Dans le ferroviaire aussi, la Chine a des ambitions à l’international

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à grande vitesse chinois lors de tests à Wuhan ( au centre de la Chine) le 24 décembre 2009

[08/04/2010 07:06:59] PEKIN (AFP) Naguère eldorado ferroviaire de quelques grands groupes étrangers, la Chine affiche aujourd’hui l’ambition de devenir un concurrent majeur des Siemens et Alstom l’ayant aidée à bâtir ses lignes, notamment à grande vitesse.

Alors que des compagnies chinoises construisent déjà des lignes à grande vitesse en Turquie et au Venezuela, le ministère des Chemins de fer dit vouloir exporter “la technologie chinoise” en Amérique du Nord et latine ainsi qu’en Europe.

En Arabie saoudite, Siemens se serait allié avec un consortium chinois conduit par China South Locomotive & Rolling Stock Corp. pour un projet de TGV Médine-La Mecque après avoir réalisé qu’il risquait de perdre l’appel d’offres face à lui.

Un choix qui confirme l’émergence des entreprises chinoises comme acteurs majeurs, aidées en cela tout d’abord par l’appui financier des autorités.

“Le soutien du gouvernement pèse lourd. Les étrangers sont en fait en concurrence avec +la compagnie Chine+, pas seulement des entreprises individuelles, vu les énormes ressources à la disposition des firmes chinoises”, commente Ren Xianfang, analyste d’IHS Global Insight.

“Seules, les entreprises chinoises ne joueraient pas dans la même ligue que les étrangères”.

L’ampleur de son propre projet ferroviaire est un autre atout primordial: la Chine compte être dotée de 120.000 kilomètres de lignes d’ici à 2020 — contre 86.000 km actuellement — dont jusqu’à 50.000 kilomètres de grande vitesse.

Grâce à des transferts de technologie étrangère, elle a inauguré en décembre une nouvelle ligne à grande vitesse entre Wuhan (centre) et Canton (sud), la plus rapide au monde avec une vitesse moyenne de 350 km/h.

“Dans quelques années la moitié du kilométrage mondial de grande vitesse sera en Chine”, souligne Frédéric Campagnac, fondateur de la société Clevy China, consultant spécialisé dans les secteurs du transport et de la construction.

“Ce sont eux aussi qui construisent le plus de matériel roulant en ce moment”, un secteur, “pas totalement automatisé, qui demande de la main d’oeuvre qualifiée”. Du coup “la Chine acquiert un savoir-faire de manière accélérée”, ajoute-t-il.

Mais globalement les Chinois “ont toujours besoin des étrangers sur la grande vitesse”, indique une source industrielle sous couvert de l’anonymat.

Dans les équipes étrangers-chinois comme en Arabie saoudite, “on peut penser que la Chine apporte le low cost de fabrication pour les parties mécaniques, et Siemens, la partie high tech, l’image haut de gamme. Car pour l’instant, on est dans un schéma +classique+: les Chinois copient ce qui est facile mais n?arrivent pas à maîtriser l?ensemble du système”, ajoute ce responsable européen.

Leur présence est néanmoins de plus en plus dangereuse pour les géants du secteur, Bombardier Transportation, Alstom et Siemens qui, avec les Japonais, ont aidé la Chine à se doter de 6.550 km de lignes à grande vitesse à coups de transferts de technologies, mais se retrouvent aujourd’hui à la marge du marché chinois.

Assez pour que le patron d’Alstom Transport, Philippe Mellier, ait appelé l’an dernier les pays occidentaux à refuser d’acheter des trains chinois, en dénonçant la fermeture progressive du pays asiatique aux fournisseurs étrangers.

Généralement, les transferts s’accompagnent de clauses spécifiant que les technologies ainsi acquises par la Chine ne peuvent s’utiliser que sur le territoire chinois.

“Mais leur méthode est qu?ils changent 5% du système, puis affirment l’avoir redéveloppé”, affirme la source industrielle.

“Il est très difficile de juger si la stratégie +technologie contre marché+ a été une décision sage. Les compagnies étrangères ont virtuellement créé des concurrents pour elles-mêmes à travers leurs transferts, mais ont dû aussi joliment gagner” sur le marché Chine, estime Mme Ren.