Le “oui” à Lisbonne, une bouée de sauvetage pour l’Irlande en crise

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étaire d’Etat irlandais aux Affaires européennes Dick Roche, fête le oui au traité de Lisbonne, le 3 octobre 2009 à Dublin. (Photo : Peter Muhly)

[04/10/2009 12:06:50] DUBLIN (AFP) Les Irlandais ont dit massivement “oui” vendredi au traité de Lisbonne dans l’espoir que l’UE les aidera à sortir de la crise économique qui les frappe, offrant par ricochet un ballon d’oxygène inespéré au gouvernement de Brian Cowen à l’impopularité record.

67,13% de “oui”: jamais depuis le référendum sur Maastricht, en 1992, les Irlandais n’avaient aussi nettement approuvé un traité européen.

Mais surtout, ils l’ont fait en changeant radicalement d’avis: plus de 20% des électeurs ont basculé du “non” au “oui” par rapport au 12 juin 2008, quand ils avaient rejeté Lisbonne à 53,4% lors d’un premier vote sur le texte.

C’est que, en l’espace de quinze mois, une toute autre Irlande est née.

“L’an dernier, les électeurs n’avaient fait que commencer à comprendre que la situation économique était en train de changer. Cette année, la récession a complètement modifié le paysage politique”, écrit le Sunday Business Post. Selon les prévisions du gouvernement, le chômage devrait tripler d’ici à la fin de l’année par rapport au printemps 2008.

“Pourquoi avons-nous voté oui? It’s the economy, stupid” (C’est l’économie, imbécile) : titre le Sunday Tribune, reprenant le célèbre slogan de campagne de Bill Clinton lors de l’élection présidentielle américaine de 1992. “La récession a été la question primordiale sous-tendant ce vote. La peur a été le facteur-clef”, explique le journal.

Peur que dire “non” fasse fuir les investisseurs étrangers. Peur que l’emploi s’en ressente encore plus. “Voter oui pour sauver l’emploi”, n’a cessé de clamer le camp du “oui”, brandissant la menace d’un “cataclysme économique”, selon le mot du Sunday Business Post.

“Ce n’est peut-être pas la plus belle manière de gagner des voix”, reconnaît le Tribune, mais ça s’est avéré efficace.

Pour le gouvernement du Premier ministre Brian Cowen, la victoire est ample: il a réussi à imposer un deuxième référendum, en dépit de la vive opposition de la population, et en le gagnant nettement, il évite la crise politique et se maintient au pouvoir malgré une impopularité historique.

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à Dublin, le 3 octobre 2009 (Photo : Peter Muhly)

Le répit s’annonce toutefois de courte durée. Les partis d’opposition qui ont soutenu le “oui” aux côtés du gouvernement ont mis fin à la trève dès l’annonce des résultats du référendum.

“La population veut que le Fianna Fail (parti au pouvoir) s’en aille. Ce dont le pays a besoin, et de manière urgente, c’est de changer de gouvernement”, a déclaré samedi Eamon Gilmore, leader du parti travailliste crédité pour la poussée du “oui” au sein des couches populaires.

“On a mis notre mécontement de côté mais pas pour longtemps”, titre en Une le Sunday Independent.

Dès lundi, le Fianna Fail doit entamer des négociations avec son allié au gouvernement, les Verts, dans l’espoir de lui arracher son soutien au nouveau programme d’austérité très impopulaire que Dublin s’apprête à annoncer.

Le gouvernement veut trouver quatre milliards d’euros d’économies dans le prochain budget qui doit être bouclé d’ici à décembre. Il entend réduire la paie des fonctionnaires et décréter de nouveaux impôts.

Les syndicats ont déjà évoqué la menace de grèves dans les jours qui viennent, ainsi qu’une manifestation aussi massive que celle qui avait déjà réuni 120.000 personnes à Dublin en février contre les coupes budgétaires.

“Le oui massif à Lisbonne n’est que le calme avant la tempête”, résume le Sunday Independent.