En Suède, le Parti des pirates marque l’avènement d’une génération Internet

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à Stockholm (Photo : Olivier Morin)

[08/06/2009 13:57:47] STOCKHOLM (AFP) L’entrée au Parlement européen du Parti des pirates, avec un siège obtenu dimanche en Suède, marque l’avènement d’internet comme nouvel enjeu de la contestation politique et d’une nouvelle génération de jeunes électeurs éloignés des partis traditionnels.

Le jeune parti réclame la légalisation de l’échange gratuit de fichiers sur internet et veut protéger la vie privée des internautes qu’il juge menacée par la surveillance des nouvelles technologies. Il a réuni 7,1% des voix suédoises.

“C’est une fabuleuse reconnaissance politique”, a déclaré à l’AFP Rick Falkvinge, l’entrepreneur informatique de 37 ans qui a fondé le parti en janvier 2006. “Et elle ne vient pas de l’+establishment+, des partis établis. Elle vient d’en bas, des citoyens, et c’est formidable”, dit-il.

Avec 23,6% des voix chez les moins de 30 ans (dont 70% d’hommes), le parti est arrivé en tête dans une classe d’âge traditionnellement marquée par l’abstentionnisme et le désintérêt de la vie politique, selon les sondeurs.

“Les vieux politiciens ne comprennent pas l’importance des libertés fondamentales pour quasiment toute une génération. Ils considèrent cela comme un problème isolé des autres, ils vivent loin du clavier, ils ne vivent pas connectés”, critique Falkvinge.

“Ils menacent le mode de vie d’une génération qui s’est déplacée aux urnes pour le défendre”, pense M. Falkvinge. Sa formation politique qui veut assouplir le régime des droits d’auteur ou encore supprimer des brevets pharmaceutiques, n’avait rassemblé que 0,6% des voix lors de ses premières élections, les législatives de 2006.

Mais outre les partisans convaincus de son programme, le parti a su attirer les voix protestataires dimanche, relève un politologue de l’université de Göteborg, Ulf Bjereld.

“Ils sont vus comme un parti protestataire parce qu’ils refusent de se prononcer sur de nombreux sujets importants du débat droite-gauche, l’égalité, les impôts, la pollution. Ils se concentrent sur leurs thèmes et laissent les autres se débrouiller avec le reste”, explique-t-il.

Mais “ce ne sont pas des extrémistes”, tempère M. Bjereld, “plutôt une nouvelle forme de libéraux, pour les droits civiques et contre les monopoles”.

D’ailleurs, selon M. Falkvinge, l’élu du parti des Pirates, Christian Engström, pourrait sièger à Bruxelles aux côtés des libéraux ou des écologistes.

Perçu à ses débuts comme une plaisanterie, le parti a peu à peu bénéficié du contexte en Suède, où plusieurs lois contestées, notamment sur la surveillance des télécommunications et le durcissement des sanctions du téléchargement illégal, ont été adoptées depuis l’an dernier.

Mi-avril, la condamnation par un tribunal de Stockholm de quatre responsables du site d’échange de fichiers The Pirate Bay à un an de prison ferme avait suscité une vague d’adhésions; le nombre de membres avait triplé en une semaine, pour dépasser les 45.000 à l’approche de la campagne.

Le parti a pioché un peu à droite, un peu plus à gauche, mais surtout parmi les abstentionnistes et les premiers votants, relève le directeur de l’opinion de l’institut de sondage Sifo, Toivo Sjören.

C’est le cas de Daniel Wijk, un développeur de sites web âgé de 29 ans.

“Si le parti n’avait pas existé, je n’aurais simplement pas voté. Ce sont ces questions-là, de la protection de la vie privée, de la liberté sur internet, qui m’importent”, dit-il, dénonçant le “flicage” via les nouvelles technologies.

“Je n’ai rien contre le fait qu’on combatte le crime, mais nous ne sommes pas tous des criminels”, dit-il.