La Chine pousse son yuan vers un rôle mondial, mais pour un horizon lointain

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ï, le 18 janvier 2008 (Photo : Mark Ralston)

[11/04/2009 10:17:13] PEKIN (AFP) La Chine a entrepris de pousser activement son yuan à jouer un plus grand rôle dans les échanges mondiaux mais pourrait mettre des années, voire des décennies, à l’imposer comme une monnaie internationale apte à défier le dollar, soulignent des économistes.

Cette volonté nouvelle de Pékin s’est manifestée ces dernières semaines par une série d’accords de crédits croisés, alors même que le gouverneur de la Banque centrale attaquait vertement le système financier mondial actuel reposant sur la devise américaine.

“On voit bien que le poids international du renminbi (autre nom du yuan) s’accroît”, relevait après le dernier accord de swap (prêt croisé) Zhang Taowei, professeur du centre d’études financières de l’Université Tsinghua de Pékin.

Pour l’heure, le renminbi qui est de facto étroitement lié aux fluctuations du dollar, ne peut jouer qu’un rôle mineur, en partie parce qu’il n’est pas convertible.

Les flux d’argent entre la Chine et l’extérieur par exemple sont difficiles pour des investissements en actions ou obligations.

Mais la Chine pourrait évoluer sur cette question, mue par sa méfiance nouvelle vis-à-vis de la devise américaine, dont le Premier ministre Wen Jiabao s’est fait l’écho en mars en se disant préoccupé par le sort futur des énormes investissements en dollars de son pays.

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à Séoul, le 22 juillet 2005 (Photo : Jung Yeon-Je)

Depuis décembre, Pékin va vers une plus grande utilisation de sa monnaie dans les échanges commerciaux. Sa Banque centrale a signé six accords de swaps avec ses homologues de Corée du Sud, Hong Kong, Malaisie, Bélarus, Indonésie et Argentine, représentent 650 milliards de yuans (71,7 milliards d’euros).

Les importateurs de ces pays pourront emprunter des yuans auprès de leur Banque centrale pour acheter en Chine et limiter les effets des fluctuations des taux de change du dollar.

Dans le même but, Pékin a annoncé le lancement à titre expérimental d’échanges commerciaux en yuans entre cinq villes, de l’est et du sud de la Chine, toutes bastions du commerce chinois, et l’étranger.

“Les faits suggèrent que la Banque centrale aimerait voir un recours accru au yuan pour régler les échanges à l’étranger”, commente Ben Simpfendorfer, économiste à Hong Kong de Royal Bank of Scotland.

“Cela ne va pas se passer du jour au lendemain. Cela prendra des années. Néanmoins ça pourrait arriver plus tôt qu’on ne le croit”, ajoute-t-il.

L’appui récent de certaines économies émergentes pourrait accélérer le processus, comme celui du Brésil, dont le président Luiz Inacio Lula da Silva a récemment proposé à son homologue chinois Hu Jintao que les échanges commerciaux entre les deux pays se fassent en monnaie locale et non plus en dollars.

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ésident brésilien Luiz Inacio Lula da Silva avec son homologue chinois Hu Jintao, le 7 août 2008 à Pékin (Photo : Adrian Bradshaw)

Dans un système où perdure la suprématie du dollar, “les marchés émergents n’ont guère voix au chapitre”, souligne Lu Zhengwei, d’Industrial Bank.

Pourtant, Lu ne croit pas que le dollar puisse être détrôné bientôt, malgré les appels de la Banque centrale chinoise à la création d’une nouvelle monnaie de réserve supranationale.

“C’est théoriquement une bonne idée. Difficile à appliquer en réalité”, dit-il.

“Cela peut lancer la discussion mais ne va pas être suivi d’effet dans un avenir proche”, ajoute-t-il.

Quant à un yuan internationalisé, cela pourrait prendre de 10 à 30 ans, a elle-même souligné l’agence officielle Chine Nouvelle.

“Une monnaie ne devient populaire que lorsqu’elle est largement utilisée et que les frais de transaction sont bas”, indique Simpfendorfer. “La Chine a un avantage: c’est un pays important de commerce. Mais il lui faut consommer davantage de produits importés”.