Crise : Bruxelles s’engage à aider les pays pauvres, sans avoir l’argent pour

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é Manuel Barroso et Louis Michel, commissaire européen en charge du développement, à Bruxelles le 8 avril 2009 (Photo : Dominique Faget)

[08/04/2009 14:45:37] BRUXELLES (AFP) Sans argent frais à offrir aux pays en développement pour lutter contre la crise, la Commission européenne en est réduite à mettre la “pression” sur les Etats membres de l’UE accusés par les ONG de ne pas prendre au sérieux les besoins des pauvres de la planète.

Une semaine après le G20 qui s’est engagé à aider le monde en développement, Bruxelles a présenté mercredi des mesures destinées à aider les pays pauvres les plus touchés par la crise économique mondiale, mais en mettant à disposition principalement des ressources déjà promises.

“La Commission a fait preuve de ses bonnes intentions aujourd’hui, mais ce qu’elle offre est en réalité un paquet vide”, a déploré Alexandre Polack, de l’ONG Action Aid.

“Nous ne sommes pas venus ici vous annoncer des moyens additionnels faramineux”, a été obligé de reconnaître Louis Michel, commissaire européen en charge du développement, lors d’une conférence de presse, reconnaissant qu’un de ses objectifs était de “maintenir la pression” sur les Etats membres pour qu’ils continuent leur aide.

“La récession ne peut pas et ne sera pas utilisée comme excuse pour remettre en cause nos promesses d’aides”, a insisté le président de la Commission José Manuel Barroso.

Certes, en 2008, l’aide au développement de l’UE, premier donateur mondial, a augmenté à près de 49 milliards d’euros, soit 0,40% du PIB européen. Mais l’exécutif européen s’inquiète les années à venir et l’UE risque de ne pas atteindre son objectif de 0,7% du PIB en 2015.

Ces promesses sont d’autant plus importantes que dans les pays en développement des “dizaines de millions de personnes sont précipitées, ou retombent, dans la pauvreté”, a souligné la Commission.

Une situation qui risque d’avoir “d’importantes implications politiques et répercussions dans le domaine de la sécurité”, qui peut “déclencher des révoltes, voire des coups d’Etat militaires” et “accentuer la pression migratoire” sur les pays riches, a-t-elle averti.

Mais malgré ces menaces, “les Etats membres ne prennent pas au sérieux les besoins des pays en développement embourbés dans une crise dont ils ne sont pas responsables”, a dénoncé la confédération Concord, qui regroupe les grandes ONG de développement européennes.

Pour faire malgré tout quelque chose face à la crise, la Commission a annoncé mercredi une “anticipation” de ses paiements d’aide, pour un montant total de 4,3 milliards d’euros sur 2009.

Mais l’essentiel de cette somme était déjà décidé.

Ainsi, si 800 millions d’euros vont être débloqués pour améliorer la sécurité alimentaire des pays pauvres (financement de semences, d’engrais…), il s’agit de la première tranche du milliard d’euros difficilement arraché aux Etats membres en décembre. Et quelque 3 milliards d’euros d’aide budgétaire, engagés en 2008, vont être payés plus rapidement que prévu.

Seule véritable nouveauté, 500 millions d’euros des réserves du Fonds européen au développement 2008-2013 devraient être affectés dès 2009 aux financement des mesures sociales dans les pays les plus vulnérables.

Mais même si débloquer des sommes importantes maintenant est une bonne idée, cela réduira d’autant les fonds disponibles dans les années qui suivront, selon les ONG. “Sans argent nouveau, les pays pauvres vont souffrir dans les années qui viennent, quand l’aide va se tarir”, a ainsi souligné Oxfam.

Bruxelles prône d’autre part une meilleure coordination du travail entre les 27 pays membres, estimant que 35 milliards d’euros auront été gaspillés par la multiplication de petits programmes et le manque d’efficacité d’ici 2015.

Une bonne application du “code de conduite” sur la division du travail, adopté par l’UE en 2007 pour pallier cette inefficacité, pourrait ainsi dégager quelque 7 milliards d’euros par an.