Quand un ensemble régional s’engage dans une dynamique d’intégration, les
administrations publiques sont elles-mêmes touchées par cette grâce. En
réalité, leur enthousiasme et leur profonde connaissance des dossiers, font
que les atomes accrochent. Il arrive qu’elles coalisent se constituant en
pool virtuel, qui donne beaucoup d’inspiration et d’allant aux
gouvernements. Et cela fait avancer les affaires. C’est en substance le
message de Charles Ferdinand Notomb, ministre d’Etat belge, grande figure de
la scène politique de Belgique et de l’UE, grand ami de la Tunisie. Invité
par la commission méditerranée présidée par Fatma Ben Soltane l’homme d’Etat
belge a été « honor guest » de l’association des anciens élèves de l’ENA
lors de son dîner débat mensuel ce vendredi 27 février, qui a été rehaussé
par la présence de Taoufik Baccar, Gouverneur de la BCT et président de
l’Association. Le ministre d’Etat souhaitait voir les pays du Maghreb
s’engager dans cette voix pour faire avancer l’édification de l’UMA. En se
donnant une masse critique à leur ensemble régional, les administrations
publiques du Sud gagneraient en standing. Elles se présenteraient en ordre
groupé créant le contexte d’un rapprochement avec les administrations
publiques d’Europe. De la sorte elles reproduiraient le climat de synergie
qui a beaucoup servi l’intégration européenne. Compte tenu de cette
prédisposition à coopérer est-ce que ce schéma de confraternité peut déjà
être mis en application entre l’administration de l’Europe et celle de
Tunisie, se demandent les invités, pour la plupart en poste dans la haute
administration tunisienne ? la question est habile et d’actualité.
Administration : la clé
Charles Ferdinand Notomb s’adosse à sa propre expérience et ses hauts états
de service au sein de l’administration publique belge et communautaire.
C’est l’administration qui a servi d’alibi aux gouvernements pour vaincre
les résistances des opinions nationales face aux choix qui ont fait avancer
la question de l’intégration européenne. Le renoncement aux frontières
nationales, l’harmonisation des normes et plus tard la monnaie unique, sont
autant de choix qui ont rencontré bien des entraves. Et c’est le socle
administratif communautaire, qui a servi d’alibi aux gouvernements pour
venir à bout du scepticisme des opinions. Bien entendu les grands choix
avaient pour eux d’être cohérents et l’appui de l’administration les lavait
de cette suspicion d’être des paris fous. Bien sûr pour y parvenir les
administrations nationales ont fait preuve d’une intelligence de
comportement sur terrain qui était éclairante. Elles continuaient à
dialoguer en dépit de l’existence des litiges. C’est notamment le cas de
l’Espagne et de l’Angleterre. Le conflit sur Gibraltar, même s’il les
divise, ne les a pas éloignés. Ils continuent de dialoguer sur tout. Et
c’est cette attitude que l’invité belge voudrait voir s’instaurer dans les
rapports entre les administrations maghrébines pour booster la construction
de l’UMA en dépit de la persistance du conflit du Sahara occidental entre
l’Algérie et le Maroc. En échos à cette suggestion le gouverneur de la BCT,
évoquera en termes « footballistiques », c’est à dire d’esprit fair-play,
les contingences qui contrarient la construction maghrébine. Il rappellera
une suggestion du DG du FMI, similaire à celle avancée par son l’hôte belge.
Le DG du FMI recommandait de « traiter les questions économiques comme s’il
n’existait pas de problèmes politiques et inversement ». Mais, relèvera avec
beaucoup de dépit M. Taoufik Baccar, tous les schémas tactiques destinés à
déverrouiller le blocage de la situation n’ont pas abouti. Bien embusqués,
d’autres intervenants ont proposé au conférencier de les aider à réfléchir à
la perspective de créer un précédent positif en tentant de mieux faire
performer les relations entre les deux administrations tunisienne et
européenne. Voilà croient-ils un objectif mesuré, concret et à portée.
Les difficultés du dialogue entre administrations des deux rives
Malgré l’asymétrie entre les deux entités administratives, les responsables
dans l’administration tunisienne plaident pour une meilleure qualité
d’écoute de la part de leurs homologues européens. La rive nord reste assez
austère dans ses contacts et parfois un peu hautaine. Plus de concertation
servirait l’intérêt bien compris des deux parties. La rigidité, et parfois
l’hermétisme peuvent être dépassés si le partenaire privilégié et dominant
s’oblige à une autre écoute. Chedly Srarfi, SG de l’Association, évoquera
l’obstination administrative parfois sans raison. Le refus de visa pour un
groupe de lauréats à l’occasion d’un voyage d’étude dans un pays européen,
muni d’un passeport collectif . Cette disposition disait-il empêchait toute
défection pour tous les membres du groupe. Sans papiers individuels aucun ne
pouvait se risquer à séjourner clandestinement en Europe. Kheireddine Ben
Soltane parlera du manque de concertation entre les deux bords à l’occasion
de l’harmonisation des textes légaux. Que l’on doive s’harmoniser avec les
textes communautaires dans le cas des échanges économiques et commerciaux ne
fait pas de doute. Mais cela gagnerait à se réaliser dans un cadre d’entente
mutuelle. Il y a un apport de valeur ajoutée qui est ainsi sacrifié
déplorent les intervenants.
Une démarche recevable
Charles Ferdinand Notom, a été sensible à cet appel à manifestation
d’intérêt et en toute vraisemblance il saura trouver les commutations
adéquates pour véhiculer le message. La démarche est recevable mais le tout
est qu’elle soit suivie d’effet ? Ce n’est pas une bouteille à la mer car le
messager est convaincu de son utilité et de son opportunité.
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