[30/04/2009 22:22:53] PARIS (AFP)
ébut d’un match de football (Photo : Patrick Bernard) |
La Cour d’appel de Paris dira le 4 juin si Orange peut à nouveau commercialiser sa chaîne Orange Sport, après une audience sur le fond, jeudi, décortiquant l’offre “triple play” (télévision, téléphone et internet) du géant des télécoms.
Un premier jugement du tribunal de commerce (le 23 février), sollicité par Free et SFR, interdisait à Orange de subordonner l’abonnement à Orange Sport, la chaîne proposant notamment un match de L1 en exclusivité le samedi, à une souscription “triple play”.
C’est toute la stratégie d’Orange d’achat de contenus exclusifs, pour “ne plus être un tuyau”, selon le mot du PDG de France Télécom, Didier Lombard, qui est remise en question.
Les avocats d’Orange ont gardé leur ligne de défense, malgré l’incitation de la présidente, Hélène Deurbergues, à évoquer tout d’abord l’incompatibilité avec le droit européen en utilisant ce qu’elle a appelé “un coup de théâtre”: une décision de la Cour de justice des communautés européennes du 23 avril spécifiant, dans une autre affaire, qu’interdire les offres liées était contraire à une directive européenne de 2005.
Mes Hugues Calvet et Robert Saint-Esteben ont d’abord mis en avant d’autres arguments d’Orange: il n’y a pas de vente liée car l’offre “triple-play” est une pratique du marché, suivie par Free et SFR également.
“Ce sera la première fois qu’on condamne une offre liée alors qu’elle est non seulement un usage du marché mais une norme du marché!” a ajouté Me Saint-Esteben.
Jacques Gunther, l’avocat de la Ligue de football (LFP), a lui mis en avant cet atout européen, avant d’insister sur le besoin vital pour le football français de la manne des droits télé. Orange paie 203 millions d’euros par saison jusqu’en 2012 pour son exclusivité (Canal+ paie 465 M EUR).
La LFP intervient volontairement dans ce procès pour soutenir un de ses puissants enchérisseurs. S’il était seul sur le marché, Canal chercherait à payer moins cher les droits du foot.
Les conseils d’Orange ont également rappelé que les pouvoirs publics avaient soutenu l’émergence des opérateurs télécoms sur le marché, pour concurrencer Canal+ qui se retrouvait maître du terrain en 2005 après avoir absorbé TPS, son concurrent déchu.
Car cette querelle ne concerne pas que des FAI (Fournisseurs d’accès internet): il s’agit bien de la guerre industrielle entre Canal+/Vivendi et France Télécom/Orange. “Neuf est filiale à 56% de Vivendi, qui contrôle Canal+, ce qui n’est pas anodin”, a elle-même souligné la présidente.
Un représentant du ministère de l’Economie est venu à la barre préciser que Bercy estimait que cette affaire relevait du droit de la concurrence, une intervention rare et peut-être de bon augure pour Orange.
Les avocats de Free et Neuf ont ensuite pris la parole et insisté sur la “concurrence déloyale”, à leurs yeux, pratiquée par Orange, qui recrute des abonnés au téléphone ou à internet seulement attirés par l’offre football et “piégés”.
Me Didier Théophile, pour Free, s’est attaqué à l’argument du droit communautaire, qui prime sur le droit français, en nuançant la vente liée, évoquée par la loi belge incriminée par la CJCE, et la vente contrainte, pratiquée par Orange.
Quel que soit le résultat le 4 juin, la bataille judiciaire va durer, chaque camp étant prêt à aller jusqu’en cassation.