à la Foire des millionnaires, le 23 octobre 2009 à Moscou (Photo : Dmitry Kostyukov) |
[24/10/2009 19:39:54] MOSCOU (AFP) “Toute l’industrie du luxe est touchée par la crise. Le nombre de participants est en baisse de 30%”: seul à côté de son yacht, Oleg Marakevitch résume bien le blues à la Foire des millionnaires qui s’est ouverte vendredi à Moscou.
A l’entrée du Manège, un bâtiment historique du XIXe siècle situé près du Kremlin, le champagne et quelques voitures de luxe sont au rendez-vous de la soirée inaugurale très glamour, mais l’ambiance n’est pas à la fête chez les exposants à l’affût des nouveaux riches russes.
“En l’espace d’un an, mon chiffre d’affaires a baissé de 40%”, se plaint Mark Tuck, responsable de Paradise Property, une société qui vend des villas à Bali et dont près de la moitié de la clientèle est russe.
“Tout le monde a été touché par la crise”, y compris les plus riches, dit-il.
Même son de cloche au stand d’Ancon Estates, une société immobilière qui propose des résidences de luxe à Marbella (Espagne) et en République dominicaine, dont les prix oscillent entre 3,5 et 8,4 millions d’euros.
“C’est dur la crise”, avoue l’un de ses responsables, Francisco Galvan. “Cette année, nous avons vendu seulement deux villas, contre six en 2008”, dit-il en espérant redresser la situation avec la Russie, “un marché intéressant”.
Signe que la crise affecte aussi les riches et très riches russes frappés de plein fouet par l’effondrement des marchés mondiaux, la Foire se déroule cette année dans un bâtiment beaucoup moins spacieux que l’immense centre d’exposition Crocus-expo où elle avait lieu l’an passé.
Et les grandes marques automobiles prestigieuses comme Rolls Royce et Bentley, symboles du luxe, de même que les hélicoptères Agusta, prisés par les millionnaires russes, sont absents.
A l’entrée, une limousine géante — 13,5 mètres de long, 1,8 mètre de haut, fauteuils en cuir et bar — attire nombre de visiteurs fascinés par son intérieur VIP, sur fond de musique parfois assourdissante dans le hall d’exposition.
L’un des responsables de la société Absolut Korona (“Couronne absolue”), Andreï Moliakov, avoue avoir baissé son tarif de location de 10% à 5.000 roubles l’heure (115 euros) en raison de la crise.
D’autres exposants, allergiques au mot crise, reconnaissent toutefois à mots couverts que leurs affaires en souffrent aussi: “jusque-là ça va, voyons les choses de façon positive”, confie Nasser Al-Hai, président de la société automobile Ultimate Motors, basée à Dubaï.
Réaction identique au stand de Zai, où sont exposés des skis fabriqués à la main allant de 3.700 à 8.500 dollars la paire. “Moi je ne parle pas de crise, je pense positif”, sourit le responsable de cette société suisse, qui se vante d’avoir “beaucoup de clients russes, dont certains du Kremlin”.
Parmi les rares autres nouveautés de la foire figure un vélo électrique “extravagant”, qui peut rouler jusqu’à 80 km/h avec une batterie d’une autonomie de deux heures, présenté pour la première fois au public par la société allemande PG Bikes.
“C’est la Bentley de la bicyclette”, explique son jeune concepteur. “Elle est écologique, rapide, et design. C’est l’idéal pour la ville et pour se montrer, comme l’aiment les Russes”, dit-il en espérant trouver de nombreux acheteurs à la foire, qui fermera ses portes dimanche.
Alors que l’alcool coulait à flots, la soirée inaugurale a été brièvement perturbée par des membres du mouvement d’opposition de l’ex-champion du monde d’échecs Garry Kasparov, L’autre Russie, qui ont crié des slogans hostiles à la tenue de cette foire, “Soyez maudits!”.
A l’extérieur du bâtiment, une quinzaine de membres du Front de gauche ont également protesté samedi, notamment en déployant une banderole: “Votre luxe signifie la misère pour des millions de gens!”.