ï le 30 octobre 2009. (Photo : Philippe Lopez) |
[07/11/2009 09:05:44] PARIS (AFP) Bis repetita? Deux ans après l’effondrement des “subprime” américains, de nouvelles “bulles” financières se forment dans les pays émergents –Chine en tête– menaçant à terme la stabilité de l’économie mondiale.
Cette fois encore, le rôle de Cassandre échoit à Nouriel Roubini, l’expert qui avait, le premier, prédit la crise des crédits immobiliers à risque. Des plateaux de télévision aux colonnes des journaux, le “Docteur Catastrophe” de l’économie mondiale martèle la même antienne: “Nous assistons à la formation d’une bulle financière à très grand risque”.
Et il n’est pas seul. Le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale, l’OCDE et une agence de l’ONU, la Cnuced, mettent en garde contre les effets des mouvements spéculatifs, irrigués par les torrents de liquidités mis en circulation par les principales banques centrales, et notamment la Réserve fédérale américaine (Fed).
Outre-Atlantique, les taux d’intérêt avoisinent zéro, rendant quasi-nul le “coût” du dollar. Résultat: les investisseurs achètent des billets verts pour les replacer sur des marchés plus rémunérateurs et empocher la culbute, selon la technique du “carry trade”. “Il y a là une incitation à prendre des risques”, souligne Eric Chaney, chef économiste d’Axa.
égociant en or à Bangkok le 14 octobre 2009. (Photo : Pornchai Kittiwongsakul) |
Depuis janvier, l’afflux de capitaux a fait ainsi flamber certains métaux (niveau record pour l’or, +100% pour le cuivre), dopé certaines monnaies (+35% pour le dollar australien par rapport au billet vert) et des places financières émergentes (+72% au Brésil, +51% à Hong Kong). Le secteur immobilier chinois connaît lui un début de surchauffe, de l’aveu même des autorités de Pékin.
“Le grand danger c’est que ce qui augmente fortement (actions et immobilier) peut s’effondrer. D’importants investisseurs pourraient être pris à contre-pied”, a indiqué à l’AFP Barry Eichengreen, professeur à Berkeley (Etats-Unis).
Selon la nouvelle “prophétie Roubini”, quand la Fed remontera ses taux, les investisseurs retireront brutalement leurs fonds des marchés émergents pour rembourser leurs emprunts en dollar. “On sait ce qui se passe quand une bulle éclate mais maintenant la bulle n’est plus seulement américaine, elle est mondiale”, a-t-il déclaré sur la chaîne américaine CNBC.
“Les prix de certains actifs pourraient s’effondrer”, confie à l’AFP un haut responsable de la Banque mondiale, sous couvert de l’anonymat.
L’ampleur du phénomène fait toutefois débat. Dans les pays occidentaux, où l’économie est encore convalescente, “parler de surchauffe est une plaisanterie”, selon Eric Chaney.
Le problème des bulles “ne se pose” pas non plus en Inde, affirme à l’AFP Rajiv Kumar, de l’Indian Council for Research on International Economic Relations, à New Delhi, qui prédit que la correction des prix sur les marchés se fera d’elle-même.
Une vue de Hong Kong le 7 octobre 2009. (Photo : Mike Clarke) |
Certains pays émergents n’y croient guère et tentent de maîtriser l’afflux de capitaux. Fin octobre, le Brésil a mis en place une taxe de 2% sur les investissements étrangers en capital fixe et sur les marchés boursiers.
Le véritable coup d’arrêt ne pourra toutefois venir que des grandes banques centrales. Quand elles jugeront que les bases de l’économie sont suffisamment solides, elles pourront relever progressivement leur taux, rendre l’argent plus cher et réduire les effets d’aubaine spéculatifs.
Certains pays (Australie, Israël, Norvège…) l’ont déjà fait mais jeudi la Fed comme la Banque centrale européenne ont de nouveau opté pour le statu quo. “Ce serait hautement prématuré (de relever les taux) en Europe et aux Etats-Unis où la croissance est fragile”, observe Barry Eichengreen.
Mais le débat est ouvert à l’heure où les grands argentiers du G20 se réunissent ce week-end à Saint-Andrews, en Ecosse.