Le vignoble bordelais cède du terrain sur le marché foncier national

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âteau d’Yquem le 25 juin 2008, au sud de Bordeaux (Photo : Jean Pierre Muller)

[08/04/2010 07:02:39] BORDEAUX (AFP) L’Aquitaine, première région viticole française pour sa valeur foncière il y a 20 ans, a perdu sa place de leader au profit de la Champagne, affichant un paysage viticole à plusieurs vitesses en terme de prix à l’hectare et de revenu, selon les dernières études.

L’Aquitaine, qui comporte le vaste vignoble bordelais avec une cinquantaine d’AOC répertoriées, ne représente aujourd’hui plus qu’un cinquième de la valeur foncière nationale contre près du tiers en 1991, selon une étude de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) Aquitaine.

Si la Champagne s’est renforcée, en absorbant plus de la moitié des 47 milliards d’euros que représente le foncier viticole français à appellation, le vignoble bordelais a subi de plein fouet l’impact de la crise mondiale.

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à Mutigny, en Champagne-Ardenne (Photo : Francois Nascimbeni)

L’endettement des viticulteurs y est un des plus élevés de France et leur revenu annuel moyen, à 28.200 euros en 2007, parmi les plus bas de l’hexagone.

En outre, “un viticulteur aquitain sur deux dispose d’un revenu inférieur à 18.000 euros soit l’équivalent de la valeur d’un hectare de bordeaux rouge”, souligne l’étude de mars 2010.

“La crise qu’on observe sur le marché viticole, on la retrouve sur le marché des vignes, où beaucoup de propriétés sont à vendre”, déclare à l’AFP Hervé Olivier, directeur départemental de la Safer (Société d’aménagement foncier et d’établissement rural). “Le marché a diminué de manière significative: on a eu 1.500 hectares de vignes vendues en 2009, en baisse de 23% par rapport à 2008, pour un montant total de 109 millions d’euros au lieu de 120 millions en 2008, en baisse de 9% en valeur globale”, dit-il.

En dehors de cinq appellations “prestigieuses” — Pomerol, Margaux, Saint-Julien, Saint-Estèphe et Pauillac –, le prix moyen de l’hectare de vigne planté ne cesse de chuter en Aquitaine, souligne encore la Draaf, dans une étude de février 2010.

“En 20 ans, le paysage viticole aquitain s’est redessiné” avec de grandes “disparités”: d’un côté des appellations à forte valeur ajoutée qui attirent les investisseurs, de l’autre près des deux tiers des surfaces viticoles en stagnation ou en chute libre. Beaucoup ont perdu entre le quart et plus de la moitié de leur valeur initiale.

“On assiste à un nivellement par le bas avec une viticulture à deux vitesses”, commente Jacky Bonotaux, chef du pôle études et prospectives à la Draaf.

Avec moins d’un vingtième de la surface viticole régionale, les cinq “soeurs” représentaient en valeur la moitié du foncier viticole régional en 2008 (contre 18,7% en 1991).

Selon des données de 2008, près des deux tiers des surfaces viticoles d’Aquitaine se négocient en dessous de 20.000 euros. A l’opposé, les cinq “grandes” font “jeu égal avec le vignoble champenois” et affichent un prix à l’hectare supérieur à 800.000 euros.

Leurs prix, déjà plus élevés en 1991, ont triplé voire quintuplé en 17 ans.

A Margaux, le prix moyen de l’hectare de vigne planté a atteint le million d’euros en 2008, en progression de 395,5% par rapport à 1991. Idem pour le Pomerol, en hausse de 164,6% tandis que le Fronsac affiche la plus forte baisse à 55.000 euros l’hectare (-26,7%).

“On observe un nouveau décrochage des prix à l’hectare sur les trois premiers mois de 2010”, explique M. Olivier, “un seuil psychologique a été franchi et (sur les bordeaux génériques) les vendeurs acceptent des offres à des prix inférieurs à 15.000 euros l’hectare, du coup les transactions repartent”.