Après l’euphorie, l’industrie solaire allemande redoute la curée

photo_1250585481224-1-1.jpg
érienne de la plus grande installation solaire allemande, le 17 août 2009 à Lieberose (Photo : Michael Urban)

[18/08/2009 09:02:00] BERLIN (AFP) Après des années de croissance euphorique, l’industrie solaire allemande redoute une curée qui ne devrait laisser que peu de survivants face à la féroce concurrence chinoise.

Il n’était besoin lundi que d’observer le TecDax, cet indice technologique de la Bourse de Francfort, surnommé “SunDax” en raison de la domination des valeurs de l’énergie solaire.

Q-Cells, Conergy, Solon, Solarworld: tous les grands fabricants de cellules bleutées étaient dans le rouge. Depuis leurs records boursiers affichés début 2008, certaines actions ont dégringolé de plus de 30%.

Une correction inévitable pour de nombreux experts, alors que le marché mondial des cellules solaires est engorgé.

Etkan Aycicek, spécialiste du secteur pour la banque publique LBBW, a, par exemple, intitulé sa dernière grande analyse: “Darwinisme solaire: seuls les meilleurs survivront”.

photo_1250585775107-1-1.jpg
Une installation solaire du fabricant allemand Q-Cells (Photo : Barbara Sax)

La crise de l’industrie solaire frappe à tous les niveaux en Allemagne, où le nombre d’entreprises du secteur a explosé pour atteindre actuellement la dizaine de milliers. Au plus bas de l’échelle, de modestes entreprises comme Sunline et ses 78 salariés, qui a déposé son bilan le 26 mai.

Et au plus haut, Q-Cells, 2.600 salariés, qui a annoncé la semaine dernière une perte de 700 millions d’euros au premier semestre.

Un autre poids lourd allemand, Ersol, propriété du géant de l’équipement automobile Bosch, a connu un effondrement de 43,9% de son chiffre d’affaires semestriel.

Derrière ces chiffres catastrophiques, un responsable est montré du doigt: la Chine, où les coûts de production sont inférieurs d’un tiers, selon une étude de la banque UBS citée par le Financial Times Deutschland.

Les concurrents chinois bénéficient non seulement d’une main-d’oeuvre bon marché, mais aussi de meilleurs prix pour le silicium, la matière première essentielle du secteur, de moins en moins coûteuse.

Beaucoup de producteurs allemands sont, eux, prisonniers de contrats à long terme prévoyant des prix élevés, car passés avec leurs fournisseurs il y a quelques années, en situation de pénurie de silicium.

Ainsi, l’Allemand Conergy ne cache pas que sa survie dépendra de sa capacité à renégocier un contrat géant avec l’un de ses fournisseurs, contre lequel il est en procès aux Etats-Unis.

photo_1250585680839-1-1.jpg
érienne montrant des personnes travaillant sur la plus grande installation solaire allemande, le 14 août 2009 à Lieberose (Photo : Michael Urban)

La concurrence chinoise est d’autant plus rude que les producteurs allemands, dépendants à 46% des exportations, selon la Fédération du secteur (BSW), font aussi face au tarissement de certains marchés.

L’industrie solaire allemande a, par exemple, mal digéré la décision de l’Espagne, l’un de ses principaux débouchés, de fermer le robinet des subventions. Madrid a été débordé par l’installation massive de champs de panneaux solaires sur son sol, qui lui ont coûté très cher.

Un problème que rencontre aussi le gouvernement allemand: l’hebdomadaire Die Zeit a calculé qu’au rythme actuel les subventions à l’électricité solaire, qui représente aujourd’hui moins de 1% de l’électricité consommée en Allemagne, pourraient coûter bientôt 77 milliards d’euros à Berlin.

Certains fabricants allemands ont déjà senti le vent tourner. Q-Cells, annoncé par plusieurs experts comme l’un des rares survivants de l’hécatombe, a décidé de fermer des chaînes de production jugées trop coûteuses à son siège, au coeur d’une région sinistrée d’ex-RDA pompeusement rebaptisée “Solar Valley”.

Alors que 500 emplois seront supprimés en Allemagne, Q-Cells construit une usine en Malaisie et vient de fonder une société commune en Chine.