[12/07/2009 18:23:45] NEW YORK (AFP)
Logo de la banque UBS (Photo : Nicholas Ratzenboeck) |
Washington et Berne, qui s’affrontent depuis plusieurs mois sur le secret bancaire, ont demandé dimanche le report du procès d’UBS prévu lundi, dans l’espoir de négocier un accord alors que le fisc américain exige de connaître l’identité de 52.000 clients de la banque suisse.
Les deux gouvernements se donnent trois semaines pour négocier. Dans leur demande soumise conjointement avec UBS, ils réclament que le juge fédéral de Miami Alan Gold, chargé du dossier, reporte les audiences aux 3 et 4 août, à moins qu’un accord intervienne d’ici là.
Cette demande présentée in extremis dimanche intervient alors que les deux gouvernements ont durci leurs discours récemment et alors qu’UBS se trouve pris entre deux systèmes de droit aux logiques opposées.
Mercredi, le gouvernement suisse avait prévenu que, au cas où la justice trancherait en faveur du fisc, il serait prêt à prendre “toutes les mesures nécessaires”, y compris en procédant à la saisie de données, pour empêcher UBS de livrer des informations sur des clients en violation de la loi suisse protégeant le secret bancaire – pierre angulaire de la puissance financière helvétique.
Dimanche, le ministère américain de la Justice a rétorqué que le juge devait prendre sa décision indépendamment des menaces suisses. Il a fait valoir en substance qu’on ne pouvait pas permettre à un Etat étranger de “librement accorder une immunité à ses banques ou sociétés, y compris celles ayant d’importantes opérations aux Etats-Unis, pour leur permettre de ne pas se plier à des demandes valides des forces de l’ordre demandant des informations”.
La demande de report de procès est intervenue juste avant l’expiration d’un délai fixé par le juge pour que les autorités américaines clarifient les mesures qu’elles étaient prêtes à prendre face à la résistance helvétique.
Le gouvernement américain devait ainsi indiquer s’il envisageait de saisir ou de placer sous tutelle les biens d’UBS aux Etats-Unis.
Plusieurs juristes spécialistes du secteur bancaire craignent des répercussions profondes de cette affaire sur l’ensemble de la finance mondiale.
Jacob Frenkel, un ancien procureur américain spécialisé dans les fraudes, estime qu’une lourde amende ou une saisie des avoirs d’UBS décidée par les autorités américaines, pourrait “conduire toutes les institutions financières non américaines à remettre en question l’opportunité de poursuivre des activités sur le sol américain”.
UBS, qui vient de perdre sa place de numéro un mondial de la gestion de fortune, avait déjà accepté en février de verser 780 millions de dollars d’amende et de livrer à la justice les noms de quelques centaines de clients, poursuivis pour fraude.
Il s’agit cette fois d’une procédure civile lui demandant de révéler l’identité de 52.000 clients américains étant présumés disposer de comptes secrets, dont les comptes “offshore” pourraient receler quelque 14,8 milliards de dollars.
De leur côté les autorités suisses, devant les controverses croissantes suscitées par leur culture du secret bancaire, ont accepté de négocier des traités bilatéraux avec plusieurs pays afin de lutter contre l’évasion fiscale.
Mais ces dispositifs permettent un échange d’informations dans le cas d’une fraude avérée et ne prévoient pas d’échange de données automatique.
La ministre suisse de l’Economie Doris Leuthard a prévenu mercredi qu’un accord de ce type négocié avec les Etats-Unis risquait d’échouer si l’affaire UBS n’était pas réglée.
L’affaire a déjà eu un lourd coût pour UBS, qui compte plus d’employés aux Etats-Unis qu’en Suisse et voit déjà filer les capitaux, après avoir perdu quelque 19,1 milliards de dollars en raison de ses engagements dans les produits financiers à risque.