«Vous savez ce que nous coûte le non-Maghreb ? 2% de croissance dont 1% statique
et 1% dynamique», a encore une fois rappelé Mohamed Ghannouchi, le Premier
ministre, dans son discours d’ouverture de la
24ème édition des Journées de
l’Entreprise consacrées cette année à la relation Etat/Entreprise et tenues du
11 au 12 décembre à Sousse.
Le Premier ministre a dénoncé les dérives du régime libéral absolu qui a
considéré que le marché peut s’autoréguler et gérer à lui seul ses ressources.
«Cette tendance est aujourd’hui remise en cause, la crise a remis l’Etat devant
ses responsabilités», a-t-il déclaré. Le FMI, la
Banque mondiale et les agences
de rating n’ont pas vu la crise arriver et n’ont pas pu y remédier à temps. En
a-t-on fini avec elle ? Personne ne peut le savoir et n’a la capacité de prévoir
ce qui pourrait se passer dans un proche avenir.
Comment éviter que cette crise se répète ? Comment éviter que les pays en
développement ou émergents n’en souffrent pas plus alors qu’ils n’en sont pas
responsables ?, interroge Mohamed Ghannouchi. «Les pays riches responsables de
la crise, et à leur tête les USA, ont une responsabilité envers les pays en
développement. A ce titre, ils devraient les soutenir plus, et entre autres par
des financements supplémentaires dont les fonds structurels à l’instar des prêts
accordés au sein de l’Union européenne». 3.000 milliards de $ ont été injectés
sur les marchés financiers internationaux pour atténuer les effets de la crise,
on s’attend à ce que cette somme s’élève à 5.000 milliards de $, a estimé le
Premier ministre.
Les interventions des Etats ne doivent pas être conjoncturelles
Il ne faut pas que les interventions des Etats se limitent à la conjoncture, il
faut qu’elles soient plus régulières et plus constantes, pense M. Ghannouchi.
En Tunisie, l’Etat, qui a fait le choix de limiter sa mainmise sur la vie
économique depuis la fin des années 80, a développé un ensemble de constantes
dont le renforcement de l’efficience économique, le développement régional et la
consolidation de l’initiative privée.
«Malgré toutes les pressions que nous avons subies pour aller dans le sens d’une
libéralisation plus poussée, nous avons préféré la prudence même si l’ouverture
des frontières sur le marché européen a été appliquée avant les délais prévus de
3 ans», a affirmé le Premier ministre.
La mission de l’Etat est économique et sociale, elle se reflète à travers sa
capacité d’anticipation, à travers la préservation de ses ressources humaines,
environnementales, hydrauliques, énergétiques, et la mise en place de stratégies
qui visent à réaliser des sauts qualitatifs touchant à la fiscalité, les
incitations ou le système monétaire.
L’Etat tunisien vise à associer davantage l’entreprise dans la mise en place des
politiques économiques du pays tout comme les représentants de l’UGTT.
Depuis 1999, l’entreprise a acquis de plus en plus de l’importance dans
l’économie du pays, c’est elle qui crée 90% de l’emploi et fourni 85% des
efforts à l’export. Le secteur privé participe à hauteur de 75% au PIB, les 25%
restants relèvent du secteur public.
Les dettes publiques s’élèvent à 50%, les dettes extérieures à 47% en 2009.
Avant le déclenchement de la crise, la Tunisie ambitionnait de réaliser un taux
de croissance de 6,1 ou 6,2%. Aujourd’hui ces ambitions ont été revues à la
baisse, le taux de croissance ne dépassera pas les 3%.
L’entreprise aura à jouer un rôle plus important dans la dynamique économique du
pays, elle devra améliorer son taux d’encadrement en recrutant les diplômés du
supérieur, en renforçant son aptitude à la créativité et l’innovation et la
qualité des produits afin d’être plus compétitive à l’international. Il
faudrait, par ailleurs, développer le réseautage, les échanges à l’échelle
régionale, et surtout maghrébine.
Ceci étant, «notre principal bouclier contre les crises est notre capacité à
nous unir et à développer les partenariats intermaghrébins et arabes, c’est en
se constituant en groupements que nous devenons plus forts, négocions mieux avec
nos vis-à-vis et faisons face aux différentes crises qui peuvent secouer le
monde», a affirmé M. Ghannouchi.
Notre région maghrébine qui, jusqu’au 19ème siècle, constituait une entité
géographique unie par une culture et une histoire communes et où la libre
circulation des personnes et des biens était libre, pourrait-elle revenir à ces
pratiques bienfaisantes pour nos entrepreneurs et nos jeunes en mal d’emplois ?
Nous n’arrêterons jamais de poser cette question, jusqu’à ce que le bon sens
triomphe des conflits insensés et absurdes..