Avtovaz : le gouvernement russe se débat contre le spectre d’une faillite

photo_1255615372335-1-1.jpg
ège du constructeur Avtovaz, le 3 août 2009

[15/10/2009 14:04:57] MOSCOU (AFP) Le gouvernement russe s’est hâté jeudi de renouveler son appui au constructeur automobile en difficultés Avtovaz, après la parution d’un document embarrassant suggérant qu’il le considère comme un puits sans fond, et que sa coopération avec le français Renault est stérile.

D’ici au 10 novembre, de nouvelles propositions d’aide à Avtovaz seront présentées au Premier ministre Vladimir Poutine, a déclaré jeudi à l’AFP le porte-parole de ce dernier, Dmitri Peskov.

Il réagissait à la publication par le quotidien Kommersant d’extraits d’une lettre adressée il y a deux semaines par le vice-ministre de l’Industrie, Andreï Dementiev, au gouvernement et qui pourrait avoir des conséquences dramatiques pour l’usine géante d’Avtovaz à Togliatti (1.000 km au sud-est de Moscou).

Le vice-ministre y affirmait que le constructeur, dont Renault détient 25%, est littéralement criblé de dettes (76,3 milliards de roubles soit 1,74 milliard d’euros attendus début 2010).

Restructurer de telles dettes est “impossible dans les conditions du marché”, soulignait-il, ce qui signifie qu’Avtovaz remplit “toutes les conditions prévues par la loi pour une faillite”. Dans ce cas, l’aide financière apportée par le gouvernement ne sert à rien, estimait-il en substance.

Il suggérait aussi de réduire les effectifs d’Avtovaz à 55.000 personnes, contre 102.000 actuellement, soit bien plus que ce qui est actuellement à l’étude.

Le groupe a évoqué la suppression de 27.600 emplois avant de faire apparemment marche arrière sous la pression du gouvernemement. Il s’en tient pour l’heure à la réduction de 5.000 postes annoncée dans un communiqué à la-septembre.

Enfin le vice-ministre émettait de sérieux doutes sur l’efficacité de la coopération prévue entre Avtovaz et Renault, alors que Vladimir Poutine a demandé avec insistance à celui-ci de participer au sauvetage du constructeur russe.

Renault, qui a acquis en février 2008 un quart du capital d’Avtovaz pour un milliard de dollars, “ne répond pas aux besoins de l’entreprise” en matière de nouveaux modèles alors que ceux-ci sont “essentiels pour assurer une production efficace et rentable”, souligne la lettre du ministre.

De telles informations sont susceptibles d’alimenter les tensions à Togliatti, ville qui dépend quasi-entièrement de l’industrie automobile, et où l’inquiétude des habitants est palpable. Une manifestation contre les suppressions d’emplois est prévue samedi.

Le porte-parole de M. Poutine s’est efforcé de minimiser la portée de la lettre de M. Dementiev.

“Cette lettre date d’il y a longtemps. Après, la question a été étudiée entre différents ministères, dont celui de l’Industrie. La position du ministère a changé depuis”, a-t-il expliqué.

De son côté, une porte-parole de Renault, interrogée à Paris par l’AFP, a déclaré: “Nous n’avons pas connaissance d’une situation de faillite pour Avtovaz”.

Elle a également assuré que Renault “travaille de très près avec Avtovaz à tous les niveaux”. “On étudie toutes les synergies possibles à mettre en place pour le court terme et après, assurer la croissance sur le long terme d’Avtovaz et permettre à Renault et Nissan d’accroître leur présence en Russie”, a-t-elle dit.

Mais Boris Kagarlitsky, directeur de l’Institut des études sur la mondialisation, ne fait pas mystère de son pessimisme dans une tribune parue dans le quotidien Moscow Times jeudi. L’usine de Togliatti, dont les Jigoulis suscitaient jadis “fierté et envie” en URSS, est aujourd’hui “à l’agonie”, estime-t-il.