Tunisie : L’UTICA dans le regard des jeunes chefs d’entreprise

Comment les jeunes entrepreneurs perçoivent l’UTICA de demain
? Qu’en attendent-ils ? D’autant plus que nous assistons à des mutations
importantes au niveau des tissus entrepreneuriaux de par le monde ?

jeunes-entrepreneurs1.jpg«Elle pourrait mieux faire. J’espère voir plus d’efforts pour l’amélioration
du climat des affaires. Ce qui est positif d’un autre côté, c’est que nous
remarquons que la centrale communique régulièrement sur et avec l’entrepreneuriat»,
répond Karim Aouij, jeune promoteur à qui on demandait comment il évalue les
réalisations de l’UTICA. Leila Belgacem, consultante à l’export est
également de la partie, pour elle, l’UTICA devrait plus aider les
micro-entrepreneurs et les entreprises à domicile, qui sont en augmentation,
en particulier chez les jeunes. «L’environnement économique en Tunisie
possède un grand nombre de micro-entrepreneurs qui pourraient être mieux
représentés à l’UTICA. Celle-ci devrait également contribuer au
développement et la communication sur le cadre législatif et fiscal
adaptable à la petite et micro-entreprise», précise-t-elle.

Monia Jeguirim, présidente en exercice du CJD, estime quant à elle que la
centrale patronale bénéficie d’un large spectre au niveau de l’entrepreneuriat
en Tunisie. «Je pense que l’UTICA a une large représentativité dans la
mesure où l’industrie, l’artisanat, le commerce et les services qui sont
l’essence même de notre centrale patronale y sont largement représentés.
Sans oublier la composante Jeune qui constitue une véritable promesse de
pérennité et un précieux gisement de compétences au service de l’économie de
notre pays».

La position d’Abdelaziz Dargouth, ancien président du CJD, est plus nuancée.
Tout d’abord, il considère qu’il est important de replacer la centrale dans
le contexte historique des années 80. L’avènement de la mondialisation à
l’époque a changé le rôle de l’UTICA, devenue le porte-drapeau de
l’ouverture à l’opposé de la mission qu’elle s’est faite lors de sa
création. Durant les années 50, explique M. Dargouth, l’objectif principal
de l’UTICA était de construire une industrie tunisienne, puis organiser et
moderniser le commerce national pour la mise en place du secteur privé.
Toute cette organisation, cette édification se faisait sur un marché protégé
par des barrières tarifaires et une économie dirigée par ceux-là mêmes qui
ont créé cette union et qui se contentaient d’être un syndicat exclusivement
protecteur.

De par le monde, explique Abdelaziz Dargouth, les syndicats des patrons ont
migré vers un mouvement de dirigeants qui prônent un climat d’affaires plus
juste, plus attractif, un équilibre socioéconomique, une ouverture et une
compétitivité régionale, une organisation des métiers basée sur les
compétences et l’innovation ,et surtout une influence importante sur les
politiques économiques et les prises de décisions stratégiques.

Pourquoi pas une UTICA think tank ?

«L’Utica a réussi ces dernières années à donner au secteur privé la place
qu’il mérite dans le paysage socioéconomique du pays. Rien que le fait
d’être consultée régulièrement par les pouvoirs publics pour tout amendement
législatif à caractère économique prouve sa place sur la scène nationale.
Mais il serait avantageux, qu’outre le rôle de syndicat, de défense des
intérêts sectoriels et de promotion de l’entreprise, la centrale syndicale
oeuvre en tant que think tank», assure Monia Jeguirim ajoutant : «Des études
stratégiques dans différents secteurs d’activité telles que pratiquées ces
dernières années aident les entreprises à se positionner dans un contexte de
grandes mutations pour ne pas dire de turbulence. Il est évident que cela
nécessite des moyens, l’entreprise devrait contribuer à leur financement
pour avoir une information économique fiable et précieuse. L’étude sur le
secteur de la bijouterie réalisée récemment par l’UTICA en est la parfaite
illustration».

Certains entrepreneurs pensent que pour que l’UTICA puisse maximiser ses
réalisations, il faudrait renforcer son rôle en tant que structure de veille
stratégique pour le secteur privé. Ce qui pourrait permettre aux autres
structures de se concentrer sur la défense des intérêts des entrepreneurs.

La centrale pourrait par ailleurs selon M. Dargouth, proposer aux chefs
d’entreprise de nouveaux services (ex : Centre d’appel pour les chefs
d’entreprise afin de les informer, les soutenir, les guider) et amener les
pouvoirs publics au développement d’un secteur privé basé sur l’entreprise
citoyenne et sur la prise de décision partagée. Il serait également
appréciable de s’investir plus intensément dans la mise en relation
stratégique avec d’autres patronats, développer une nouvelle approche dans
les négociations sociales pour un accord long terme et être le garant de la
transparence, de l’éthique et de la bonne gouvernance dans l’environnement
entrepreneurial.

Parmi les actions significatives que pourrait envisager notre centrale le «
lancement de sondages d’opinion auprès des entreprises affiliées par secteur
d’activité dont l’objectif serait d’identifier leurs attentes et leurs
préoccupations par rapport au climat d’affaires et à l’environnement
entrepreneurial, serait très utile à l’entreprise, à l’UTICA et au pays»,
conclut Monia Jeguirim.

Impliquer les jeunes

La présidente du CJD estime que «les Jeunes Dirigeants, dans toutes les
régions, devraient s’impliquer davantage au niveau de la centrale patronale
d’autant que le travail, le sérieux, la persévérance et l’esprit
d’innovation sont des valeurs sûres qui caractérisent aujourd’hui les JD.
«Aucune instance dans le monde ne peut se permettre le luxe de ne pas bâtir
son avenir sinon, elle risque l’asphyxie. Faire confiance aux jeunes ce
n’est pas seulement les faire participer, mais surtout leur donner la
possibilité de prendre des décisions et prendre leur avenir en main»,
renchérit Abdelaziz Dargouth.

Pour Leila Belgacem, il importe que l’UTICA intègre plus de jeunes au niveau
de ses plus hautes instances d’autant plus que le CJD est la pépinière de
l’UTICA et qu’il a été créé à cette fin.

«Lorsque j’ai encouragé la création du CJD et du CNFCE au sein de l’UTICA,
le but était de permettre aux femmes chefs d’entreprise, dont les besoins
sont spécifiques, d’évoluer dans leur propre structure sous l’aile de
l’UTICA en attendant le jour où elles considèreront qu’elles n’ont plus
besoin d’une structure spécifique et s’intégreront totalement à la centrale.
S’agissant des jeunes débutants confrontés au milieu entrepreneurial, je
voulais qu’ils fassent leur apprentissage en étant autonomes et sans que
l’ombre de la centrale ne pèse sur eux. Ils assurent et c’est tant mieux»,
déclare Hédi Djilani.

Sauf que pour marquer l’évolution et être encore plus dans l’ère du temps,
on pourrait comme le pensent beaucoup de jeunes, moderniser l’image de la
centrale. Objectif : valoriser la nouvelle dynamique mise en place par
l’UTICA et assurer son rayonnement sur les plans national et international.

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