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[06/05/2009 16:36:18] BRUXELLES (AFP) Après s’être déjà fâché avec la Suisse, le ministre allemand des Finances a provoqué un sérieux couac diplomatique avec le Luxembourg voisin, en comparant le Grand-Duché au Burkina Faso pour ses pratiques en matière de secret bancaire.
Fait très inhabituel, les députés luxembourgeois ont voté à l’unanimité mercredi une résolution au Parlement pour condamner ces propos en estimant qu’ils “portaient atteinte” aux relations bilatérales.
Ces déclarations “portent atteinte au caractère exemplaire des relations qui se sont développées entre la République fédérale d’Allemagne et le Luxembourg depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale”, souligne le texte adopté par les élus de droite comme de gauche, y compris du parti chrétien-social du Premier ministre Jean-Claude Juncker.
Ils ont condamné “sans réserve les écarts de langage du ministre et l’absence de considération dont il fait preuve à l’endroit du Burkino Faso”.
Le ministre du Budget et du Trésor, Luc Frieden, a parlé d’un “affront”. Son collègue des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a fustigé de son côté des “propos de comptoir”, dénonçant “une “arrogance difficile à dépasser”.
L’Allemagne mène depuis des mois une fronde contre les pays, comme le Luxembourg, qui pratique le secret bancaire. Elle a exercé de fortes pressions pour qu’ils soient inscrit sur une liste de paradis fiscaux à l’ocasion du récent sommet du G20.
Soutenue par d’autres grands pays européens comme la France, elle estime qu’avec la crise financière mondiale l’heure doit être à la transparence dans tous les domaines. Et argue que les Etats ne peuvent plus se permettre de perdre des milliards d’euros via l’évasion fiscale.
Mardi à Bruxelles, en marge d’une réunion avec ses collègues de l’UE, le ministre allemand, Peer Steinbrück, connu pour ne pas avoir sa langue dans sa poche, a adressé une nouvelle pique aux pays ne jouant pas suffisamment le jeu à ses yeux.
Il a mis sur le même plan “le Luxembourg, le Liechtenstein, la Suisse, l’Autriche et Ouagadougou (la capitale du Burkina Faso)…” pour leurs performances en matière de transparence fiscale et indiqué, sur un ton ironique, qu’il entendait tous les inviter à une prochaine conférence de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) sur les paradis fiscaux à Berlin.
C’est précisément sur une liste de l’OCDE que le Luxembourg et la Suisse ont été récemment inscrits, ce qui a provoqué leur fureur d’être ainsi montrés du doigt par la communauté internationale. Ils ont néanmoins annoncé des concessions pour assouplir leur secret bancaire.
Le ministre allemand n’en est pas à son coup d’essai. En mars, il avait déjà provoqué un tollé en Suisse en multipliant les attaques contre ses pratiques bancaires, qui attirent nombre d’Allemands fortunés.
Il avait comparé la Confédération helvétique aux “Indiens qui fuient devant la cavalerie” face aux menaces de figurer sur des listes noires de paradis fiscaux, suscitant des protestations officielles.
Un député suisse, Thomas Müller, avait même jugé que le ministre allemand se comportait comme un nazi. “La Gestapo en Allemagne constituait une élite. Quelqu’un comme (Peer) Steinbrück me rappelle justement cela, dans toute son apparence. Il est intransigeant, sans égards et présomptueux”, avait-il protesté.