A entendre ces jours-ci le discours officiel sur le tourisme, on est tenté de
croire qu’on est en présence d’un «scénario de rupture». Et pourtant, à regarder
de près, le message n’est pas aussi exhaustif qu’on le pense. Beaucoup de zones
d’ombre méritent d’être éclairées et beaucoup de créneaux porteurs occultés
méritent qu’on s’y attarde.
Que dit le discours officiel ?
Pour revenir à l’actualité, en l’espace d’un mois, le ‘’nouveau’’ ministre du
Tourisme, M.
Slim Tlatli, est intervenu à trois reprises pour donner d’amples
éclairages sur la nouvelle feuille de route du secteur (étude stratégique sur le
développement du secteur à l’horizon 2016). Une première fois lors de
l’Assemblée élective de la Fédération tunisienne de l’Hôtellerie (FTH), une
deuxième fois lors d’un débat parlementaire sur ce dossier, et une troisième (la
plus récente) lors d’une conférence de presse.
Globalement, la nouvelle stratégie se propose d’atteindre deux objectifs majeurs
: améliorer le rendement du tourisme tunisien et accroître le taux de croissance
du secteur. Par les chiffres, il s’agit d’accueillir, à l’horizon 2014, 10
millions de touristes et de réaliser des recettes en devises de 5 milliards de
dinars tunisiens.<
Pour y arriver, le ministre invite la profession à s’adapter, en toute urgence,
à trois principales nouvelles tendances : l’offre et la demande individualisées
qui viennent consacrer la fin du tourisme de masse, le rôle croissant de
l’Internet dans les réservations qui vient limiter le rôle des Tours opérateurs
et le last minute généré par l’Open Sky et auquel il faudrait se préparer
(initiation à un nouveau management et à de nouvelles méthodes de marketing).
Les études sur le secteur pensent autrement
Si on établit maintenant un parallèle entre les objectifs de cette stratégie et
les conclusions-propositions formulées par les nombreuses études faites, ces
dernières années sur le secteur, on se rend compte que beaucoup d’autres
chantiers gagneraient à être ouverts, parallèlement, dans l’ultime objectif
d’inscrire cette activité dans la durée, et surtout, d’en faire profiter tout le
pays. Le littoral où s’est développé le balnéaire n’est pas hélas toute la
Tunisie.
Est-il besoin de rappeler que, durant la période, 2000-2009, plusieurs bailleurs
de fonds (Banque mondiale…), agences onusiennes spécialisées (Programme des
Nations unies pour l’environnement ‘’PNUE’’), agences de coopération (Agence de
développement française (AFD), JICA (Japon), agences de notation, experts,
architectes… ont effectué des études, fort intéressantes sur le tourisme
tunisien.
En gros, ces think tank estiment que l’industrie touristique tunisienne est un
modèle économique à rénover. Ce secteur souffre de problèmes structurels :
surcapacité hôtelière sur le littoral (90%), faible diversification du produit
touristique, pouvoir de négociation des prix de vente défavorable aux hôteliers
opérateurs, étroitesse de la stratégie marketing et endettement élevé des
entreprises hôtelières.
Au rayon des propositions, l’ensemble de ces études suggèrent d’agir sur quatre
volets : territorialisation et diversification, gestion intégrée de la qualité (GIQ),
innovation et formation.
Concernant la territorialisation, les conclusions de ces études préconisent le
développement du tourisme des régions de l’intérieur et l’implication des
communautés locales dans la gestion du produit.
Objectifs : mettre fin au «tourisme réfectoire» qui favorise la «ghettoïsation»
des touristes et rapproche villes et touristes. «Cela nécessite la mise en place
d’une stratégie de différenciation touristique par la valorisation de l’espace
grâce à une approche touristique identitaire des territoires. Pour ce faire, il
importe d’étudier la faisabilité de la labellisation des régions et
l’organisation des régions autour de “Projets de destination”.
Des produits comme le tourisme culturel, l’écotourisme et le tourisme saharien
gagneraient à être boostés dans cette perspective.
S’agissant de la GIQ, ce créneau intègre le degré de satisfaction généré par le
respect de l’environnement, l’efficacité économique du secteur, équité sociale
qu’il favorise et la fidélisation de la clientèle. Cela nécessite la mise en
route de chantiers devant développer le partenariat entre les divers
intervenants (administration + profession…), l’adoption des best practices
(adaptation aux normes, certifications et labels, instruments de suivi et
évaluation, développement de l’offre…), et l’institution d’incitations fiscales
et financières et autres….
Ces études recommandent aux hôteliers de faire preuve d’innovation, de
s’appuyer, à cette fin, sur les Nouvelles technologies de l’Information et de la
Communication (Internet et autres..), d’être à l’écoute des attentes de la
clientèle et d’adopter les technologies à même d’aider à la pérennisation de
l’activité touristique.
Enfin, les auteurs de ces études recommandent d’agir sur la formation. Celle-ci
serait synonyme de mise en place de nouvelles figures professionnelles
susceptibles de créer de nouvelles compétences professionnelles dans le domaine
du patrimoine, du tourisme et de l’environnement.
L’élaboration d’une certification professionnelle (formation transversale et
polyvalente) spécifique à la formation professionnelle et à la gestion des
centres. <
En plus clair encore, en dépit des défis, le seul investissement sûr pour les
professionnels du tourisme consiste à améliorer la qualité de l’offre et à
investir, à cette fin, dans l’amélioration constante de la qualité de la
formation professionnelle.
In fine, le mot d’ordre demeure la qualité et rien que la qualité.