M. Slaheddine Dridi, directeur
général de l’information au sein du ministère de la Communication et des
Relations avec la Chambre des députés et la Chambre des conseillers, n’a pas
lâché prise pour dire que le discours scientifique en Tunisie n’arrive pas
encore à trouver bon entendant auprès du public, faute de bons communicateurs.
Pour un thème aussi perturbateur sur la téléphonie mobile et la santé,
l’information est toujours délaissée au profit de la rumeur, bien que ce sujet
ne soit pas encore tranché auprès des experts du monde entier.
Ce thème a été débattu, lors d’un séminaire qui a rassemblé les différents
représentants des autorités de tutelle au pôle El Ghazala, le 14 juillet 2009.
Risques probables…
Devant une assistance composée essentiellement de spécialistes du domaine entre
ingénieurs et médecins, M. Dridi a affirmé que les arguments manquent toujours
quand on parle de téléphonie mobile et de santé. “Comme les Normands le disent
toujours quand ils doutent d’une question : Peut-être bien que oui… Peut-être
bien que non ! Il semble qu’il soit le cas sur cette question. Le champ
argumentaire est à revoir. Il faut prendre en compte qu’on s’adresse à 8
millions d’utilisateurs qui augmentent de jour en jour. Les spécialistes parlent
toujours de risques probables. Mais faut-il expliquer au public l’origine de ce
doute. J’appelle les intervenants à nous donner une réponse tunisienne à ce
questionnement et mettre un terme à ce doute”, a-t-il interpellé l’assistance.
Ce que M. Dridi a évoqué, en tant que communicateur, se trouve au cœur de
l’amalgame qui perdure encore sur les risques des téléphones mobiles sur la
santé humaine. Cette question a été soulevée depuis l’année 2000, alors que les
médias européens en discutaient. Des observations qui ont été reprises par les
médias tunisiens et ont évoqué un débat qui ne finit pas encore, mettant en
doute les utilisateurs des téléphones mobiles. On parlait, donc, de sa relation
avec les maux de tête et les tumeurs cancéreuses, de son usage néfaste dans
certains lieux comme les avions et les hôpitaux, sans qu’un argumentaire bien
construit et persuasif ne soit donné.
Absence de preuves…
Disons que la question ne s’est pas clarifiée autant, de point de vue
scientifique puisqu’on parle jusqu’à aujourd’hui de risques probables. «Depuis
quarante ou cinquante ans que le téléphone mobile existe, aucune étude n’a
réussi à prouver qu’il a un impact clair sur le corps humain. Le Centre
International de Recherche sur le Cancer (CICR) a lancé depuis 1996 une étude
internationale en vue de rassembler toutes les recherches par pays. On estimait
à l’époque que l’étude donnerait ses résultats au bout de quatre ans ; mais ce
n’est pas le cas. Les recherches entamées ne sont toujours pas concluantes»,
nous a expliqué Mme Alya Mahjoub Zarrouk, directrice générale de l’Agence
Nationale de Contrôle Sanitaire et Environnemental des Produits (ANCSEP). Elle
nous précise, néanmoins, que certaines ondes peuvent poser problème dans
certains lieux, essentiellement dans les avions et les hôpitaux. Il s’agit
essentiellement d’un impact sur la machine en question et non sur le corps
humain. Une interférence qui peut être à l’origine de dysfonctionnement au
niveau de l’avion ou au niveau des équipements médicaux. «S’il y a un impact, il
ne pourra être identifiable qu’à long terme. Il nous faudra encore du temps pour
réaliser son existence et son ampleur», a ajouté Mme Zarrouk.
Actuellement, les experts internationaux de l’Organisation Internationale de la
Santé n’ont rien pu prouver.
La prévention et la sensibilisation…
Mais ceci signifie-t-il pour autant oublier cette question d’impact ? «Il s’agit
maintenant de miser sur la prévention et la sensibilisation. On doit
sensibiliser les gens quant à une utilisation modérée des téléphones mobiles», a
affirmé Mme Zarrouk. Puisque même si le risque n’est pas prouvé, il est encore
là surtout avec la multiplication des antennes-relais qui sont devenues une
source de frustration pour certaines personnes à proximité et la multiplication
des utilisateurs des téléphones mobiles, devenus un moyen incontestable de
communication.
Cette prévention ne pourra se faire inévitablement sans la vulgarisation de
l’information auprès du public, et en l’occurrence (et à premier bord) auprès
des médias. Le discours techniciste ne pourra être le bon chemin pour trouver de
bons entendant. «On devrait plutôt mettre à jour les capacités des médecins et
des ingénieurs qui détiennent le monopole du discours, et les avertir qu’ils
s’adressent à un champ de masse et non pas à un champ d’expertise. Pour les
journalistes et les communicateurs, il s’agit d’une mise à niveau de leurs
connaissances au profit d’une information juste et fiable», a indiqué M. Dridi.