é de Nokia présente un téléphone portable de luxe dans la boutique Vertu, le 18 février 2009 à Tokyo |
[27/03/2009 10:10:31] TOKYO (AFP) Inauguré en pleine crise, le navire amiral de la marque de téléphones de luxe Vertu toise depuis un mois le quartier huppé de Ginza à Tokyo. Si les passants sont songeurs, la direction, elle, affiche une confiance intacte: des Japonais riches, il en reste.
“Tout le monde nous pose ces questions: n’est-ce pas une erreur d’avoir ouvert ce magasin en cette période de récession ? N’est-ce pas trop difficile?”, reconnaît le président de Vertu au Japon, Yoichiro Ban.
“Eh bien, non !”, affirme-t-il. “La mauvaise conjoncture économique n’empêche pas de nombreux Japonais, plus que nous le pensions, de franchir le pas de la boutique, de réserver ou acheter un téléphone”, ajoute-t-il, même à près de 50.000 euros pièce.
Emanation du finlandais Nokia, numéro un mondial du secteur des terminaux cellulaires, la marque Vertu est née en 1998. Son premier modèle, fait main, est arrivé sur le marché européen en 2002.
Il a cependant fallu près de sept ans à Vertu avant d’être proposée aux Japonais, une clientèle hyper-exigeante et technophile où les fabricants de portables étrangers n’ont jamais réussi à se frayer une vraie place.
Même si la maison-mère Nokia s’est retirée de l’archipel l’an passé faute d’acheteurs, M. Ban y croit.
“Nous n’avons pas décidé d’importer Vertu au Japon sur un coup de tête, nous y avons réfléchi dès 1999 et nous avons tranché en 2006, jugeant qu’il existe un vrai potentiel pour nos produits et services”, explique cet élégant francophile qui dit avoir “rencontré Vertu en France”.
“A l’instar des grandes marques de luxe hexagonales, la clientèle nippone est pour nous une priorité”, ajoute-t-il.
Les téléphones Vertu, présentés sous vitrines blindées, saisis avec des gants blancs et briqués à la chamoisine, valent leur pesant de titane, or, platine, ou autre matériau rare: le moins onéreux des appareils vendus au Japon se monnaye 670.000 yens (5.400 euros) et la pièce-maîtresse, le “Signature Platina”, quelque 6 millions de yens (48.000 euros). Pour la même somme, les Japonais peuvent s’offrir trois Insight, dernier modèle de voiture hybride estampillée Honda, avec quelques options.
A ce tarif, le client Vertu, lui, n’a que le terminal, sans assurance contre le vol, ni garantie de délai de remise en service en cas de panne ou autre avarie.
“Mais c’est un modèle unique, signé d’un des six techniciens-artisans qui les façonnent à la main, un à un, de bout en bout”, insiste M. Ban, connaissant l’attachement de ses compatriotes au “monozukuri” (manufacture) et leur souci du détail.
Le prix de l’abonnement, 52.500 yens (420 euros) par mois… “taxes comprises”, est justifié par la prestation “concierge”, qui permet à chaque “membre du club” de joindre un commis de service 24 heures sur 24, du 1er janvier au 31 décembre, sur simple appui d’une touche, pour obtenir une information, réserver un restaurant, prendre un billet d’avion, ou satisfaire d’autres lubies.
Les précieuses données personnelles des abonnés sont stockées dans un serveur ultra-sécurisé caché 30 mètres sous terre en Grande-Bretagne, dans un bunker qui appartenait à l’armée britannique.
De ce fait, les fonctions des terminaux Vertu sont réduites au minimum: communication vocale, e-mail, portail d’information dédié aux membres. Le reste, que l’on trouve sur presque tous les mobiles japonais (baladeur, jeux, télévision, GPS, porte-monnaie électronique, ticket de métro, etc.), “les acheteurs de modèles Vertu n’en ont pas besoin”, rétorque M. Ban.
“Nous avons bien ciblé les personnes potentiellement intéressées”, se félicite-t-il, se montrant soulagé de ne pas avoir encore vu débarquer un jeune du quartier déjanté de Shibuya, au look improbable, certes prêt à claquer des fortunes en vêtements et accessoires de luxe, mais aux antipodes de la clientèle visée.