Le dollar flanche avec les espoirs de reprise et pousse le brut à 60 dollars

[12/05/2009 21:12:36] LONDRES (AFP)

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Un euro et un dollar (Photo : Joël Saget)

Le dollar a flanché sur le marché des changes mardi, perdant de son aura de valeur-refuge et entraînant le baril de pétrole au-dessus de 60 dollars après une hausse du déficit commercial américain en mars moins forte que ce que craignaient les économistes.

Vers 12H30 GMT, la publication de chiffres montrant un retour à la hausse du déficit commercial des Etats-Unis en mars après sept mois consécutifs de recul, a été suivie presque automatiquement d’un mouvement de baisse du dollar et de hausse du pétrole.

Le déficit en question s’est établi à 27,6 milliards de dollars, contre 26,1 milliards (chiffre révisé) le mois précédent. Rassurés, les marchés, qui tablaient sur un déficit plus élevé, à 29 milliards de dollars, ont retrouvé le goût du risque et se sont délestés de leurs billets verts, valeur-refuge par excellence de la crise économique.

La devise américaine est ainsi tombée à 1,3707 dollar pour un euro, seuil de faiblesse plus goûté depuis un mois et demi, tandis qu’elle touchait 1,5352 dollar pour une livre sterling et 1,1005 franc suisse, des niveaux plus vus depuis janvier.

Même face à la monnaie japonaise, autre valeur-refuge de la crise, en raison de son très faible taux d’intérêt, le dollar est tombé à 96,52 yens, un plus bas depuis fin avril.

Or, dans une mécanique bien huilée, ce mouvement sur le marché des changes s’est répercuté sur celui des matières premières : en rendant le brut (échangé en dollars) moins cher, il a également poussé les investisseurs à se protéger de l’inflation… en plaçant leur argent dans les matières premières.

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à essence (Photo : Behrouz Mehri)

Résultat, le brut a à nouveau dépassé les 60 dollars, plus franchis depuis six mois, les prix se propulsant jusqu’à 60,08 dollars sur le marché new-yorkais, un plus haut depuis la mi-novembre.

“Les investisseurs, soulagés d’échapper à la tourmente financière et économique, délaissent le billet vert et commencent à regarder à nouveau en direction d’investissements plus risqués, à travers leurs lunettes roses” commentaient les analystes de Commerzbank.

D’où le paradoxe, décrit depuis plusieurs semaines par les analystes, d’un billet vert pénalisé par de bons indicateurs… aux Etats-Unis. Les investisseurs sont emportés par une nouvelle vague d’optimisme, soulevée par des résultats trimestriels meilleurs qu’attendus, notamment de la part des banques qui ont passé avec succès les “tests de résistance” imposés par Washington, les nombreuses mesures prises par les responsables économiques et par plusieurs indicateurs marquant le début d’un ralentissement de la crise. Celui de l’OCDE a souligné lundi le rythme moins soutenu du ralentissement économique.

Ces “green shots” (littéralement, les “bourgeons” de la reprise) ont encouragé les investisseurs à croire que le printemps était arrivé sur les marchés, redonnant de la vigueur aux placements considérés comme risqués, les actions et l’euro par exemple. Depuis le 21 avril dernier, le dollar a connu, face à la monnaie européenne, une série quasiment ininterrompue de glissades.

Selon les analystes, le dollar devrait encore perdre du terrain face aux principales devises lors des prochains mois. Mais certains voulaient être plus prudents, comme l’analyste de la Société Générale, Albert Edwards: “J’ai lu l’autre jour que l’économie mondiale avait cessé de +chuter à pic+… si nous filons la métaphore nous pourrions dire qu’elle se contente aujourd’hui de dévaler la pente”.

Abondant dans son sens, l’analyste de Capital Economics, John Higgins estimait que “certes, le pire de la crise est peut-être derrière nous mais les investisseurs font preuve d’un enthousiasme un peu exagéré à l’endroit des +bourgeons de reprise+”.