L’Europe sous les coups de boutoir de la crise grecque

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éen au-dessus du Parthénon, le 3 mars 2010 à Athènes (Photo : Louisa Gouliamaki)

[06/05/2010 10:10:18] ATHENES (AFP) La crise grecque continuait de déstabiliser l’Europe jeudi, alors que le Parlement d’Athènes examinait un plan d’austérité draconien au lendemain de violences ayant fait trois morts et que la Banque centrale européenne se réunissait au Portugal pour éviter la contagion.

L’agence de notation financière Moody’s a porté un nouveau coup en estimant que la crise financière grecque représentait un risque important pour les banques de plusieurs pays européens, dont le Portugal, l’Espagne, l’Italie, l’Irlande et le Royaume-Uni.

L’euro s’est remis à plonger, décrochant à 1,2737 dollar vers 07H00 GMT, un nouveau plus bas depuis le 12 mars 2009, avant de se stabiliser à 1,2804 dollar en fin de matinée.

Les Bourses de Londres, Paris, Francfort, Madrid et Milan ont encore ouvert en baisse jeudi avant de se redresser en fin de matinée. Mais l’onde de choc des violences d’Athènes s’est faite ressentir jusqu’aux places financières de Tokyo, qui a clôturé à -3,27%, et de Shanghai, tombée à son plus bas niveau depuis huit mois.

Les graves incidents survenus mercredi à Athènes, où trois personnes sont mortes dans l’incendie d’une banque incendiée par des émeutiers en marge d’une grande manifestation, font aussi craindre l’échec d’un plan d’austérité imposé à la Grèce par l’Europe et le Fonds monétaire international en échange d’une aide de 110 milliards d’euros.

Deux centrales syndicales grecques ont appelé à de nouvelles manifestations jeudi à 18H00 (15H00 GMT) devant le Parlement d’Athènes, au moment où sera soumis au vote ce plan sans précédent présenté en contrepartie de l’aide financière internationale. Ces rassemblements étaient prévus avant les violents désordres de mercredi, et ont été maintenus, alors qu’il avait un temps été question de les annuler.

Tous les yeux étaient également fixés jeudi sur Lisbonne où la BCE a entamé une réunion de son conseil des gouverneurs, alors que les craintes de contagion de la crise grecque à l’Espagne et au Portugal restent vives.

Les gouverneurs de la BCE se retrouvent deux fois par an hors du siège de Francfort. Le rendez-vous de Lisbonne a été pris de longue date, mais entretemps, le Portugal a vu sa dette à long terme dégradée par l’agence Standard and Poor’s, comme son voisin l’Espagne.

L’Espagne, récemment attaquée sur les marchés, a en tout cas levé jeudi avec succès 2,345 milliards d’euros en bons du trésor à cinq ans, à un taux moyen de 3,532%, plus élevé que lors de la précédente émission, mais satisfaisant compte tenu de la situation financière du pays.

Le président de la BCE, Jean-Claude Trichet, aura à répondre à de nombreuses questions alors que les dirigeants européens multiplient les réunions sans parvenir à endiguer la vague d’inquiètude qui s’est emparée du Vieux continent depuis l’aggravation de la crise grecque.

Les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro se retrouveront ainsi vendredi pour un sommet extraordinaire à Bruxelles.

Des voix ont plaidé avant ce sommet pour un renforcement du Pacte de stabilité censé limiter notamment les déficits publics, une position réitérée jeudi par la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy, dans une lettre commune publiée par le journal Le Monde.

Certains pays, dont l’Allemagne, longtemps réticente au sauvetage grec, pourraient avoir à payer plus en faveur de la Grèce si d’autres Etats connaissant des difficultés, tel le Portugal, venaient à limiter leur propre participation au soutien financier international, relevaient jeudi deux journaux allemands.

La banque française BNP Paribas a annoncé que son exposition à la dette de la Grèce atteignait cinq milliards d’euros, à quoi s’ajoutent trois milliards d’engagements commerciaux sur des entreprises privées grecques.

Le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner s’est prononcé contre le retrait de la Grèce de la zone euro, estimant qu’il en va du sort de la monnaie européenne.

“La population grecque souffrirait beaucoup plus encore qu’elle ne souffre et je sais qu’elle souffre”, a-t-il dit. “Ce serait pire, il ne faut pas affaiblir l’Europe, elle est déjà dans un état difficile, il faut la renforcer”.

Face à la contestation sociale, le ministre grec des Finances Georges Papaconstantinou a martelé lors du débat parlementaire que le “seul moyen pour échapper à la banqueroute” est d’adopter les mesures d’austérité prévues.

La presse grecque était elle partagée entre “colère” et “inquiétude” pour l’avenir du pays. La Grèce “s’est retrouvée hier au centre de l’attention internationale”, a noté To Vima (centre-gauche). “Personne ne peut prévoir comment les choses évolueront à partir de maintenant”.