A l’ombre de la crise financière internationale, une
véritable chasse aux paradis fiscaux, «refuges, proclament les argentiers du
G20, à des fonds spéculatifs, trusts, fondations et autres sociétés écrans,
symboles d’un capitalisme dévoyé», une razzia anti riches, comme elle se nomme
outre-Rhin ou dans l’Hexagone, est lancée dans le Vieux continent avec son
cortège de menaces, de manipulations, d’intimidations et de coups fourrés de la
part des différentes officines de renseignement, toujours prêtes à se
positionner dans les querelles interétatiques, à jeter de l’huile sur le feu de
la discorde parmi la classe possédante et à raviver, lorsque le besoin se fait
sentir, le brasier des dossiers des puissants nantis, quelques fois objet de
surenchères et de divisions au niveau des establishments politiques au pouvoir.
C’est Berlin, soutenue par ses pairs européens et à leur tête Paris, qui a
ouvert la première brèche dans les havres fiscaux, en obtenant, grâce à ses
puissants services d’investigation dont la prouesse était tout de même
l’exfiltration d’un haut cadre bancaire local du Liechtenstein, transformé, à
l’occasion, en un précieux délateur, une liste de fortunés allemands, fuyant la
lourde taxation de leur pays, repliés dans la principauté, au taux d’imposition
très faible, réputé place financière au secret bancaire hermétique !
Selon l’OCDE, les fonds cachés dans les différents sanctuaires de l’opulence-Andorre,
Monaco, Luxembourg, Jersey, la Suisse, îles caïmans…-sont estimés à 6.000
milliards de dollars, «trous noirs de la finance internationale», signe et
persiste Angela Merkel, chancelière allemande, qui stigmatise au passage les
refuges «offshore», comme autant de bulles spéculatives, ignorant délibérément
les règles prudentielles d’usage, des bombes à retardement pour l’économie
mondiale, confrontée, dit-elle, à des créances toxiques, plombant les leviers de
la croissance dans les principaux centres marchands de la planète.
Face aux difficultés budgétaires des pays membres de l’Union européenne et au
financement d’une dette publique colossale, le couple franco-allemand, fer de
lance de la croisade contre l’évasion fiscale, entend obtenir «des places
offshore» le même traitement dont les Etats-Unis d’Amérique sont bénéficiaires,
après d’âpres négociations avec l’Association des banquiers privés suisses et
les autres représentants des principautés du Vieux continent, dans l’obligation
désormais d’informer Washington de l’identité de tout citoyen américain déposant
des titres de son pays dans un coffre helvétique, monégasque ou luxembourgeois.
Les tensions s’accentuent avec la création, récemment, d’une agence
européenne baptisée «Eurofisc», chargée de traquer les montants non déclarés, ce
qui a poussé les autorités des principales places financières, aux standards de
confidentialité et de sécurité élevés, à assimiler les dernières mesures de
Bruxelles «à une véritable déclaration de guerre économique à des entités
démocratiques ayant choisi de moins taxer les fortunes que les autres»,
contrairement, insistent-ils, aux politiciens de la plupart des Etats membres de
l’UE, pratiquant la surenchère fiscale, aux allures de politique politicienne,
vis-à-vis de leurs citoyens nantis, adeptes de l’anonymat et du secret.