«L’e-commerce
est devenu une véritable locomotive de la consommation, et ce rôle est
encore plus marquant dans le contexte actuel de crise puisqu’il croît
toujours de 25% alors que le commerce en magasin ne progresse plus» (Rapport
sur le commerce en ligne en France et en Europe, 2007)
Il semble clair
que, dans les prochaines années, le commerce en ligne va devenir un
complément indispensable aux magasins physiques des grandes marques et
enseignes. Les spécialistes du secteur estiment que les achats sur Internet
devraient représenter 20 % du commerce global d’ici à 2015.
Néanmoins, même
si certaines marques pionnières n’ont pas hésité à créer leurs boutiques en
ligne ou «e-boutiques», les marques à forte notoriété (appartenant
ou non au secteur du luxe) se montrent encore réticentes à ouvrir un point
de vente sur le Web. Cela s’explique sans doute par le fait que ces
entreprises ne disposent pas toujours, en interne, de l’éventail de
ressources permettant de créer et de gérer une boutique en ligne.
C’est dans ce
contexte que de jeunes sociétés innovantes se sont créées afin d’assurer le
développement et la gestion de sites marchands à destination des grandes
marques, sous la forme d’un partenariat pluriannuel.
Dans le cadre de cette délégation, ces sociétés offrent à une marque
désireuse de créer une boutique en ligne une expertise globale : création de
l’e-boutique, e-merchandising, e-marketing, logistique, service client,
service de paiement et gestion du back office.
Cela n’est pas sans poser des problèmes juridiques complexes et variés. Les
sites d’e-commerce délégués sont en effet soumis à un ensemble de règles
juridiques développées, au nombre desquelles figurent notamment la
réglementation particulière de la vente à distance, la réglementation issue
du Code de commerce, celle issue de la loi de 1978 sur les données
personnelles
(loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers
et aux libertés modifiée par la loi n°2004-801 du 6 août 2004)et enfin, celle édictée par la LCEN
(loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie
numérique).
Toute entreprise
désireuse de créer une e-boutique déléguée devra en premier lieu réaliser un
audit juridique de l’existant, notamment concernant ses
éventuels contrats de distribution, exclusivités, ses marques… Lors de la
vie du site, une veille juridique devra être réalisée
périodiquement.
Lorsqu’une
marque ou une enseigne recourt à l’e-commerce délégué, elle doit distinguer
deux parties dans son processus de création de son site marchand. La
première, souvent nommée «back-Web», renvoie à
l’ensemble des démarches préalables et indispensables à la mise en place du
site Web : nommage, contrats avec les différents partenaires, déclarations
légales éventuelles, sécurité. La seconde partie, souvent dénommée «front-Web», concerne quant à elle tous les aspects
touchant à la visibilité du site : la validité des contenus (propriété
intellectuelle, respect du droit de la consommation), les relations avec la
clientèle ou encore le respect de la vie privée.
1. Les démarches nécessaires dans le cadre du back-Web
Dans le cadre de
la rédaction d’un contrat de délégation d’e-commerce, il est important de
prévoir avec la société propriétaire de la marque les étapes suivantes : les
campagnes de promotions et de soldes, les ventes privées ou encore les
programmes de parrainage etc.
Il faut avoir à
l’esprit que ces divers programmes sont soumis aux dispositions du Code de
la consommation, du Code de commerce, ou encore à la
loi relative à la loyauté et l’équilibre des relations commerciales du
1er juillet 1996. Tout n’est donc pas permis, les pièges peuvent être
nombreux.
A titre
d’exemple, la vente avec prime est soumise aux dispositions des articles L.
121-35 et L. 121-8 du Code de la consommation. Ces articles prévoient
notamment que la valeur maximale des échantillons, objets et services
offerts dans le cadre d’une vente avec prime est calculée par rapport au
prix de vente net toutes taxes comprises des biens ou services faisant
l’objet de la vente. Cette valeur maximale ne doit pas dépasser 7% si la
valeur de l’objet est inférieure ou égale à 80 euros et de 5 euros plus 1%
du prix de vente si ce dernier est supérieur à 80 euros.
Il convient
enfin de prévoir la mise en place d’un modus operandi entre les
équipes de la grande marque et l’équipe du site d’e-commerce délégué. Ce
modus operandi permettra, par exemple, la collaboration des équipes de
design de la marque et de son prestataire afin d’élaborer une maquette du
site marchand, la sélection des différents produits qui seront
commercialisés en ligne ou encore la mise en place du processus logistique.
2. Les démarches nécessaires dans le cadre du front-Web
Le front-Web
désigne les démarches devant être réalisées afin de gérer au mieux les
relations entre le site d’e-commerce délégué et sa clientèle. Afin d’assurer
au mieux la protection de l’internaute consommateur, le législateur a mis en
place un certain nombre d’obligations à la charge du créateur d’une boutique
d’e-commerce, comme par exemple l’obligation générale d’information prévue
par
l’article L. 111-1 du Code de la consommation.
A cette
obligation générale d’information s’ajoute les mentions prévues à
l’article L. 121-18 du Code de la consommation, parmi lesquelles on peut
relever les obligations de faire figurer le nom du vendeur du produit ou du
prestataire de services, les frais de livraison, les modalités de paiement,
de livraison ou d’exécution.
L’article R. 123-237 du Code de commerce prévoit en outre que tout site
de commerce électronique doit faire figurer le numéro unique
d’identification de l’entreprise délivré conformément à l’article R.
123-235, la mention RCS suivie du nom de la ville où se trouve le greffe où
elle est immatriculée, et enfin, le lieu du siège social.
Comme tout
service de communications audiovisuelles, le site d’e-commerce délégué est
en outre soumis à la LCEN, et plus particulièrement son
article 6 qui prévoit que doivent figurer sur le site le nom du
directeur ou du codirecteur de la publication ainsi que les informations
légales relatives à l’hébergeur du site.
Les mentions
relatives aux données personnelles recueillies par le biais du site de
e-commerce délégué (noms, adresse, coordonnées…) doivent faire l’objet d’une
procédure auprès de la CNIL (norme simplifiée)
Enfin,
l’article L. 111-1 du Code de la Consommation prévoit que les
e-commerçants ont pour obligation de faire figurer sur leurs sites les
Conditions Générales de Vente (CGV). Une attention toute particulière doit
par ailleurs être apportée à la rédaction des clauses intégrées à ces CGV.
En effet, certaines de ces clauses peuvent rapidement devenir obsolètes,
voire contraires au droit positif.
Les CGV doivent
notamment reprendre les mentions relatives aux conditions de vente et de
paiement, les tarifs et les réductions éventuelles, de même que les
modalités d’application des garanties éventuelles.
Enfin, dans le
cadre des ventes à distance, la protection du consommateur a dicté certaines
règles au législateur. La plus connue d’entre elles est bien sûr l’existence
d’un délai de rétractation de sept jours
(art. L. 121-20 du Code de la Consommation) et
certaines mentions devenues obligatoires par l’application de la loi Chatel
(loi n°2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence
au service des consommateurs), comme notamment la mention exacte
des délais de livraison, quel que soit le montant du contrat, mais aussi les
modalités de remboursement, le cas échéant, ou encore les modalités
d’exercice du droit de rétractation.
En conclusion,
force est de constater que l’e-commerce délégué apparaît comme le complément
de plus en plus indispensable des réseaux classiques de distribution des
grandes marques.
Cet essor ne
doit pas faire oublier les impératifs juridiques qui devront être identifiés
et sécurisés
Source:
http://www.agoravox.fr