’Argentine et un autre de 15 mégawatts de
technologie chinoise, à Aïn Oussera, du côté de Djelfa (270 km au sud d’Alger).
Dans le phosphate marocain… et jordanien
Plus discrètement, nos frères marocains avancent aussi à pas mesurés sur la
voie du nucléaire. Avec une particularité de nature à intéresser les
responsables tunisiens : le Maroc compte sur ses gisements de phosphate. En
2007, lors du voyage de Nicolas Sarkozy au Maroc, la présidente du Directoire d’Areva
a signé avec le directeur général de l’Office chérifien des phosphates (OCP) une
déclaration d’intention qui porte sur «l’extraction de l’uranium contenu dans
l’acide phosphorique, fabriqué à partir des minerais de phosphates marocains».
Et pour cause. Selon l’AIEA, la quantité d’uranium que l’on pourrait extraire
des gisements de phosphates du Maroc avoisineraient les 6 millions de tonnes.
Soit «deux fois plus que les ressources mondiales connues des gisements
d’uranium».
Mêmes soucis du côté de la Jordanie. Le Royaume Hachémite importe
actuellement à hauteur de 96% pour faire face à ses besoins en énergie Près de
20% de son PIB est ainsi dépensé en énergie. Or voici qu’aux dernières
nouvelles, les quelques 1,2 milliard de tonnes de phosphate qu’il a en réserve
pourraient receler 130.000 tonnes d’uranium. Le géant minier anglo-australien
Rio Tinto a été chargé de son extraction. Un contrat a été signé en ce sens, le
23 février. Soit quelques mois à peine après la signature d’un protocole
d’accord entre la Commission jordanienne de l’énergie atomique (JAEC), l’Atomic
Energy of Canada Limited ( AECL) et la SNC-Lavalin International, l’un des tout
premiers spécialistes du nucléaire mondial et qui… maîtrise (réellement)
l’extraction de l’uranium à partir du phosphate. La SNC-Lavalin était d’ailleurs
bien présente dans notre pays en février dernier pour faire la promotion de sa
solution.
Faut-il rappeler encore une fois que la Tunisie produit 8 millions de tonnes
de phosphate marchand, ce qui la place au au 5ème rang mondial des pays
producteurs. Notre pays est en deuxième position parmi les Etats qui valorisent
le plus ce précieux minerai. 85% de notre production sont ainsi valorisés. Rien
qu’à l’usine de la Skhira, on produit ainsi plus de 375.000 tonnes d’acide
phosphorique par an.
Tout dernièrement, le Groupe chimique tunisien (GCT) de Gabès a annoncé la
mise en chantier de plusieurs projets d’ici 2011. Dont un projet d’unité de
production d’acide phosphorique d’une capacité de 400 tonnes par jour. Or
l’uranium peut aussi être récupéré à partir de l’acide phosphorique. Le
phosphate tunisien n’a donc pas encore révélé tous ses secrets.