Espagne : le gouvernement adopte l’austérité, la rue commence à se mobiliser

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à Madrid le 20 mai 2010 (Photo : Dominique Faget)

[20/05/2010 17:51:12] MADRID (AFP) Les fonctionnaires espagnols ont protesté jeudi contre la baisse de leurs salaires inscrite dans un plan d’austérité que le gouvernement devait approuver dans la soirée pour accélérer la baisse des déficits publics, sous la loupe des marchés et de ses partenaires européens.

A Madrid, des milliers de fonctionnaires se sont rassemblés à 18H00 (16H00 GMT) devant le ministère de l’Economie, à deux pas de la très touristique Puerta del Sol, dans un vacarme assourdissant de sirènes.

“C’est totalement injuste. Il y a d’autres types de mesures possibles”, a estimé Diego, professeur de formation professionnelle à Madrid.

Les centrales syndicales CCOO et UGT, ainsi que le syndicat indépendant CSIF, ont convoqué des rassemblement identiques dans toute l’Espagne, prélude à une grève de la fonction publique le 8 juin.

Les fonctionnaires ont manifesté au moment même où le conseil des ministres se réunissait pour valider par décret-loi son impopulaire plan d’austérité.

Pressé par les marchés et ses partenaires européens, le chef du gouvernement socialiste, José Luis Rodriguez Zapatero, a franchi le Rubicon la semaine dernière en annonçant des coupes sévères dans les dépenses sociales, s’aliénant les syndicats et une partie de l’opinion publique.

Le conseil des ministres doit approuver notamment une baisse moyenne de 5% du salaire des fonctionnaires à partir de juin et un gel de la revalorisation automatique des retraites en 2011.

L’Espagne, confrontée à des déficits publics de 11,2% du PIB et à de faibles perspectives de croissance, passe pour un maillon faible de la zone euro.

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à une manifestation contre le plan d’austérité annoncé par le gouvernement le 20 mai 2010 à Malaga (Photo : Jorge Guerrero)

Même si la Bourse espagnole a été très chahutée ces dernières semaines (l’indice Ibex-35 a perdu plus de 20% depuis début janvier), l’Espagne ne rencontre pas trop de difficultés pour émettre de la dette.

Jeudi, le trésor a placé 3,52 milliards d’euros d’obligations à 10 ans, plus que le maximum de 3,5 milliards d’euros attendu, à un taux moyen relativement raisonnable de 4,04%. “Les résultats ont été rassurants”, ont estimé les analystes d’Unicrédit.

Mais en Espagne, le plan d’austérité place M. Zapatero en grande difficulté.

Les syndicats, avec lesquels il a toujours entretenu de bons rapports depuis son accession au pouvoir en 2004, n’excluent pas d’appeler à une grève générale tous secteurs.

“Ma responsabilité (…) est de penser à l’avenir de mon pays, plus qu’à un quelconque avenir politique et personnel”, a déclaré dimanche M. Zapatero, dont la cure d’austérité, qui frappe principalement les classes moyennes, a été interprétée dans les médias comme une forme de suicide politique.

Les socialistes ne disposent que d’une majorité relative au Parlement, qui devra valider d’ici un mois le décret-loi.

M. Zapatero a jusqu’à présent toujours obtenu, au cas par cas, le soutien des indépendantistes basques ou catalans sur l’économie.

S’il n’y parvient pas et qu’il ne rallie pas les votes de la droite au nom de l’intérêt national, il s’exposera à une crise politique, avec éventuelle motion de censure à la clé. A Madrid, certains manifestants scandaient “Zapatero, démission !”.

Pour tenter d’apaiser son électorat, M. Zapatero a annoncé mercredi qu’il travaillait à un nouvel impôt pour les plus riches. Selon la presse, il frapperait ceux qui possèdent un patrimoine de plus d’un million d’euros.

Zapatero “est aux mains de la droite économique et politique”, a dénoncé jeudi le leader des écolo-communistes de IU, Cayo Lara.

Le Premier ministre socialiste portugais José Socrates, dont le pays est dans une situation semblable à celle de l’Espagne, a défendu M. Zapatero sur la télévision espagnole en disant qu’aujourd’hui, “la gauche doit être réaliste”.