[10/09/2009 18:51:12] PARIS (AFP)
élécom (Photo : Damien Meyer) |
Les salariés de France Télécom se sont mobilisés jeudi contre leurs conditions de travail et les méthodes de management, à l’origine, selon eux, d’une série de suicides, alors que la direction a proposé de suspendre provisoirement les mobilités au sein du groupe.
Un nouvel acte désespéré d’un salarié s’est ajouté mercredi à une série de six suicides durant l’été. Un technicien de Troyes s’est planté un couteau dans l’abdomen lors d’une réunion après avoir appris la suppression de son poste.
Ses jours ne sont pas en danger mais son geste a ravivé le malaise à France télécom, où depuis février 2008, les syndicats ont dénombré 22 suicides de salariés, tous des hommes, pour environ 100.000 salariés en France (dont deux tiers d’hommes).
Ce taux est comparable à celui de l’ensemble de la population (17,1 pour 100.000 habitants en 2006, selon l’Inserm), ou à celui des hommes de 35 à 65 ans (entre 30 à 40 pour 100.000).
La direction a annoncé jeudi la suspension jusqu’au 31 octobre des “mobilités des personnes concernées par des projets de réorganisation”, pour “réexaminer les conditions de leur mise en oeuvre”.
Elle prévoit aussi l’ouverture de négociations sur le stress dès le 18 septembre, et le recrutement de 100 DRH de proximité et de médecins du travail supplémentaires.
C’est le “résultat de la mobilisation”, pour la CGT, qui exige l’arrêt total des restructurations.
Le DRH du groupe, Olivier Barberot, avait aussi annoncé un peu plus tôt des formations à “détecter les signaux de faiblesse psychologique”, pour 20.000 cadres.
Selon lui, les suicides ne sont “pas en augmentation”: 28 en 2000 et 29 en 2002.
La dernière victime, un technicien de Lannion (Côtes-d’Armor), s’est donné la mort fin août à son domicile. Les syndicats ont accusé notamment les méthodes de management.
Depuis plusieurs années, ils déplorent le malaise au travail et la pression sur les salariés, notamment pour les inciter à quitter l’entreprise, dans le cadre d’un plan de départs volontaires, qui a permis en trois ans, de se séparer de 22.000 salariés (pour 5.000 embauches).
Selon les syndicats, les fonctionnaires (70% des effectifs) sont les plus exposés, tiraillés depuis la privatisation de France Télécom en 1997, entre leur idéal de service public et la politique de rentabilité d’un groupe désormais coté au CAC40.
“Tous les salariés reçoivent régulièrement par mail des propositions pour quitter l’entreprise, et les managers ont des objectifs, qui se répercutent sur leur paye, pour inciter les salariés à partir”, a expliqué Philippe Meric (Sud), dont le syndicat, avec FO et la CGT, appellaient à la grève ce jour.
Le taux de grévistes était de 13,70% à 12H00, selon la direction.
D’autres syndicats ont déposé des préavis locaux, et plusieurs rassemblements étaient organisés, comme à Paris, Besançon, Nice, Montpellier, Lille, Bordeaux, Rennes ou Nancy.
Une cinquantaine de salariés ont manifesté à Troyes, où “le sentiment de révolte est profond”, a expliqué Régis Pigre (Sud).
A Marseille, une centaine de salariés se sont retrouvés là où travaillait un de leurs collègues qui s’est suicidé en juillet. Cet agent de 51 ans, avait mis en cause dans une lettre la “surcharge de travail” et le “management par la terreur”.
“Il faut avant tout remettre de l’humanité dans les services”, a estimé Patrick Diochet (CFTC), tandis que la CFE-CGC a demandé “des pré-retraites à partir de 57 ans”, et l’arrêt de la mobilité forcée “à partir de 50 ans”. François Chérèque (CFDT) a critiqué une direction “incapable d’évoluer dans son mode de management”.