Le nord de la Pologne devenu terre lituanienne des bonnes affaires

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ère de Suwalki en Pologne en le 21 mars 2009. (Photo : Petras Malukas)

[28/03/2009 20:45:09] SUWALKI, Pologne (AFP) Les villes du nord de la Pologne sont la nouvelle destination favorite des Lituaniens qui affluent en masse chaque jour et repartent le coffre bourré de victuailles, achetées à très bon prix grâce à la chute vertigineuse du cours de la monnaie polonaise.

A Suwalki, ville de près de 70.000 habitants à une trentaine de kilomètres de la frontière, c’est la ruée, même en semaine. Dès les petites heures de la matinée, la grande majorité des voitures garées aux abords des supermarchés sont immatriculées en Lituanie.

“J’ai dépensé environ 800 zlotys (176 euros), j’ai fait des courses pour un mois. Depuis le 4 février, je n’ai pas mis les pieds dans un supermarché en Lituanie, sauf pour acheter du pain et du lait”, explique Albertas Zygmantas, employé à la laiterie de Marijampole, à une soixantaine de kilomètres de Suwalki.

Le zloty polonais est tombé à son plus bas en cinq ans en février, à 4,83 pour un euro, perdant ainsi 43% de sa valeur par rapport à juillet. La monnaie lituanienne reste en revanche liée à l’euro par un taux fixe.

Les prix ont de plus augmenté en Lituanie le 1er janvier sous l’effet d’une hausse de la TVA dans le cadre d’un plan d’austérité adopté par le gouvernement.

“L’afflux a commencé en février. Avant, les Lituaniens venaient également, mais pas en aussi grand nombre. Ils viennent en familles, en groupes”, raconte à l’AFP Janusz Bobrek, vendeur sur le marché de Suwalki.

Pour satisfaire la clientèle lituanienne, les commerçants proposent des pommes ou des oignons en sacs de plusieurs kilogrammes.

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ère de Suwalki en Pologne en le 21 mars 2009. (Photo : Petras Malukas)

“Avant la baisse du zloty, on vendait 100-200 kilos de viande par jour ; aujourd’hui on vend 1 tonne, 2 tonnes… Tout simplement 10 ou 20 fois plus !”, raconte, radieux, Krzysztof Toczko, vendeur de volailles au marché.

Pour preuve de la bonne santé de son commerce, il ouvre son portefeuille et déploie un éventail de billets. A 10H00, il a déjà une dizaine de coupures de 100 litas. Chez lui, le poulet entier coûte 7 zlotys le kilogramme, en Lituanie 11,49 litas (3,32 euros), soit 15 zlotys.

Birute Lukosevciene travaille pour une compagnie d’assurances. Son salaire sera divisé par deux à partir d’avril, en raison de la crise économique. Elle recevra à peine 600 litas par mois (174 euros). Elle se rend à Suwalki deux fois par mois, depuis deux mois déjà.

“En groupant tous nos achats, nous pouvons économiser jusqu’à 200 litas”, raconte-t-elle sans pour autant se plaindre.

Ona Rasikanciene est retraitée. Ce matin sur le marché, elle a dépensé la moitié de sa retraite, soit 300 litas. “Nous venons en Pologne car nous n’arrivons pas à survivre. Nos petits-enfants sont orphelins, ils sont à notre charge”, explique la vieille femme, des sanglots dans la voix.

Pour le vendeur Janusz Bobrek, la plupart des gens sont pourtant loin d’être pauvres, comme en témoignent les marques et le bon état de nombre de véhicules. “Ils achètent tout en grande quantité, par dizaine de kilos, mais ce n’est pas pour revendre”, souligne-t-il.

La Lituanie enregistre chaque mois du fait de ces achats en Pologne un manque à gagner de 100 millions de litas de recettes fiscales (environ 29 millions d’euros), estime Kestutis Glaveckas, président de la commission budgétaire du Parlement.

“Ce sont les entreprises de notre pays qui souffrent le plus. Or, c’est sur elles que reposent tous les espoirs de redémarrage de l’économie”, écrit dans une tribune, Indre Genyte, économiste à la DnB Nord.

“Que la Pologne profite de cette aubaine, si la Lituanie n’arrive pas à proposer des prix aussi bas!”, s’exclame Oksana Vizgueliene, une jeune mère de famille qui vient de parcourir 200 kilomètres depuis Vilnius pour faire le plein de couches et de petits pots.