Ce n’est pas un match nul, mais un non-match en raison du refus de l’arbitre
–en l’occurrence le Conseil de la concurrence (C.C.)- de se prononcer. C’est ce
à quoi ressemble le conflit opposant «Enerciel Tunisie» -filiale de la société
française éponyme opérant dans la production d’énergie éolienne- à la Société
Tunisienne d’Electricité et de Gaz (STEG).
Le conflit éclate au grand jour lorsqu’en décembre 2006, Enerciel Tunisie
introduit un recours devant le Conseil de la concurrence pour lui demander
d’ordonner la suspension d’un appel d’offres en attendant que le fond de
l’affaire les opposant soit examiné.
Cette affaire commence à la fin des années 90 lorsque la société plaignante
conclut un accord avec le ministère de l’Industrie, portant conduite d’études
pour le repérage de sites propices au lancement de projets de production
d’électricité d’origine éolienne «en collaboration avec la STEG et dans le cadre
d’une convention conclue entre les deux sociétés en janvier 1999».
D’après la défense d’Enerciel Tunisie, ces études communes «qui ont duré huit
ans, et ont coûté à la plaignante plus de 5 millions de dinars, ont permis de
choisir quatre site» que la filiale tunisienne d’Enerciel «était supposée
exploiter pour produire de l’électricité et la vendre à la STEG».
Mais Enerciel Tunisie –qui, affirme-t-elle, «a présenté au ministère un projet
pour le faire avaliser et commencer la production»- la plaignante affirme avoir
«été surprise de voir la STEG se transformer en concurrent dans ce projet en
présentant une offre financière que le ministère a jugé meilleure» que la sienne
–mais qu’Enerciel Tunisie qualifie d’«irréaliste et excessif».
De même, cette société voit dans l’appel d’offres lancé par la STEG en vue de la
création de 3
centrales électriques éoliennes «une violation de la loi», «une
atteinte claire» à son propre projet et «un abus de position dominante». Un avis
qui se base sur le fait que, aux yeux d’Enerciel Tunisie, les études réalisées
et présentées au ministère de l’Industrie appartiennent aux deux entreprises
mais qu’elles ne peuvent être exploitées qu’avec leur accord.
Dans ses réponses à ces accusations, la défense de la STEG a d’abord mis en
avant un vice de forme : «la convention conformément à laquelle la collecte de
données techniques pour mesurer la force du vent a été conclue entre la STEG et
Enerciel France, alors que la plainte est déposée par une entité morale qui
n’est pas partie» à cet accord, et dont le «représentant légal n’est pas celui
d’Enerciel France. Ensuite, soutient la défenderesse, cette convention «concerne
une campagne de mesure commune des caractéristiques climatiques de certains
sites et n’évoque pas la question de la production et la réalisation d’une
centrale éolienne». De même, affirme la même source, «rien dans la convention ou
dans ses annexes n’indique» que la STEG «s’est engagée à accorder la concession
de la production à la plaignante».
La STEG ne reconnaît pas non plus à son adversaire la propriété intellectuelle
des données techniques collectées, puisque «la convention stipule clairement que
la durée de la propriété est limitée à cinq ans ayant pris fin en 2004».
Concernant les sites retenus pour accueillir l’activité de production
d’électricité éolienne, la STEG soutient qu’ils «ont été découverts avant
l’intervention de la plaignante».
Enfin, en réponse aux accusations sur l’octroi du marché à elle, la STEG révèle
que «l’autorité de tutelle a étudié l’offre d’Enerciel pour la production
d’électricité selon un accord de gré à gré, mais le conseil ministériel du 22
mars 2004 a décidé de ne pas l’accepter et d’inviter la société qui l’a soumis à
prendre part à l’appel d’offres».