Un euro en baisse, c’est bon pour les exportations, pas pour la consommation

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Evolution de l’euro face au dollar sur un an (Photo : AFP/Infographie)

[04/05/2010 18:05:56] PARIS (AFP) L’affaiblissement de l’euro par rapport au dollar constitue une bonne nouvelle pour les exportateurs français qui vendent hors de la zone euro, mais en renchérissant le prix de l’essence ou de nombreux biens importés, il rogne le pouvoir d’achat des consommateurs français.

Le plan d’aide à la Grèce à peine bouclé, la crainte d’une contagion de cette crise de la dette au reste de l’Europe a fait replonger l’euro mardi, qui valait 1,3035 dollar vers 16H00 GMT, son plus bas niveau depuis un an.

La devise européenne a perdu plus de 9% de sa valeur depuis janvier et près de 20% par rapport à juillet 2007, où elle avait atteint son plus haut historique, à 1,6038 dollar.

Pour les entreprises françaises qui produisent en zone euro et exportent vers les Etats-Unis ou les pays émergents dont la monnaie est arrimée au dollar, comme la Chine ou le Brésil, c’est une bouffée d’air, qui va leur permettre de desserrer leurs marges.

C’est le cas des entreprises du secteur aéronautique et de défense, comme EADS, sa filiale Airbus et ses sous-traitants (Thales, Safran, Latécoère…), du luxe (LVMH) ou encore des producteurs de vins et spiritueux, qui se plaignent tous de manière récurrente de la force de l’euro.

Pour Louis Gallois, le président d’EADS, le taux de change euro/dollar a représenté un manque à gagner de “3 milliards d’euros de résultat annuel en trois ans”, ce qui a donné un “avantage compétitif” notable à Boeing, le concurrent américain d’Airbus.

La filière viticole, dont le Royaume-Uni et les Etats-Unis sont les principaux marchés, est également “plombée par l’euro fort: on perd des parts de marché au profit des pays du nouveau monde”, déplore Julien Dourgnon, président du syndicat des Vignerons indépendants.

Dans ces conditions, un affaiblissement de l’euro constitue indéniablement un “élément de soutien à la reprise européenne”, estime Christian Parisot, stratégiste chez Aurel.

Toutefois, il “joue moins sur les volumes que sur les marges”, car la progression des ventes dépend du “dynamisme de la demande intérieure, et pas juste du prix”, selon lui. Autrement dit, ce n’est pas parce que les producteurs baissent le prix du champagne qu’ils vont en écouler plus.

En outre, la France profitera moins que l’Allemagne de cette dépréciation car “une partie importante” de ses exportations (49%) est destinée à la zone euro, un chiffre qui tombe à 43% chez son voisin rhénan, tempère Alberto Balboni, spécialiste du commerce extérieur, chez Xerfi.

Pour Jean-Paul Herteman, le président du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS), l’affaiblissement actuel de l’euro ne change pas la donne: son niveau actuel “menace” toujours l’industrie, la parité d’équilibre se situant, selon lui, autour de 1,20 euro.

Côté consommateurs, les Américains ou Japonais qui visitent la France voient leur pouvoir d’achat renforcé par l’appréciation de leur monnaie.

Mais les Français payent plus cher les produits manufacturés fabriqués en zone dollar (Amérique du nord et du sud, Asie) et surtout leur essence, le baril se vendant en dollar. Effet de cette dépréciation de l’euro, les prix à la pompe ont atteint en avril leur plus haut depuis un an et demi.

Or, “une baisse du pouvoir d’achat issue d’une trop forte dépréciation de l’euro pourrait compromettre le dynamisme de la consommation sur lequel la France a fondé son modèle de croissance”, prévient M. Balboni.