La crise grecque relance l’idée d’une agence de notation européenne

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éen (Photo : Steffi Loos)

[03/05/2010 18:09:16] BRUXELLES (AFP) L’idée d’une agence de notation européenne est relancée par la crise grecque, qui a encore montré la toute puissance des organismes d’évaluation américains sur lesquels l’UE n’a que peu de contrôle malgré ses efforts pour discipliner le secteur.

“Plus de concurrence dans ce domaine ne peut pas nuire” et une agence de notation européenne “pourrait être utile”, a estimé lundi la chancelière allemande Angela Merkel.

Vendredi, le commissaire européen chargé des services financiers, Michel Barnier, a aussi dit “réfléchir à l’idée, la faisabilité et à la valeur ajoutée d’une agence supplémentaire, qui serait européenne”.

“Le paysage des agences, compte tenu de leur importance, est très concentré dans quelques mains”, ajoutait-il.

Aujourd’hui, trois grandes agences, toutes américaines, font en effet la pluie et le beau temps: Standard and Poor’s, Moody’s et Fitch.

Leurs notes sur la capacité d’une entreprise ou d’un Etat à rembourser ses dettes sont des éléments essentiels pour fixer les taux d’intérêt sur les marchés. Il n’est qu’à voir la panique qui y a suivi la semaine dernière la décision prise par Standard and Poor’s de rétrograder la Grèce parmi les émetteurs d’obligations “pourries”.

Les Européens ont pris l’an dernier des mesures pour tenter d’encadrer davantage les agences de notations, dans la foulée de la crise bancaire mondiale où elles avaient déjà été mises en cause.

Si aujourd’hui on les accuse d’excès de zèle, elles avaient été accusées à l’époque d’avoir sous-estimé le risque de certains produits financiers complexes détenus par des institutions comme Lehman Brothers.

Les nouvelles règles, qui doivent être intégrées d’ici le 7 décembre dans le droit national des 27 pays de l’UE, obligent notamment les agences souhaitant exercer leur activité en Europe à s’enregistrer, et conditionnent le maintien de leur licence au respect d’une série de règles.

Les agences devront notamment se montrer plus transparentes, sur leurs méthodes d’évaluation ou les risques présentés par certains types de titres par exemple, faire des efforts pour éviter les conflits d’intérêts et assurer l’indépendance de leurs analystes…

Même les agences américaines devront s’y soumettre. “Les règles incluent toutes les agences basées en Europe, et les agences américaines ont toutes des filiales en Europe qui ont une personnalité juridique”, explique-t-on à la Commission européenne.

Mais cette perspective ne semble pas vraiment influencer leurs comportements. Bruxelles les a encore rappelé à l’ordre la semaine dernière, leur demandant d’agir “de façon responsable”.

“On ne dégrade pas un pays dans les conditions où sa notation (de la Grèce NDLR) a été dégradée, c’est-à-dire quinze minutes avant la clôture”, a aussi critiqué lundi la ministre française des Finances, Christine Lagarde, pour qui il faut “contrôler plus” les agences.

Mais une nouvelle agence européenne ne sera pas forcément la solution, d’autant que ses contours restent flous.

Angela Merkel l’imagine davantage orientée vers “la pérennité” de l’économie que ses homologues américaines, plus centrées sur le court terme.

Le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, Jean-Claude Juncker, avait aussi jugé “sensé” en mars de créer une agence chapeautée par la BCE et qui se contenterait d’évaluer la dette souveraine, des Etats.

Surtout, il lui faudra probablement longtemps avant qu’une compétence similaire à celle de ses homologues américaines lui soit reconnue.

“Le tout c’est qu’elle soit indépendante, et qu’elle soit véritablement très experte, et cela prendra du temps”, prévenait ainsi vendredi Jean-Pierre Jouyet, président du gendarme français de la Bourse.