L’Union européenne enfante dans la douleur un gouvernement économique

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à Athènes le 12 mai 2010 (Photo : Filippo Monteforte)

[14/05/2010 08:56:43] BRUXELLES (AFP) La crise budgétaire grecque a contraint l’Europe à se transformer radicalement, en créant une sorte de Fonds monétaire en zone euro ou en posant les jalons d’une nouvelle discipline budgétaire, mais les obstacles restent nombreux pour parvenir à un vrai gouvernement économique.

“Les Etats membres doivent avoir le courage de dire s’ils veulent une Union économique et monétaire ou pas”, a lancé mercredi le président de la Commission européenne José Manuel Barroso.

Ils disent non depuis 20 ans, mais la crise déclenchée par la situation désastreuse des comptes publics grecs a mis en évidence l’indiscipline budgétaire de nombre d’entre-eux et fragilisé comme jamais la zone euro.

Dans l’urgence, l’UE a mis en place peu ou prou son propre Fonds monétaire régional pour pouvoir jouer les pompiers en faveur des pays en difficulté. Quelque 500 milliards d’euros de garanties de prêts ont été mises à disposition par les pays de la zone euro, complétés par au moins 250 milliards d’euros du FMI.

L’Europe veut à présent renforcer la coordination des politiques économiques nationales.

Bruxelles a proposé cette semaine un contrôle au préalable des projets de budgets nationaux et demandé un arsenal de sanctions accru pour les pays trop laxistes. Une initiative qui a réveillé les sentiments souverainistes y compris chez les partisans les plus fervents de l’intégration européenne.

“Humiliant”, a ainsi commenté le journal français Libération (gauche). Les première réactions laissent augurer de furieux débats.

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ésident de la Commission européenne Jose Manuel Barroso (G) et le commisssaire européen aux affaires économiques Olli Rehn le 12 mai 2010 à Bruxelles (Photo : John Thys)

“La politique économique d’un pays n’est pas seulement une affaire nationale, c’est une question d’interêt commun”, a plaidé M. Barroso.

L’exécutif européen n’a pourtant pas osé suivre le patron du FMI, le Français Dominique Strauss-Kahn, qui a lui suggéré des “transferts budgétaires entre les Etats” européens. Ce qui ferait basculer l’Europe vers l’Union budgétaire que souhaitent les plus fédéralistes, comme l’ancien chef du gouvernement français Edouard Balladur.

Ceux-ci estiment que la zone euro ne pourra fonctionner si elle reste sur un seul pied, l’Union monétaire.

La crise de confiance est “contagieuse” en raison de l’ampleur des déficits dans l’UE, a toutefois averti à Bruxelles le directeur du FMI pour l’Europe, l’ancien Premier ministre polonais Marek Belka, très impliqué dans le plan de sauvetage des économies de la zone euro.

Les uns après les autres, les gouvernements adoptent des mesures d’austérité et se préparent à des tensions sociales. A commencer par l’Espagne et le Portugal, deux pays dirigés par des socialistes.

Le premier a annoncé une baisse du salaire des fonctionnaires et un gel des retraites, le second une baisse accrue des dépenses publiques.

La Confédération syndicale européenne (CES) y voit le risque “de précipiter l?économie dans une récession prolongée entraînant ainsi une sérieuse augmentation du chômage”.

La tourmente n’a pourtant pas dissuadé l’Estonie. Elle a obtenu cette semaine un feu vert pour devenir le 17ème membre de la zone euro le 1er janvier 2011, avant sans doute une pause jusqu’en 2014 dans l’élargissement.

“C’est un signe de confiance”, s’est félicité Olli Rehn, le commissaire chargé des questions économiques et financières.

Les Britanniques ne partagent pas cet enthousiasme. La nouvelle coalition au pouvoir a rejeté toute adhésion à l’euro pour la législature au moins.

Ils vont néanmoins devoir s’attaquer comme les autres aux énormes déficits du pays. Mais en cas de problèmes, Londres pourrait se trouver bien seule, car ses partenaires européens ont peu apprécié son refus de participer au mécanisme de garanties pour la zone euro, contrairement à la Suède et à la Pologne, deux autres pays n’utilisant pas encore la monnaie unique.