Un homme surfe sur internet (Photo : Kazuhiro Nogi) |
[12/03/2009 14:33:40] TOKYO (AFP) Les ventes de disques ont fortement reculé au Japon depuis dix ans mais le secteur résiste grâce à l’augmentation des téléchargements légaux, les Japonais reconnaissant visiblement que la création a un prix qu’ils acceptent de payer.
Selon l’association des maisons de disques japonaises (Riaj), sur la décennie passée (1998-2008), les achats de CD, DVD musicaux, vinyles et autres supports physiques sonores ont chuté de 36% en nombre d’exemplaires et de 40% en valeur.
Cependant, inversement, les téléchargements sur platesformes légales d’extraits, de titres à l’unité et d’albums complets gonflent, amortissant la chute des revenus musicaux à -25% en dix ans, contre -53,5% en France en six ans.
“Le montant tiré des ventes en ligne (720 millions d’euros en 2008 au Japon) représente désormais 20% du chiffre d’affaires du secteur”, assure un porte-parole de l’association, Masaki Suenaga. Un part deux fois plus élevée et un montant dix fois supérieur à ceux relevés en France, où les pirates sévissent en nombre.
Le marché du téléchargement légal a réellement décollé, se félicitent les éditeurs nippons. Un succès qu’ils attribuent à deux facteurs majeurs: l’usage massif des téléphones portables et la dissuasion face aux pratiques illicites.
“Le marché japonais se distingue par le fait que plus de 90% des téléchargements de musique sont effectués depuis les mobiles qui servent de baladeurs”, souligne M. Suenaga.
Sur les platesformes de services pour portables, la plupart des sites officiels — ceux listés par l’opérateur — sont payants, soit sur abonnement mensuel, soit à chaque achat.
Méfiants à l’égard des pourvoyeurs d’offres à “0 yen”, et précautionneux vis-à-vis des logiciels de partage de fichiers, charrettes à virus et autres risques, les Nippons ne voient pas dans le paiement d’oeuvres en ligne une anomalie, mais un gage de sécurité.
Selon une récente enquête conduite par l’opérateur cellulaire NTT Docomo, les Japonais préfèrent les informations payantes émanant de professionnels renommés aux sites mobiles lambda gratuits.
Même chose pour les contenus musicaux: si un tiers des Japonais, surtout les adolescents, avouent recourir parfois à des sites mobiles illégaux (faute de trouver la version autorisée du titre recherché, arguent-ils alors le plus souvent), la fréquence d’utilisation reste faible. Fin 2008, elle était d’une chanson par mois (ou même moins) pour 72% de la minorité de personnes s’adonnant à cette pratique “qui leur donne mauvaise conscience”.
Au Japon, internet fixe et mobile confondus, “pour un titre intégral ou une mélodie téléchargés légalement, un peu plus d’un autre est piraté” indique M. Suenaga. En France, le rapport est de 1 titre légal pour 20 piratés, donc la fraude en proportion est vingt fois plus importante.
Il n’empêche, au Japon aussi, “la lutte contre le piratage et la pédagogie sont absolument nécessaires”, insiste M. Suenaga.
La législation japonaise, qui inflige de fortes amendes et même des peines de prison en cas de diffusion de musique sans accord des ayant-droits, doit être modifiée prochainement pour bannir aussi les téléchargements illégaux sur mobiles.
Par ailleurs, les maisons de disques nippones, qui autorisent la location de CD dans 3.000 boutiques spécialisées, innovent pour que le téléchargement ne soit pas qu’un substitut mais aussi un vecteur d’achat de disques.
CD ou DVD avec enregistrement de qualité supérieure, morceaux inédits, jaquettes et livrets ultrasoignés, babiole-cadeau, programmes de fidélité sont autant de façons d’interpeller les mélomanes japonais qui affectionnent les beaux objets et aiment les offrir.