Créée il y a une vingtaine d’années,
l’industrie pharmaceutique tunisienne est à
la veille d’une nouvelle phase de son développement. Alors que les industriels
réclamaient depuis des années des mesures en vue de donner un nouvel élan au
secteur, les pouvoirs publics ont finalement décidé de satisfaire cette demande.
A cet effet, elles ont initié, via le Programme de modernisation industrielle et
dans le cadre d’un partenariat entre les ministères de l’Industrie, de l’Energie
et des PME, et de la
Santé publique, une étude dressant un état des lieux du
secteur et proposant une série de mesures destinées à le booster.
Les conclusions de l’étude ont été consignées dans un rapport présenté lors du
séminaire du 16 décembre sur «les mesures d’appui à l’industrie pharmaceutique»
décidées un mois plus tôt par le président Ben Ali, pour alimenter un débat
national sur les voies et moyens de relancer le secteur.
Réalisée par un expert français –Jean-Baptiste Leaute- et deux tunisiens –Mme
Donia Hedda Ellouze et Mme Ben Youssef Ghouma-, l’étude a mis en exergue les
forces et les faiblesses de cette industrie encore jeune.
Au chapitre des forces, le rapport met en exergue, outre le cadre général du
pays (position stratégique en Méditerranée, qualité de vie, bon niveau des
diplômés de l’université, dont les ingénieurs, ainsi que de la main-d’œuvre,
coûts salariaux et prix de l’immobilier compétitifs, incitations financières et
fiscales aux
PME, stabilité politique, économique et sociale), la large
couverture sanitaire du pays (notamment le nombre de médecins par habitant le
plus élevé au Maghreb, un bon niveau de protection sociale, avec la création de
la
CNAM en 2007), une bonne qualité des produits pharmaceutiques fabriqués
localement (en particulier des vaccins et des sérums conformes aux normes
internationales), des autorités réglementaires au professionnalisme reconnu, le
respect de la législation sur la propriété intellectuelle, et l’existence de
plusieurs centres dédiés à la recherche en biologie et biotechnologie).
Mais ces forces n’occultent pas les faiblesses du secteur : absence de politique
de l’innovation, faible niveau d’investissements dans la R&D, insuffisante
revalorisation de la recherche publique, partenariat public-privé quasi
inexistant, morcellement de
l’industrie pharmaceutique en de petites unités de
production, nombre trop élevé de grossistes répartiteurs par rapport à la
population, absence de sites de production conforme aux normes internationales
et de laboratoires capables d’évaluer la bioéquivalence des médicaments,
faiblesse de l’activité de façonnage, des exportations, et du taux de
pénétration des médicaments génériques, pénurie de pharmaciens et de
techniciens, niveau rudimentaire de l’enseignement de la pharmacie industrielle,
une procédure de fixation des prix pénalisante pour l’industrie locale, etc.
En raison de ces faiblesses, l’industrie pharmaceutique tunisienne est exposée,
selon l’étude, à trois menaces : la forte concurrence commerciale des pays à bas
coûts (zone MEDA, Europe de l’Est, et Asie), la forte pression sur les prix
exercée par les pays arabes et l’externalisation croissante des centres de
recherche internationaux dans les pays à bas coûts.
Mais les atouts de l’industrie pharmaceutique tunisienne sont susceptibles de
permettre à ce secteur de saisir quelques opportunités qui s’offrent à lui avec
trois pays du Maghreb (Libye, Algérie, Maroc), du Moyen-Orient et d’Afrique
francophone avec lesquels la Tunisie connaît une force dynamique commerciale, de
la Méditerranée (dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée qui se met en
place), la croissance du
marché pharmaceutique
(du fait des génériques, des API
et des Biosilimaires) et la recherche & développement.