ésident de la Cour des comptes Philippe Séguin, à l’Elysée, le 13 janvier 2009 (Photo : Gerard Cerles) |
[23/06/2009 18:22:44] PARIS (AFP) La crise n’explique que la moitié du déficit public colossal prévu cette année et une hausse des impôts est inévitable si la France ne réduit pas considérablement ses dépenses, avertit la Cour des Comptes dans un rapport sur les finances publiques publié mardi.
Une décision difficile à faire accepter à l’électorat et que Nicolas Sarkozy a d’ores et déjà balayée lundi, lors de son discours devant le Congrès.
Le déficit public de la France (Etat, sécurité sociale et collectivités locales) est passé de 2,7% du PIB en 2007 à 3,4% l’an dernier et il devrait atteindre 7% en 2009.
La crise économique “explique une part seulement” de cette dégradation, a insisté le premier président de la Cour, Philippe Séguin, en présentant à la presse le “rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques”, traditionnellement remis au Parlement avant le débat d’orientation budgétaire.
“Une autre part résulte de tendances de fond comme la baisse des impôts” ainsi que d’une maîtrise des dépenses très insuffisante, a-t-il souligné.
Au total, la Cour des Comptes estime le déficit chronique ou “structurel” de la France à environ 3,5% du PIB (contre 1,4% en moyenne dans la zone euro), ce qui “montre bien que l’essentiel du problème était fin 2008 d’origine non pas conjoncturelle mais structurelle”, selon M. Séguin.
“Des réformes beaucoup plus ambitieuses sont donc absolument nécessaires. Si la maîtrise des dépenses s’avérait insuffisante, une hausse des prélèvements obligatoires serait inévitable”, a-t-il prévenu.
Le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, a lui aussi jugé mardi que “dès que la croissance sera revenue, il faudra être très rigoureux sur l’évolution de la dépense et faire en sorte qu’elle augmente moins vite que les recettes”.
Privé de toute marge de manoeuvre budgétaire par le déficit record et la récession qui frappe la France (-3% prévu cette année), le président Nicolas Sarkozy a pourtant martelé lundi devant le Congrès son opposition à toute “politique de rigueur”.
Une politique qui retarderait la “sortie de crise” et aboutirait paradoxalement à une hausse du déficit, a assuré le chef de l’Etat.
Pour financer les “priorités” du gouvernement, M. Sarkozy a ainsi préféré annoncer un “emprunt national” dont le montant et les modalités restent à préciser.
Rédigé bien avant son discours, le rapport de la Cour des comptes n’évoque pas la question, mais vient tout de même rappeler que la France emprunte déjà tous les jours sur les marchés financiers, notamment pour financer son déficit.
En 2008, la dette a ainsi augmenté de 118 milliards d’euros et la France a payé plus de 54 milliards d’euros pour en payer les intérêts, c’est-à-dire plus que le produit de l’impôt sur le revenu. Cela représente environ 2.000 euros par an et par Français ayant un emploi, a souligné M. Séguin, craignant un “emballement de la dette”.
“C’est ce qu’on appelle l’effet boule de neige: les charges d’intérêt deviennent si importantes qu’il faut emprunter de plus en plus pour les payer et rembourser le capital”, a-t-il expliqué.
Fin 2008, la dette publique atteignait 1.327 milliards d’euros (68,1% du PIB), soit 47.400 euros par Français actif.
Si rien n’est fait, “les Français devront donc payer plus pour rembourser plus”, a résumé Philippe Séguin.
Selon des estimations de la Cour, à l’horizon 2012, le déficit serait encore supérieur à 6% et la dette approcherait 90% du PIB. Elle pourrait même atteindre 100% en 2018 et 200% avant 2040, d’après les projections faites par la Cour.