La
libre circulation des personnes n’est pas respectée par l’UE. Cela pèse sur
la libéralisation des services ?
On a parlé de libéralisation des services, et très vite on a dévié vers la
question de la libre circulation des individus qui pèse moins dans la
libéralisation des services que dans celui de l’industrie. Et donc, on se
heurte à certains problèmes que pose l’UE à la libre circulation des
personnes de l’extérieur vers l’Europe. Mais comme l’a évoqué un confrère
diplomate européen, c’est un problème qui relève du délicat chapitre de la
sécurité et de l’immigration.
L’organisation sociale est tellement avancée en Europe que si la circulation
dépasse le marché du travail, ça coûtera cher à nos sociétés. Et il y a
aussi les confrontations culturelles mais celles-ci sont de courte durée, je
pense. Le thème de la libre circulation est difficile et c’est là où notre
défi est plus grand.
La compensation financière européenne a privilégié les PECO par rapport à la
rive Sud. Comment justifier cet écart ?
Les PECO ont fait le plus. Quand on parle de libéralisation économique, ce
n’est qu’une partie par rapport à ce qu’ont fait les nouveaux pays membres
qui ont reçu toute cette aide. Ils ont changé leur système administratif et
même politique. Toute leur structure a dû être changée pour se conformer aux
normes européennes. C’est un changement tellement plus profond qu’une
libéralisation que ça a justifié un plus grand accompagnement financier.
Dans le même temps, je comprends bien votre déception. Simplement, l’UE a
ses limites au niveau de ses capacités de pouvoir faire cette coopération
financière avec le monde entier.
L’Europe continue à subventionner son agriculture ? N’est-ce pas
anti-libéral ?
La sécurité alimentaire est essentielle et j’ajouterais que c’est un
problème très important dans chaque société. Au cours de la décennie 60, on
a eu la sécurité alimentaire avec des prix acceptables pour le consommateur.
Certaines denrées étaient restées chères alors on a choisi de subventionner
notre propre secteur agricole. Dans les années 80, c’est devenu un véritable
problème et là-dessus on a forcé le secteur à faire des progrès de
productivité. Le secteur, notamment grâce à l’aide du contribuable européen,
est devenu fort et difficile à concurrencer.
LA PAC est une forme d’«obstruction» à la concurrence. Est-ce fair-play?
Il y a certainement des éléments anti libéraux dans la politique agricole
commune. Et cela fait débat à l’heure actuelle. Certains secteurs en ont
encore besoin et d’autres sont devenus compétitifs et peuvent s’en passer.
Ce sont surtout les petits pays où persistent la petite exploitation
agricole comme en Tunisie qui sont encore dépendants de cette subvention, et
qui sont difficiles à rendre compétitifs. On les défend par cette protection
directe ou indirecte. C’est vrai, ça complique la concurrence.
L’UE n’a pas établi un recueil unique de HACCP, ce qui entrave les
exportations agroalimentaires. Est-ce loyal ?
C’est la faute aux pays européens qui n’ont pas accepté que les normes
deviennent communautaires donc valables dans tous les pays européens. Chaque
pays applique ses propres lois et directives. Et, ce sont les grandes
enseignes du marché qui acceptent de prendre ce genre de critères de santé,
d’hygiène de respect de l’environnement des process de production.
En réalité, ils abondent dans le sens souhaité par le consommateur. Mais ce
n’est pas une grande difficulté. Quand on ne connaît pas le marché européen,
ça peut apparaître comme un défi, mais on peut le surmonter. C’est un
moindre mal car il y a une certaine assistance à ce sujet. Le plus difficile
reste la réglementation européenne.