Maghreb économique : L’UME sermonne l’UMA

Une conférence de presse, présidée par Hédi Djilani, président
de l’Union maghrébine des employeurs a été organisée mercredi au siège de
l’UTICA à l’occasion du premier Forum des Hommes d’Affaires maghrébins. Rabah
Boussebha, secrétaire général de l’Union maghrébine des employeurs, s’est montré
très optimiste quant au succès de cette première initiative pour réunir les
patronats maghrébins dans un même espace et autour d’une même vision à propos du
développement économique de la région.

hedi-djilani-ume1.jpgL’énergie
du désespoir ou plutôt celle de tous les espoirs. Positivons, soyons
optimistes. «Dans un voyage, le plus long est de franchir le seuil»,
franchissons le pas. Peut-être, «arriverions-nous avec tous nos “peu” à
faire beaucoup». Peut-être que ces gouvernants, embourbés tous dans leurs
querelles politiciennes, finiront par être plus sensibles au chômage des
jeunes diplômés, à la fragilité des économies, à leur dépendance et au poids
des tous puissants dans le Nord desquels dépend le bilan de santé du Sud.
Peut-être que ceux qui ouvrent et ferment les frontières pour des raisons de
souveraineté accorderont-ils plus d’importance à une autre souveraineté, la
souveraineté économique de laquelle dépendent toutes les souverainetés au
monde. Peut-être qu’ils finiront enfin par poser un regard clément sur tous
ces jeunes désespérés parce que sans travail, sans vies, sans dignité et que
c’est le rôle de «ouli el amri minkom» (ceux qui sont responsables de vous)
de garantir leur dignité et d’assurer leur bien-être. Procurer l’emploi,
c’est également préserver les équilibres sociaux et protéger les jeunes de
se jeter tête baissée dans la débauche, la criminalité ou l’extrémisme.

Et l’on se pose des questions sur les raisons de l’extrémisme dans nos
chers pays. On oublie bien souvent que l’oisiveté est mère de tous les
vices…

2% en plus de croissance dans nos pays, c’est 200.000 emplois pour les
jeunes maghrébins, on ne le répétera jamais assez. Près de 800 hommes
d’affaires maghrébins le crieront un peu plus fort à Alger ce printemps à
l’occasion du premier Forum des hommes d’affaires qui s’y tient les 10 et 11
mai. Ces hommes d’affaires qui, en l’absence du politique, estiment que
c’est à l’économique de prendre le pas. Même si cette équation qui paraît
tellement évidente à l’échelle planétaire perd de sa teneur et de sa valeur
dans les pays arabes.

«En guise d’Euromed, il n’y a que “l’Euro”, le “Med” n’existe pas»

Le premier Forum des hommes d’affaires maghrébins vise le renforcement du
tissu entrepreneurial maghrébin et se veut une occasion pour permettre aux
opérateurs privés de mieux se connaître et s’apprécier et d’œuvrer ensemble
à consolider les échanges économiques et commerciaux. Echanges qui ne
dépassent pas les 2,9%. Plus de 66% avec l’Europe. La manne ! «Nous sommes
très loin de niveau de performance dicté par la situation économique
actuelle, le Fonds monétaire international s’attend à une moyenne de 8% de
taux de croissance au Maghreb, ce qui n’est pas le cas à ce jour», clame
Rabeh Boussebha.

Un taux de croissance que les cinq pays n’atteindront que grâce à la mise
en place de mécanismes efficients comprenant des procédures de facilitation
sur le plan réglementaire et procédural de la libre circulation des
personnes et des marchandises.

En fait, procédures, lois et réglementations ont déjà été mises en place
pour dynamiser les échanges. Sur les plans réglementaire et législatif,
point de problème. Là où le bas blesse, c’est au niveau de l’application :
«Ce premier Forum représentera une occasion idéale pour que l’UME appelle l’UMA
à appliquer les accords mis en place depuis des années et qui sont restés
pour la plupart lettre morte à ce jour», assure Hédi Djilani, président de
l’UME. Qui ajoute qu’il ne faut pas compter sur l’Europe pour booster la
construction du Maghreb économique et que c’est aux Maghrébins eux-mêmes
d’édifier leur propre entité économique. Déjà que de l’Euromed, il ne reste
que «l’Euro», le «Med» reste encore à la traîne.

En attendant, c’est la contrebande et les marchés parallèles qui
profitent de ce manque de coordination entre pays limitrophes et de ce grand
marché économique de 100 millions d’habitants. La part du marché parallèle
en Tunisie est de 10 à 15%; en Algérie, c’est pire. Faire comme si cela
n’existait pas pour des raisons d’ordre social reviendrait à pénaliser
l’économie formelle qui ne pourrait pas résister longtemps à cette
concurrence déloyale.

Le Forum représentera une occasion pour discuter des difficultés des
économies maghrébines, il offrira également l’opportunité aux participants
de proposer des solutions concrètes pour consolider les échanges entre les
différents pays. A ce jour, près de 1.100 entreprises tunisiennes sont
implantées en Algérie pour 36 entreprises algériennes installées en Tunisie,
la différence est de taille.

Une étude effectuée par les experts de l’UME a défini un ensemble de
projets réalisables dans nos pays et qui touchent aux secteurs de la
construction navale, les industries chimiques, le transport maritime, les
industries pharmaceutiques, les énergies renouvelables, les industries
mécaniques et autres. A l’ordre du jour, il y aura également des
propositions pour la création de consortiums maghrébins au niveau de
certaines activités et aussi des moyens à mettre en œuvre pour susciter une
dynamique incitative aux investissements.

Le Forum abordera des thématiques se rapportant à la crise financière
internationale et ses répercussions sur le Maghreb, l’intégration économique
maghrébine entre obstacles et ambitions, les PME, le tourisme et les
fortunes maghrébines et autres.

«Il est surprenant que l’Algérie produise des engins agricoles très
performants et à prix très abordables et que dans nos pays on se rende en
Europe ou aux Etats-Unis pour en acquérir», s’est exclamé Hédi Djilani.

Ce qui est encore plus surprenant, c’est que nous nous connaissons
tellement mal que nous accordons notre confiance beaucoup plus aisément à
quelqu’un qui vient du Nord qu’à celui qui habite à côté. Appréhension,
scepticisme, préjugés et ignorance, tant des lois que des personnes,
représentent autant de mûrs à abattre que ceux que ne cessent de construire
certains politiciens bien «avisés», paraît-il.

Bien du courage à l’UME.