La gestion des grands groupes dans le collimateur des AG d’actionnaires

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âtiment historique de la Bourse de Paris (Photo : Jacques Demarthon)

[20/04/2009 05:43:06] PARIS (AFP) A l’heure des assemblées générales des groupes du CAC 40, les petits actionnaires ont en ligne de mire la gestion des entreprises durant la crise, ciblant leurs attaques sur les conseils d’administration, épinglés pour leur passivité.

“Les gros scandales qui arrivent ont été cautionnés par les administrateurs. C’est un petit monde qui ne protège pas du tout les actionnaires”, clame Didier Cornardeau, président de l’Association des petits porteurs actifs (Appac), évoquant notamment les rémunérations de certains dirigeants, à l’origine d’une vive polémique.

“Si ça marchait, on n’en serait pas là”, ajoute-t-il.

Selon un récent sondage de l’agence Capitalcom, 80% des actionnaires reprochent aux conseils d’administrations (CA) de ne pas jouer “pleinement leur rôle dans le contexte actuel”, 43% d?entre eux attendant notamment davantage de pédagogie sur la stratégie de l’entreprise face à la crise.

Elus par l’assemblée générale (AG) des actionnaires sur proposition du CA, les administrateurs sont notamment en charge d’élaborer cette stratégie, de nommer le directeur général et de valider les rémunérations des dirigeants.

“Les administrateurs sont trop proches les uns des autres pour jouer leur rôle de contre-pouvoir”, s’inquiète Colette Neuville, de l’Association de défense des actionnaires minoritaires (Adam).

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ésidente fondatrice de l’association de défense des actionnaires minoritaires le 13 janvier 2009 à Paris (Photo : Jacques Demarthon)

“Ils ont été incapables de repérer les dysfonctionnements dans le secteur bancaire et ne se sont pas opposés aux rémunérations excessives”, ajoute Mme Neuville.

“Il y a sans doute une trop forte consanguinité entre membres du CA. Ils ne vont pas se déjuger les uns les autres”, abonde Michèle Monavon, présidente de la Fédération française des associations d’actionnaires salariés.

Une homogénéité également pointée du doigt par plusieurs experts.

“Il y a une tendance à ne recruter que d’anciens ou d’actuels PDG en pensant qu’eux seuls peuvent gérer les affaires d’une grande entreprise”, constate Alain Martel, de l’Institut français des administrateurs.

Plusieurs PDG ou ex-PDG du CAC 40 siègent ainsi dans les CA d’autres grandes entreprises, tel Jean-Martin Folz (ex-PSA), administrateur d’Alstom, de Saint-Gobain ou de la Société Générale.

Les CA sont par ailleurs “peu ouverts (…) aux administrateurs n?ayant pas été formés à l?ENA, HEC ou Polytechnique”, conclut l’étude de deux universitaires, Nathalie Del Vecchio et Moez Joudi, publiée dans la Revue française de gouvernance d’entreprise.

Selon Mme Neuville, l’urgence est d’accorder une plus large place aux actionnaires. A l’heure actuelle, détenir une part substantielle du capital ne suffit pas à ouvrir la porte du CA.

“Il faut en finir avec ce capitalisme de délégation où les administrateurs prennent des risques avec l’argent des autres”, dénonce-t-elle, estimant qu’avec “5 à 6% du capital, on devrait avoir droit à siéger au CA”.

“A chaque fois qu’on a fait une demande pour entrer au CA, elle nous a été refusée”, assure M. Cornardeau, qui plaide pour la création d’une école d’administrateurs indépendants.

Les CA sont également montrés du doigt pour le peu de place accordé aux femmes. Jeudi, des militantes féministes ont profité de l’Assemblée générale de L’Oréal à Paris, qui a donné le coup d’envoi de la saison des AG, pour dénoncer “la domination masculine” “dans beaucoup” de sociétés du CAC 40.

Les CA des grands groupes français ne comptent que 8,2% de femmes, selon une étude de Capitalcom, un taux fixé à 40% par la loi en Norvège.