Google : la justice américaine se penche sur le projet de numérisation de livres

[18/02/2010 21:19:08] NEW YORK (AFP)

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Le logo de Google au salon du livre de Francfort, le 10 octobre 2007 (Photo : John Macdougall)

Les opposants au projet de Google de numériser des millions de livres ont demandé jeudi à un juge new-yorkais de rejeter l’accord conclu en 2008 avec des éditeurs et des auteurs visant à leur garantir une rémunération.

Le juge fédéral Denny Chin, chargé d’établir si cet accord est “juste”, devait entendre des arguments pour et contre, sachant que les opposants à l’accord ont reçu un soutien de poids au début du mois: le ministère américain de la Justice.

Le ministère estime que, même amendé ces derniers mois, l’accord “va trop loin” et reviendrait à “permettre à (Google) d’être le seul acteur sur le marché numérique avec les droits de distribution et d’exploitation d’une grande variété de contenus dans de multiples formats”.

La semaine dernière, Google a répliqué en affirmant que “des concurrents comme Amazon font état d’inquiétudes sur la part de marché potentielle de Google, mais ils ignorent leur propre domination sur le marché”.

Amazon, Microsoft et Yahoo! font partie des concurrents de Google qui ont rejoint le groupe “Alliance pour un livre ouvert”, opposé à l’accord.

Les opposants au projet “pensent que Google a obtenu de facto une licence exclusive qui lui donnera un énorme avantage par rapport aux autres moteurs de recherche, non par la voie des forces normales du marché, mais en raison du mépris de Google pour les droits d’auteurs et de ses tentatives de manipuler le processus judiciaire”, a fait valoir leur collectif jeudi.

A l’issue de poursuites intentées en 2005 par le syndicat des Auteurs et l’Association des éditeurs américain (AAP), Google s’était engagé en octobre 2008 à verser 45 millions de dollars pour rémunérer les auteurs et éditeurs dont les oeuvres auraient été numérisées sans autorisation, et à établir un fonds doté de 30 millions de dollars pour assurer un revenu aux ayant-droits acceptant que leurs livres soient numérisés.

Les principales objections de Washington portent sur les oeuvres étrangères et les oeuvres épuisées dont les ayant-droits ne peuvent pas être identifiés, et visent à ce que Google ne s’approprie pas indûment des droits d’auteur.

Le ministère estime aussi que les concurrents de Google doivent avoir accès aux oeuvres dans les mêmes conditions que le groupe californien.

Les principaux éditeurs français, rassemblés au sein du Syndicat français de l’édition (SNE), ont déjà fait valoir au juge que cet accord est “illogique, injuste et discriminatoire”. Ils préfèreraient qu’il “soit limité aux éditeurs américains, avec la possibilité pour les autres de s’engager s’ils le souhaitent”.

A Paris, ils ont fait condamner Google pour “contrefaçon” en décembre.

Le co-président de l’Alliance pour un livre ouvert, Peter Brantley, ne prévoit pas de décision cette semaine, mais estime que l’audience pourrait “lancer un nouveau cycle de négociations sur la forme finale d’un accord”, a-t-il expliqué à l’AFP.

Comme l’a expliqué un des responsables du projet Google Books dans un document de justice, l’idée, formulée dès 2004, est de “créer une base de données en ligne de tous les livres du monde”.

En soi, l’intérêt du projet n’est pas contesté par l’administration américaine, selon laquelle “un règlement correctement structuré offre le potentiel d’importants avantages pour la société”.

L’accord est également soutenu par les grands noms de l’édition américaine, qui ont hâte que Google offre “de nouvelles façons de distribuer leurs oeuvres”.