Depuis la parution en 2004 du rapport du député Jacques Floch sur «La
Présence et la France dans les institutions européennes», le politiques
français a admis la nécessité de promouvoir les intérêts des entreprises
françaises à Bruxelles ou Strasbourg. En effet, depuis la fin des années 80
les retours d’expérience dans le domaine du lobbying se sont avéré
particulièrement négatifs. Lors d’une réunion organisée par Edith Cresson à
Matignon, des représentants des groupes chimiques français avaient évoqué
publiquement la manière dont ils avaient échoué à Bruxelles dans les groupes
de normalisation. Contrairement à leurs concurrents allemands, ils n’avaient
pas pris la mesure des enjeux des manœuvres d’influence et n’avaient pas su
mobiliser le nombre de juristes nécessaires à ce type de démarche. La
principale conclusion était le manque de professionnalisme relevé du côté
des entreprises et la difficulté des pouvoirs publics à positionner leurs
représentants aux endroits clés des niveaux de décision. Les Français
recherchaient d’accord les postes de directeurs alors que les pays les plus
efficaces comme la Grande Bretagne ciblaient en priorité les niveaux
intermédiaires qui élaboraient le contenu des directives et géraient les
réseaux d’experts.
Cette prise de conscience a été passagère car le débat a été récemment
relancé au niveau national à la suite des suspicions et des présomptions de
corruption qui affectent certains politiques et qui nuisent à l’image du
lobbying sur une partie de l’opinion publique.
Le système français reconnaît aujourd’hui quelques exceptions, pour lequel
le lobbying auprès des élus est reconnu et admis. C’est la cas des
partenaires sociaux institutionnels reconnus par la loi comme les syndicats,
les associations de défense de consommateurs ou de l’environnement ou du
logement. En revanche, pour les autres intérêts (PME, entreprises non
représentées par le MEDEF ou la CGPME) toute approche des parlementaires est
considérée suspecte. Dans un environnement économique en mutation constant,
ces intérêts n’en sont pas moins légitimes que ceux d’organisations
syndicales ou patronales figées et dont la représentativité est contestée.
Un tel dialogue constant entre les pouvoirs publics et tout type d’acteurs
économiques est vital pour que ces deux mondes se comprennent et servent
ensemble leurs intérêts communs de développement et de croissance.
Dans cette optique, les perspectives d’encadrement et de régulation de cette
activité portée par des députés et le Président de l’AN sont les bienvenues.
A ce propos, le Président de l’Assemblée Nationale, Bernard Accoyer a
annoncé, fin mai 2009 que des décisions allaient être prises à l’été et
appliquées à la rentrée, notamment la signature d’un code de déontologie par
les lobbies fréquentant le Palais-Bourbon. En contrepartie, les lobbyistes
auront une possibilité d’accès dans un périmètre et selon un calendrier
précis.
Mais ces déclarations de bonne intention, de nature législative ou
réglementaire, ne sont pas suffisantes pour changer la perception négative
du lobbying et en faire enfin une activité reconnue largement et au service
de l’intérêt de tous. Pour y parvenir, ce ne sont pas les règles qu’il faut
modifier mais certains comportements.
A cet égard, on ne peut que saluer l’initiative symbolique d’e l’association
ANTICOR qui est partie en campagne pour que les députés rendent leurs
cadeaux. ANTICOR va même plus loin en proposant aux députés de vendre leurs
présents (caisses champagne, console wii…) sur ebay et de reverser
l’argent récolté au Trésor Public.
Depuis quelques années, de nouvelles initiatives voient le jour pour tenter
de renforcer le caractère éthique et professionnel de cette activité. Une
des démarches les plus pédagogiques est le concours du lobbying, qu’organise
depuis 2001 le cabinet Spin Partners et dont
la cérémonie de remise des prix
aura lieu le mercredi 17 juin 2009. Ce concours permet à des entreprises de
montrer, en toute transparence, la manière dont elles communiquent
intelligemment et de manière éthique avec les pouvoirs publics. Cette
manifestation se déroulera sous la Présidence de Patrice Debray, Député de
Haute-Saône et membre du groupe d’étude parlementaire Pouvoirs publics et
groupes d’intérêt.
Pour cette neuvième édition du concours du lobbying, cinq sujets ont été
proposés aux étudiants par des fédérations professionnelles qui partagent
les exigences de transparence et de déontologie des organisateurs en matière
de transparence et d’éthique :
· Les entreprises dans la campagne des élections européennes : discours et
positionnements des candidats en France.
· Contraindre la France à se conformer aux principes de la législation
européenne en matière de jeux d’argent dans les cafés.
· Quelle approche les partis politiques et les candidats ont-ils des enjeux
de la politique du médicament dans la perspective des élections européennes
de juin 2009 ?
· Impacts et conséquences de la crise financière sur les acteurs du crédit à
la consommation.
· Comment impulser une séparation des activités bancaires et immobilières au
niveau des institutions européennes ?
La perception du lobbying en France passe par ce lent travail de formation
des élites à une démarche professionnelle et à une vision claire de
l’utilisation de cet outil dans le cadre des relations entre les
institutions, le monde économique et la société civile.