[22/10/2009 16:05:23] PARIS (AFP)
L’ex-patron de Vivendi Jean-Marie Messier quitte le tribunal de Manhattan le 5 octobre 2009. (Photo : Don Emmert) |
En plein procès à New York qui pourrait contraindre Vivendi Universal à verser des milliards de dollars, son ancien patron Jean-Marie Messier et six anciens hauts responsables ont été renvoyés en correctionnelle à Paris pour des malversations présumées au sein du groupe.
Dans son ordonnance du 16 octobre motivant sa décision contraire au réquisitoire de non-lieu général délivré par le parquet, le juge Jean-Marie d’Huy estime que Jean-Marie Messier doit être jugé des chefs de diffusion d’informations fausses ou trompeuses, de manipulation de cours et d’abus de biens sociaux, passibles de cinq ans de prison et de fortes amendes, a-t-on appris jeudi de sources proches du dossier.
L’ancien pdg de VU est notamment soupçonné d’avoir diffusé au public des “informations fausses ou trompeuses” sur le niveau d’endettement du groupe lors de la fusion entre Canal+ et Seagram en 2001, qui avait fait de Vivendi Universal (VU) le numéro deux mondial de la communication et des médias.
Le juge considère également que M. Messier a commis un abus de bien social pour s’être fait “octroyer à son profit personnel, sans approbation préalable du conseil d’administration”, un parachute doré de 20,5 millions d’euros, des “avantages manifestement excessifs au regard de la situation à cette période de Vivendi Universal”, selon l’ordonnance que l’AFP a consultée.
Alors qu’il développait une communication euphorique sur sa situation au début des années 2000, VU s’était retrouvé assommé de dettes et confronté à une crise de liquidités et de défiance des marchés financiers.
M. Messier, qui se surnommait lui-même “J2M” et avait été affublé de celui de “maître du monde”, avait été contraint de démissionner en juillet 2002.
Le juge renvoie également devant le tribunal l’homme d’affaires canadien Edgar Bronfman Jr, ancien patron de Seagream devenu vice-président exécutif de VU, pour délit d’initiés. Il avait vendu des stock-options en janvier 2002 alors qu’il avait “connaissance de faits non communiqués au public”, selon l’ordonnance.
“Nous sommes particulièrement déçus, le parquet avait demandé un non-lieu qui paraissait justifié, en particulier concernant M. Bronfman, dont l’implication n’est pas établie”, a estimé son avocat Me Georges Kiejman.
Est également renvoyé en correctionnelle l’ancien directeur financier de VU, Guillaume Hannezo pour diffusion d’informations fausses ou trompeuses, complicité de manipulation de cours et délit d’initié.
L’ancien directeur général Eric Licoys est pour sa part renvoyé pour abus de biens sociaux pour le parachute doré d’une vingtaine de millions d’euros qu’il a reçu.
Le juge a également renvoyé pour manipulation de cours l’ancien trésorier Hubert Dupont Lhotelain, l’ancien trésorier adjoint François Blondet et un ancien responsable bancaire Philippe Guez.
L’Association des Petits Porteurs Actifs (Appac), représentant les actionnaires minoritaires, qui avait déposé la plainte à l’origine de l’enquête s’est pour sa part félicitée de la décision du juge d’instruction.
“MM. Messier et Hannezo ont donné de fausses informations, ils doivent désormais en répondre devant la justice. Les actionnaires ont investi dans un groupe pour tirer profit du potentiel de croissance”, a affirmé son président Didier Cornardeau.
Selon lui, “la justice ne pouvait agir autrement alors que Vivendi est en procès aux Etats-Unis”.
Depuis début octobre, le groupe et plusieurs de ses anciens dirigeants, dont M. Messier, font l’objet d’un procès en action collective (class action) à New York pour les mêmes faits.
S’ils étaient reconnus coupables, ils pourraient être amenés à dédommager les milliers d’actionnaires pénalisés par l’effondrement du titre.